Sur les montagnes sacrées - I

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Des cris bestiaux et de rage résonnaient sur ce flanc de la montagne, mêlés aux sons des métaux qui s’entrechoquent et des explosions.

Des hommes armés, derrière des remparts de fortune, menaient une bataille féroce et sanglante contre des créatures humanoïdes pourvues de cornes et d’oreilles pointues. Chaque camp faisait preuve d’une violence indescriptible pour mettre à bas l’ennemi : les sorts fusaient dans tous les sens, les lames tranchaient la chair, les masses brisaient les os, les marteaux de guerre réduisaient les crânes en bouillie… Une véritable rivière de sang était en train d’abreuver les montagnes de Mjöllnir, tandis que les cadavres s’empilaient. Les hommes de la montagne, dans leurs armures rustiques, n’hésitaient pas à provoquer l’ennemi ; à l’inviter à venir les frapper tout, confiant dans leur force. Les créatures, elles, répondirent volontiers à ces provocations arrogantes, exaltées par le combat et réduisant en charpies ceux qui avaient osé provoquer des êtres capables de déchirer un corps à mains nues.

La bataille commençait à tourner à l’avantage des créatures, plus organisées, plus résistantes et plus fortes. Les hommes de la montagne, malgré leur hargne, se voyaient obligé de reculer et de s’abriter derrière leurs remparts en bois, qui risquaient de tomber à tout moment face aux sortilèges de ces créatures à cornes. Une partie prit feu, une autre prise dans la glace…

De leur côté, et malgré les pertes, les créatures avançaient assurément. Certaines chantaient même, avec une certaine assurance, leur victoire écrasante.

Ce fut alors qu’on entendit un son résonner au loin. Un son lointain, qui se rapprochait de plus en plus. Le son d’un cor.

En l’entendant, les hommes de la montagne hurlèrent leur joie et brandirent leurs armes au ciel. Le son du cor se rapprocha et une horde de pégases, chevauchés par des femmes en armure, envahit le ciel et fondit sur les créatures. Ces dernières, confuses par cette arrivée de renforts soudaine, tentèrent en vain de repousser les nouveaux assaillants. Certaines de ces femmes descendirent ou sautèrent de leur monture et joignirent le combat aux côtés des hommes, qui avaient retrouvé leur vigueur en leur présence, pour combattre à terre.

Ces femmes étaient bien plus fortes et plus efficaces au combat que les hommes : avec leurs armures plus légères, elles bougeaient plus facilement et plus rapidement, pouvant enchaîner les adversaires avec aisance. Elles étaient mieux organisées entre elles, se protégeant mutuellement, ainsi que les hommes, tout en se montrant sans pitié face à l’ennemi. Leur maniement des armes était quasiment sans faille : il n’était pas rare que deux guerrières, en plein combat, échangent leurs armes d’une part pour déstabiliser l’ennemi mais aussi pour s’adapter. Tout pour mettre la situation à leur avantage.

Alors que l’issue de la bataille semblait claire, l’une de ces créatures, un colosse de plus de deux mètres de haut, fit voltiger ses ennemis à grands coups de poings pour se frayer un chemin vers le cœur de la bataille. Sa musculature imposante et ses cornes intimidantes avaient de quoi faire trembler le plus brave des guerriers.

-Amenez-vous ! Venez tâter de mes poings ! hurla-t-il d’une voix rauque et puissante. Tachunka ne vous craint pas ! Tachunka est le plus fort ! Tachunka mènera les siens à la victoire !

Il n’hésita pas à foncer dans le tas tel un taureau pour renverser tout ce qui se trouvait sur son passage. Bon nombre d’hommes de la montagne tombèrent sous ses coups et même les guerrières ne purent arrêter ses charges, même celles qui le criblaient de flèches tout en chevauchant leurs pégases. Il s’amusait. Ces flèches semblaient n’être que des piqûres d’insectes pour lui, un homme avec son arme le faisait plus rire qu’autre chose, l’agilité d’une des guerrières semblait n’être que des acrobaties pour brasser de l’air lorsqu’elle rencontrait et tombait sous ses poings démesurés. À chaque ennemi vaincu, il hurlait sa victoire à la montagne, clamant à cette dernière qu’elle serait bientôt sienne.

Un nouveau son de cor se mit alors à résonna. Un son très proche…

Un autre groupe de guerrières à dos de pégases arriva mais parmi elles, il y avait trois femmes qui se distinguaient des autres.

Elles ne volaient pas à dos de ces chevaux ailés. Elles avaient leurs propres ailes, d’un blanc immaculé, et arboraient une chevelure d’argent visible à des lieux à la ronde.

Tandis que les nouvelles guerrières à pégase restaient dans les airs pour frapper l’ennemi avec leurs volées de flèches, les trois guerrières ailées atterrirent, leurs ailes disparaissant dès qu’elles posèrent pieds au sol, et se joignirent à la bataille.

La première, à la chevelure courte et carrée, armée d’une lance, repoussait les créatures, avec grâce, loin d’elle et de ses alliés, ne manquant pas d’empaler un adversaire à la moindre ouverture.

La seconde, la tête rasée d’un côté et armée d’un grand marteau de guerre, pulvérisait tous ceux qui se dressaient devant elle dans un rire aliéné, sans se soucier de savoir qui était de son côté ou non.

