L’instinct des rennes
J’ai cogité pendant tout le reste du chemin jusqu’à la colline. Était-il possible que les rennes soient responsables de l’état de papa et de la zombification des autres lutins ? Ou peut-être souhaitaient-ils simplement que j’ignore qu’ils connaissaient déjà Sanelma ? Après tout, ils avaient l’air d’effectuer le trajet comme si celui-ci était habituel… Non, impossible, ai-je pensé, sinon ils n’auraient pas eu peur des voitures. Toutefois, s’ils y allaient par les airs, mon hypothèse était toujours plausible.
En tout cas, j’étais content d’être arrivé si vite. J’apercevais déjà la chaumière de Sanelma tout en haut de la pente enneigée. J’ai levé les yeux et j’ai lancé joyeusement « allez, on monte. » pour les encourager.
À ce moment-là, Rudolphe s’est stoppé net et s’est mis à bramer. Son cri était si fort que j’ai dû me boucher les oreilles. Qu’est-ce qu’il lui prenait ? Il ne pouvait quand même pas être encore en rut ! Se croyait-il en automne ?
Juste après son brouhaha, il a voulu faire demi-tour et a incité les autres à le suivre. Je me suis dit qu’il avait perdu la tête et j’ai ordonné à Tonnerre de monter la côte.
Il a hésité quelques secondes puis s’est résigné à m’obéir. Les autres rennes ne l’ont pas suivi et sont partis avec Rudolphe. Je me suis demandé pourquoi ils abandonnaient si près du but. Avaient-ils peur de Sanelma ?
Les sabots de Tonnerre s’enfonçaient profondément dans la neige. J’entendais même la roche racler sous ses pas. À mesure qu’il montait, je sentais son inquiétude augmenter. C’était comme s’il s’approchait d’un danger invisible. Voyant la maisonnette relativement proche, je me suis dit qu’il craignait Sanelma comme les autres. J’aurais dû réfléchir et écouter son instinct (et surtout Rudolphe). Ça m’aurait évité d’être pris au milieu d’une avalanche.
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