Facebook, fais ton boulot

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Je me retourne, prise en faute, et adresse à l’infirmière, entrée sournoisement, le plus innocent des regards de mon répertoire.


"Oh rien…c’est un jeu qu’on fait…faisait, tous les deux."


Et à ça j’ajoute le coup de grâce : je baisse les yeux en laissant mon sourire se faner sur mes lèvres. L’incarnation de la nostalgie et de la douleur pudique. Elle pose une main compatissante sur mon épaule. En pensée, une foule se lève pour applaudir ma prestation et je salue bien bas mon public.


"Je suis désolée, me dit-elle. Vous pourriez essayer de lui parler. Certains se souviennent, au réveil."


Je dévisage mon fiancé pendant qu’elle quitte respectueusement la pièce. Yoann m’entendrait-il ? J’hésite un moment et puis…après tout, même s’il m’entendait, que pourrais-je lui dire ? Je me détourne, regarde le portefeuille noir. Un sourire espiègle m’échappe et je récupère la photo. Puis je me retourne brusquement et la lui présente à quelques centimètres de son visage.


"C'EST QUI CETTE PUTE ?! Vas y ! Dis moi ! Dis moi qu’tu l’as baisée !"


Avant de m’effondrer de rire sur la couverture. Une fois mon fou-rire passé, je constate que mon promis n’a pas levé un sourcil. Soupir. Le ciel se couvre, derrière la fenêtre. Je m’ennuie. Je regarde de nouveau la petite grosse allumeuse sur la photo. Et si j’essayais de la prévenir ? Un de mes potes avait perdu son chien et, en mettant une photo de lui sur les réseaux sociaux, il a réussi à le retrouver. Que je suis maligne, parfois ! Je m’allonge tout de go à côté de Yoann, dégaine de ma poche mon iPhone et sourie en levant le pouce avant de faire un selfi. Je suis parfaite. Un petit filtre pour donner un peu de couleur à Leblanc…et hop ! Facebook fais ton boulot. Je prends en photo celle du photomaton et l’ajoute au post.


"Faites tourner ! Je cherche quelqu’un qui connaisse Yoann Leblanc ou cette fille. Un mojito à celui qui trouvera !"


Avec le sentiment du devoir accompli, je me lève et m’étire. Faire des BA, c’est toujours valorisant. Bon, c’est pas tout, mais j’ai une vie, moi. Faut que j’aille m’épiler ; demain c’est piscine.

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