Chapitre 1
- Réveille-toi !!
Dans l’infinie obscurité, une voix resonnait dans la tête de cette jeune fille pour qui la chance avait mal tourné.
- Réveille-toi !
Une voix douce et attendrissante, dont la sonorité faisait penser à un appel à l’aide. La jeune fille se sentait submergée par ce sentiment étrange que lui transmettait la voix. Elle avait peur mais ne savait pas pourquoi. Son corps paralysé amplifiait davantage ce sentiment.
Où était-elle ?
Pourquoi son corps ne répondait-il plus ?
C’est dans la confusion la plus totale qu’elle entendit soudain une autre voix, plus grave et plus claire que la précédente.
- Julia ! Julia !
Attirée par cette voix, la jeune fille ouvrit lentement les yeux. A son réveil, son regard se porta en premier sur une infirmière qui lui remettait sa perfusion en place et lui sourit délicatement, comme pour lui dire que tout allait bien. Toujours confuse, la jeune fille continua son analyse et s’arrêta, l’air un peu perdu, en s’interrogeant sur la personne qui se trouvait à sa droite.
C’était un jeune homme dont la beauté égalerait presque celle d’un dieu grec. Il était vêtu d’un costume noir et d’une chemise blanche sur laquelle on pouvait apercevoir des taches de sang séché. Mais le jeune homme n’avait pas l’air d’être blessé. On pouvait voir à son regard éteint et à ses vêtements froissés qu’il n’avait pas dormi depuis plusieurs jours. Sa main tenait fermement celle de la jeune fille, attendant impatiemment son réveil.
Ses yeux bleus, pleins d’inquiétude, exprimèrent un immense soulagement à l’instant où la patiente ouvrit les yeux. Son visage pale reprit, bien que légèrement, les couleurs qui lui étaient propres et affichait un léger sourire rassuré.
Il posa délicatement sa main sur la joue de Julia, dont les pensées amphigouriques n’amélioraient pas son état, et la caressa tendrement. Il se pencha ensuite pour l’embrasser, mais s’interrompit lorsqu’il entendit les paroles de la jeune fille.
- Euh… ! Qui… Qui êtes-vous ?
Surpris par ces mots, le jeune homme s’empressa d’appeler un médecin avant de retourner au chevet de sa belle.
- Julia ! C’est moi, je suis ton petit ami ! Répondit le jeune homme d’une voix triste et apeurée. Je suis désolé c’est ma faute, pardonne-moi !
- Ne vous en faites pas, son amnésie n’est que temporaire, dit le médecin qui examina minutieusement la jeune patiente. Elle a dû recevoir un choc violent lors de l’accident. Laissez-la se reposer encore quelques jours et sa mémoire reviendra naturellement.
À la suite de ses mots, le médecin sortit de la chambre suivie de l’infirmière, laissant le jeune homme et la patiente en toute intimité.
- Julia ? C’est mon nom ? Demanda la jeune d’une voix douce et timide.
- Oui ! Julia Morice ! Répondit aussitôt le jeune homme en tenant fermement la main de Julia et ajouta :
- Et moi c’est….
Alors qu’il s’apprêtait à lui donner son nom, la jeune fille fut prise d’une étrange migraine qui lui fit hurler de souffrance. Les mains posées sur sa tête, les ongles plantés dans ses cheveux, la jeune patiente se tordit de douleur sous les yeux effrayés du jeune homme.
Ses cris, stridents et puissants, rameutèrent le médecin ainsi que plusieurs infirmières, qui s’empressèrent de la stabiliser. En moins d’une seconde, elle succomba aux effets soporifiques de l’anesthésie et s’endormit.
Envahi par la peur, Dellia quitta la chambre à toute vitesse sans regarder derrière lui, le cœur serré et meurtri.
Il se sentait responsable de l’état de Julia. Il se dit que si seulement il n’avait pas insisté pour prendre ce chemin, rien de tout cela ne serait arrivé. Si seulement il était celui allongé sur ce lit d’hôpital, il n’aurait pas à voir sa bien-aimée souffrir autant. Il se détestait, s’en voulait, se haïssait, mais avant tout, la plaignait, compatissait et l’aimait. Son seul désir était de revoir Julia en pleine forme et souriante comme à son habitude.
Recroquevillé sur lui-même devant l’hôpital, le jeune homme ne cessait de penser à Julia. Il se souvint du jour de leur première rencontre, il y’a deux ans déjà.