La troisième, à la longue chevelure descendant jusqu’à ses reins et portant une jupe s’arrêtant au-dessus des genoux, faisait face à cette créature colossale, un glaive à la ceinture et un bouclier à la main.

Tachunka éclata de rire en la voyant.

-HAHAHAHA ! Tu penses pouvoir faire quelque chose face à moi, femme ? Tes petites amies n’ont rien pu faire, alors je ne pense pas que tu puisses faire mieux contre Tachunka !

-C’est drôle, lui dit-elle avec un rictus. Je pensais que les Majins ne savaient pas « penser ».

Ne tolérant pas cet affront, Tachunka ordonna aux siens de se jeter sur elle. La guerrière combattit en ne se servant que de son bouclier, de ses poings et de ses pieds. Chacun de ses puissants coups brisaient et fracassaient les os. Elle esquivait ceux de l’ennemi avec une grande aisance. Par moment, elle leur lançait son bouclier pour les frapper avant qu’il ne lui revienne dans les mains. Voyant que personne n’était capable de tenir face à ce qu’il prenait pour une simple femme, Tachunka se décida à prendre les choses en mains et vint à son tour la défier. Sans cérémonie, il tenta de lui écraser l’un de ses gigantesques poings dessus, mais elle l’arrêta avec son bouclier, non sans la forcer à reculer de quelques pas à cause du choc.

On aurait pu penser à un combat des plus épiques entre ces deux forces de la nature, mais il paraissait clair que Tachunka était le seul à vraiment se dépenser.

Pendant qu’il tentait de l’écraser de ses poings sans la toucher et que ses charges finissaient dans le vent, la guerrière se contentait d’esquiver ou de bloquer, ne frappant que rarement et le plus souvent avec son bouclier. Tachunka s’épuisait rapidement, aveuglé par sa rage et de son envie d’en finir précipitamment. Presque à bout de force, il chargea une dernière fois vers son adversaire, qui lui lança son bouclier pour arrêter net sa course. Puis, alors que le celui-ci revenait dans les mains de sa propriétaire et que le Majin titubait, elle bondit sur lui, en dégainant son glaive, et le lui planta dans l’épaule. Tachunka hurla et se débattit, tentant de l’attraper mais elle retira rapidement sa lame, pour se laisser tomber sur le sol, et lui ouvrir le ventre d’un coup horizontal. Malheureusement pas assez profonde pour que le coup soit fatal. Tachunka hurla de plus belle, la main sur sa blessure au ventre pour empêcher ses entrailles de se répandre sur le sol.

Les deux adversaires se regardèrent et il apparaissait clair que si le combat se poursuivait, le vainqueur serait tout désigné. Tachunka, avec ce qui lui restait de force, ordonna la retraite, mais la guerrière aux cheveux d’argent ne semblait pas disposée à le laisser s’échapper. Elle fondit sur lui mais plusieurs Majins firent barrage, pour laisser le temps à leur chef de fuir. Les Majins battirent donc en retraite, beaucoup se faisant quand même massacrer durant leur fuite. Les hommes de la montagne hurlèrent leur joie pour célébrer la victoire, alors que les guerrières acclamaient celles aux cheveux d’argent.

Les hommes de la montagne commençaient à rassembler les corps de leurs compagnons tombés au combat. Les funérailles allaient être nombreuses, ce soir…

Leur chef, un homme chauve et barbu, vint à la rencontre de celle qui commandait aux guerrières, celle à la longue chevelure argentée.

-Je vous salue, ô protectrice des montagnes ! dit-il d’une voix forte. Moi, Torjnar, chef du clan Dormmund, suis honoré d’avoir pu combattre à vos côtés. Et je vous remercie également d’être venue à notre aide. Sans vous, nous serions probablement tombés.

-Inutile de nous remercier, dit-elle. Ces montagnes sont notre territoire et il est normal pour nous et nos valkyries de la défendre.

-Dans tous les cas, nous vous sommes redevables. Nous n’oublierons pas les offrandes pour vous remercier de nous avoir accordé la victoire contre ces créatures. Je n’avais jamais rien vu de tel et les dieux m’en sont témoins, j’ai vu bien des choses dans ma vie. Des éclaireurs m’avaient averti que d’étranges créatures rodaient dans les environs mais ça… Qu’est-ce donc ?

-Des Majins. Des créatures errantes en quête de territoires. Ils ont déjà attaqué bon nombre de villages disséminés un peu partout dans les montagnes.

-En tout cas, force est de reconnaître que ces monstres ont la guerre dans le sang… Et si en plus, ils peuvent utiliser la magie…

-Ils ne sont pas invincible, coupa-t-elle avec un certain agacement en voyant Torjnar afficher de la crainte. Vous avez prouvé que même les humains peuvent leur faire regretter d’avoir foulé ces lieux. Il est hors de question que ces bêtes s’approprient ces montagnes.

Quand les autres valkyries eurent terminé de récupérer les corps de leurs sœurs d’armes, elles s’envolèrent sur leurs pégases, tandis que celles aux cheveux d’argent firent apparaître leurs ailes avant de prendre leur envol. Torjnar regardait leurs sauveuses voler, accompagnés par le son du cor résonnant le plus loin possible, heureux d’avoir pu approcher pour la seule fois de sa vie ces êtres dont la force méritait tout le respect possible.

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