Tic tac tic tac, faisait la troteuse. Est-ce bien judicieux d'utiliser le passé, dans ce monde éternel ? Le présent et le futur ne m'appartiennent plus, ou devrais-je dire, ils n'ont jamais été miens. Moi qui ai pêché pour me retrouver divine, je suis vouée à l'emprisonnement consécutif de mes fictions. Cette page est la troisième que j'écris.

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  Autrefois, on m'appelait Frandolen. J'étais humaine, sans désir et sans rancune. Je vivais simplement, et cela me suffisait. Écrivant sans cesse des histoires, j'alimentais mon imaginaire avec les personnes autour de moi. Ma famille, mes amis, des inconnus, tous possèdent une place de choix dans mes fictions. Ce quotidien insouciant était habituel à mes yeux, jamais je n'aurais songé à sa disparition.

 Le monde dans lequel je vivais était peuplé d'humains, espèce gouvernée par une autre : les Sources. Contrairement aux Hommes, ces créatures avaient tout : immortalité, puissance, et étaient d'une importance fondamentale. Elles représentaient la vie et pouvaient la commander à leur guise. Dans le passé, si ce temps existe, nous les considérions comme des déesses. J'étais loin de me douter, qu'un jour, je serais mêlée à l'une d'entre elles.

 Ma planète fut sur le point d'être détruire, la menace était l'une de mes connaissances. Et c'est au bord de la destruction, qu'une Source vint me demander de l'aide. Aujourd'hui encore, si cet instant mérite d'être cité, je ne cache pas ma surprise. Je ne comprenais pas, pourquoi moi ? J'étais l'humaine, l'inutile, le parfait personnage secondaire. Aux yeux de cette divinité, je ne valais pas moins qu'une décoration, si ce n'est un cafard.

 Son souhait était le suivant : je devais occuper la personne prête à détruire le monde, pendant que les Sources l'emprisonneraient. Pour être honnête, je regrette de ne pas avoir flairé le plan douteux. Je me revois encore, dans des rêves sans sommeil, en train de changer mes paroles à cet instant. Toujours est-il que j'ai accepté sa demande. Je ne voulais pas éveiller sa colère, désireuse de sauver ma planète.

 Armée de mes plus belles histoires, je m'avançais vers le cœur de l'Univers, lieu où se trouvait ma cible. Et c'est à ce moment précis, que j'ai compris la vérité. La raison de ma venue était toute simple : on souhaitait se débarrasser de moi. Apparemment, j'avais développé une immunité face au pouvoir des Sources, chose qui semblait les contrarier. Dès l'instant où j'eu commencé ma mission, le sceau se refermait sur nous.

 J'étais prise de cours, à cet instant, je ne voulais pas d'un tel futur. Je connaissais mes limites, une humaine normale en serait morte. Pendant ce maigre moment, j'ai pensé. J'ai réfléchi au moyen de répondre à cette manipulation. Cette vengeance, je l'avais trouvé. Sournoisement, j'ai attiré la Source dans le cœur de l'Univers, zone où ses pouvoirs s'affaiblissent. Je me rappelais de son nom : la Sénescence, seule divinité du temps sur toutes choses vivantes. Et surtout, je connaissais des faits à son sujet.

 J'ai profité de ce savoir pour l'immobiliser, avant de l'attaquer discrètement. Dans cette zone, où elle n'avait plus de force, je l'ai déchiré morceau par morceau. Encore. Toujours. Sans même prendre de pause, je l'ai dévoré !

 Ah, que c'était bon ! Je me sentais satisfaite, vengée, puissante ! Moi, l'incapable, la discrète, le personnage secondaire, je m'étais transformée en antagoniste. Le désespoir coulait dans mes veines, je n'écoutais plus la voie de la raison. Et c'est à cet instant, où j'ai entamé la dernière bouchée, que son pouvoir se déversait en ma personne. Cette Source étant décédée, sa place me fut remise. Cette force, dont j'ignorais toute la maîtrise, me fut remise.

 Quelle erreur ! Quelle abrutie ! Comment ai-je pu omettre ce détail ?! Je ne pensais qu'à ma vengeance, je savais, au plus profond de moi, que la fin m'attendait. J'étais loin d'imaginer le véritable futur que me réservait le destin. Au fond, la mort n'est rien face à l'éternité, c'est même un soulagement. Si seulement je m'étais arrêtée, si seulement je m'étais résignée, j'aurais pu... être libre.

RETOUR

Qu'est-ce que je raconte ? Je perds la boule, je devrais m'estimer heureuse ! J'ai détruit cette horrible déesse, je me suis vengée et j'ai acquis le pouvoir divin ! J'adorais sa chair, son désespoir, le mien ! Tout était si beau, si excitant que je pourrais en jouir éternellement !

RETOUR

Non, ce n'est pas ce que je souhaite ! Je ne veux pas me perdre. À ce rythme, je ne serais plus capable de me retrouver. Ce pouvoir m'échappe, je n'ai aucune idée de comment m'en servir. Mes souvenirs s'estompent, le peu de raison que je posséde s'évapore. Que me reste-t-il aujourd'hui ? Je dois me rappeler, si je suis enfermée ici, c'est parce que je l'ai choisi ! Si je reste éternellement dans cette cage, c'est pour sauver le monde !

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