Il revoyait le sourire rayonnant de Julia qui avait réchauffé sa vie tel un rayon de soleil perçant l’hiver de son existence. Il avait été fasciné par cette jeune fille à la chevelure d’or, apparue sans crier garde dans son monde vide et froid.
Il se souvint de ce sourire, ce sourire qui lui avait sauvé à maintes reprises. Ce sourire qui faisait fondre son cœur à chaque fois qu’il le voyait, depuis le premier jour.
Depuis ce jour, Dellia éprouvait pour Julia un amour profond et inconditionnel. Elle était tout pour lui, et la perdre serait comme perdre une partie de lui-même.
Perdu dans ses états d’âmes, il ne voyait plus le temps passé. L’appel soudain du médecin le fit sortir de cet état.
- Monsieur Carter, je tiens à vous informer que la patiente a repris conscience et vous réclame.
- Moi ? mais alors… ! s’interrompit le jeune homme avant de se précipiter dans la chambre de Julia.
En entrant, il vit Julia assise sur son lit, les yeux rivés sur la fenêtre avec un air serein. Son regard se tourna délicatement vers lui et un sourire se dessina sur ses lèvres fines.
- Dellia ! dit la jeune fille d’une voix douce et affectueuse.
- Julia, mon amour ! s’exclama Dellia avant de se jeter sur elle pour l’embrasser.
Cette fois les deux tourtereaux s’échangèrent un baiser passionné, célébrant leurs retrouvailles. Dellia ne voulant lâcher le corps frêle de Julia, la serra de plus en plus fort dans ses bras, par peur qu’elle ne puisse disparaitre encore. Leurs cœurs battaient à l’unisson, semblant s’accorder au rythme sensuel de leurs retrouvailles. Chaque effleurement de leur peau attisait en eux une passion insoupçonnée.
Chacun était heureux de retrouver l’autre. Pour Dellia, il retrouva enfin l’amour de sa vie. Quant à Julia, elle se réveillait enfin de son cauchemar qui lui a semblé interminable, sans savoir, encore, que ce n’était pas qu’une impression.
Se décidant enfin à la lâcher, Dellia s’assit tout près d’elle. Julia posa délicatement sa tête sur son épaule et glissa sa main dans la sienne. Elle voulait lui poser tant de questions.
Depuis combien de temps était-elle dans le coma ?
Que s’est-il passé ce jour-là ?
Mais elle n’eut pas le courage de lui demander. Elle ne voulait pas gâcher un si beau moment au côté de sa moitié.
Toutefois, la sonnerie du téléphone de Dellia les extirpa de leur bulle. Les deux amoureux n’eurent d’autre choix que d’écourter leur séance romantique. Dellia alla dans le couloir. Laissant Julia seule. Son regard à nouveau perdu à travers la fenêtre vitrée. Quand soudain, un éclair fendit le ciel.
Julia ne put étouffer sa surprise, elle se demanda si elle était la seule à l’avoir vu.
Voilà qui était étrange, il n’y avait pourtant, dans le ciel, pas l’ombre d’un nuage noir, malgré cela cet éclair était bien apparu. Il était bien réel.
Mais à peine eût-elle le temps de se questionner qu’une nouvelle surprise la frappa.
Elle entendit à nouveau cette voix.
Cette voix mystérieuse qui l’appelait dans ses rêves. Cette voix cristalline qui appelait son nom encore et encore.
Un frisson parcourut son échine.
Qui est-ce qui l’appelait ?
Pourquoi avait-elle l’impression de recevoir un appel à l’aide ?
Pourquoi elle ?
Tandis qu’elle se noyait dans ses interrogations, ses lèvres murmurèrent un nom, comme si celui-ci s’était imposé à elle.
- Arcane !
- Qui est Arcane ?
La voix de Dellia, revenu dans la chambre, la fit sursauter.
Julia déstabilisé ne sut quoi répondre à son jeune amant, elle essaya maladroitement de détourner la conversation, mais en elle persistait ce sentiment étrange.
- Euh… ! Personne… ! Au fait qui était ce au téléphone ?
- C’était… tes parents… ! Répondit-il avec une pointe d’hésitation.
- Waouh ! Surprenant qu’ils se souviennent qu’ils ont une fille… ! A moins qu’ils ne t’aient encore appelé pour te demander de l’argent ? lança-t-elle avec une colère glaciale dans le regard.
Mais à peine eut-elle prononcé ces mots qu’un air confus et apeuré s’empara de son visage.
