Hier, elle était simplement oubliée, aujourd'hui encensée, mais toujours la même, présente et dévouée.

Ce matin elle est rentrée, son regard vers le sol, ses yeux rougis de fatigue, peut être de pleurs aussi.

  Elle a dépassée de trois heures sa journée de travail, plutôt sa nuit, sa pause oubliée, son repas, est resté dans la salle de repos.
Les deux patients, les numéros... ceux qui espéraient, ceux qui lui parlaient plus que par gestes ou par écrits, ceux qui étaient devenus des amis.

  Cette nuit ils semblaient dormir, ils semblaient apaisés, reposés, pourtant le bip incessant de la machine lui révélait un autre état, un autre drame.

Ils l'on laissée, ils sont partis, sans avoir le temps de noter un dernier mot, le papier pourtant, ils le tenaient!
Alors elle se dit pourquoi?es-ce son échec, elle culpabilise, elle le prends sur elle, en elle. Non madame, une voix de la haut, la fait sortir de son état, c'est le collectif le responsable, nous avons tout essayé, nous sommes impuissant.

  Cette voix , celle de l'élite, du guide, celui qui parlait peu, il était là, il avait pris son service très tôt, il se doutait, il l'a rassurée, réconfortée, remotivée.

Elle devra oublier, effacer ses visages, ses numéros, leurs mots, leurs écrits. Une heure a passé, les corps emportés, deux femmes de ménage, les produits désinfectants, tout est clean, une porte qui s'ouvre.

  Un premier lit, un nouveau visage, vite tout rebrancher, un nouveau numéro, une autre histoire, un autre espoir !
La porte à peine refermée, un autre numéro, la pièce est de nouveau complète, tout repart, tout est espoir, la vie si fragile, la guérison peut être !
Le déclic de sa cafetière, l'a fait sursauter, elle reconnaît son chez soit, elle sort de son demi sommeil, elle regarde autour d'elle, encore trop seule.

   Elle aurait aimé une épaule, une voix douce, un langage d'amour. Mais seule elle devra prendre sa douche, s'écrouler sur son lit, dormir.
Trop seule !
Claude Moulin,