Nous jouons une partie sans fin. Il dévoile ses cartes, ses mains, son sourire, c'est du narcissisme quand il s'agit de notre histoire. C'est notre guerre sensuelle, une bataille feutrée. On étale nos as, les rouges, les noirs, dans tout les sens et à chaque coin de lèvres, les idées fusent. Mais il y a bien plus à abattre qu'un jeu de carte : il y a nos corps.

C'est un jeu de mains cachées, de regards furtifs. Le jour viendra où je lui viderai les poches. Les atouts, je les veux pour moi. On est désarmé seulement quand le coeur n'y est plus, quand le sang bleuit sous l'excès de narcissisme. Notre histoire est un prétexte prétentieux, une partie truquée où chacun joue pour sa part, cherche à faire plier l'autre, par amour du jeu. Et de la victoire.

Un jour, je lui raconterai comme il est difficile de faire face à une main d'as quand on a un coeur si léger. Ce qu'il y a à aimer par ici, c'est la maladresse des dames de pique. C'est un jeu de silence en échos. Les cartes ne sont qu'une métaphore de nos désirs. On s'éloigne de la main qui fâche, je me protège de son orgueil en le laissant entrevoir mes failles. Mais je ne me fie pas à son jeu, il n'est pas dupe.

Notre déraison, notre narcissique guerre, nous encercle prisonniers des cartes qui ne sont pas celles que l'on voulait abaisser. Le jeu n'est pas d'insultes, ni de mots. Le jeu est d'amour. Ni l'un ni l'autre ne sait encore comment notre égotisme aura notre peau. Nos souffles. Nos cris. Nos corps mis à prix. Une caresse aux enchères. Sur la table, nos coeurs. Les dés sont jetés sur des draps déjà froissés. La partie se joue en secret, le plaisir est un enjeu de taille. Ma taille sous ses mains. Mes cartes dépliés. Les rois et les reines ne seront pas oubliés. La victoire en sera plus belle.

Par amour, au temps mauvais, au vent mauvais, je resterais debout à attendre la fin de cette guerre, comme on attend les bras de l'amour. Un jour, je lui dirai tout. Un jour, je le gagnerai.