- Je…Je suis vraiment désolée, qu’est-ce que je viens de dire ?
- Ne t’inquiète pas pour ça, dit Dellia d’un air inquiet en caressant délicatement sa joue, mais comment te sent tu ? Tu veux que j’appelle le médecin ?
- Je vais bien… enfin, je crois, j’ai surement besoin d’un peu de repos. Tu devrais rentrer et te reposer toi aussi.
- Mais je veux rester ici avec toi ! répondit Dellia en lui prenant la main, inquiet.
- S’il te plait Dellia… Je vais bien.
Impuissant face au regard attendrissant de Julia, Dellia ne put qu’accepter la requête de sa bien-aimée et préparer son départ.
Avant de partir, il s’empressa d’aller voir le médecin pour lui demander d’attribuer une attention particulière à sa promise et de le prévenir au moindre incident.
Puis, il s’approcha doucement d’elle, ses yeux brillants d’émotion, et lui déposa un tendre baiser d’aurevoir, le cœur serré.
- Je te retrouve demain mon amour !
Il s’en alla ensuite, bien qu’à contre cœur. Julia était désormais seule.
Une étrange sensation l’envahit soudain. Un frisson glacé courut le long de son échine, comme si une présence invisible l’observait. Son cœur se serra.
Puis, un murmure s’éleva. Cristallin, presque hypnotique.
- Maintenant qu’on est enfin seules, prière, chère humaine, d’interrompre cette cacophonie incessante qui trouble mes sens.
Julia sursauta.
Elle était seule dans la pièce. La porte était fermée. Aucun son ne pouvait pénétrer la salle. A qui la jeune fille pouvait elle parler ?
Comme guidé par un instinct irrépressible, elle se leva de son lit, et se dirigea vers la fenêtre.
Bien que le soleil fût haut dans le ciel, la jeune fille pouvait tout de même apercevoir un reflet dans la vitre. Mais quelque chose n’allait pas. Ce qui se trouvait devant ses yeux n’était pas son reflet.
Son souffle se coupa, effrayée.
Devant elle se tenait une femme, vêtu d’une somptueuse robe blanche ornée de broderies dorées. Ses longs cheveux noirs, aussi brillants que la nuit, longeaient le long de son corps, lui conférant une élégance et un charme dévastateur. Ses yeux de jade, profonds et hypnotiques, étaient si envoutants qu’on ne pouvait détourner le regard.
Julia ne pouvait pas en croire ses yeux.
Pourquoi cette femme à la beauté séraphique apparaissait elle à la place de son reflet ?
Prenat enfin son courage à deux mains, elle s’adressa à la femme, la voix tremblante :
- Qui êtes-vous ? Pourquoi es ce que j’ai l’impression de vous connaitre alors que c’est la première fois que je vous vois ? Es ce votre colère que je ressens au fond de moi ? Expliquez-moi, je vous prie !
La femme la fixa longuement avant de répondre d’un ton noble.
- Arcane ! Je suis Arcane, Déesse des ténèbres et de l’obscurité.
Elle marqua une pause, le regard perdu.
- Hélas pour toi, j’ignore la raison de ma présence ici-bas et encore plus pourquoi je suis toujours vivante.
- Une déesse ? Est-ce vraiment réel ? pensa Julia dans son for intérieur.
- Je m’excuse de te faire ressentir autant d’émotions négatifs, malheureusement je ne peux m’empêcher de ressentir ces sentiments.
La déesse se sentit désemparée.
- La situation m’échappe à un extrémum où mes émotions prennent le contrôle de mon être, ajouta-t-elle l’ait troublé.
Julia regarda Arcane avec les yeux emplis de compassion. Bien que son existence fût encore un mystère pour elle, la jeune fille sentait bien que cette supposée déesse souffrait.
- Pourquoi ressentez-vous autant de colère ?
- Bien que je comprenne ta curiosité, les détails de ma vie et de ma mort… ne concernent que moi et tu n’as aucune raison d’en apprendre davantage.
- Mais…
- Je dois y aller !
- Attendez, Arcane !
Arcane disparut soudain laissant sa place au reflet de Julia. La jeune fille n’en croyait pas ses yeux. Cela ressemblait fortement à un rêve, pourtant c’était réel. Un éclair dans un ciel dégagé, une déesse à la place de son reflet.
Julia sentait en elle un très mauvais pressentiment, comme si quelque chose allait radicalement changer sa vie, à jamais.
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