Voyage au bord de l'impossible

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Il y a quelque chose de triste dans ma manière d'attendre que la nuit se fenêtre sur le jour. Je n'entends qu'une seule phrase dans la soirée pour que mes rêves, tels des aiguilles de cristal, ne viennent se briser tout contre mes phalanges, me faisant taire et pleurer en silence. Je suis sentimentale et malheureuse, oui mais, la nuit fait ses miracles, crée ses bandits, se dévergonde, se crucifie. Je ne retiens d'elle que le vide et le désir de fumer ma propre cigarette. La nuit porte conseil, dit-on, mais elle me donne des attentions que je n'attendais pas. Souvent, la vie est implacable et les enfants tragiques.


Je suis désolée. Ou non, je ne suis faite que de désolation et je porte en moi, le désir de partir où les vrais jours ne se lèvent qu'avec modestie pour venir caresser les jours de la nuit. C'est si triste de vouloir changer sa vie pour des images sans importance. Tout est métaphorique dans ma tête à n'en plus pouvoir discerner la réalité des actions. L'inconséquence est le vide épousant un corps sans âme à demi découvert, mais si triste. Je ne veux plus que ça fasse mal au moindre prétexte. Je veux seulement respirer le temps qui passe comme on imagine un violoncelle jouant des airs marins. Je veux aussi qu'on me réveille de ce rêve trop long. Je ne veux plus me soucier de sentiment, puisque tout me manque. Et c'est si grave. Je suis malade du monde.


Et puis, il y a des jours où je commence une phrase sans avoir le courage d'aller plus loin. Lorsque je ferme mes yeux, je réveille des soleils au milieu des étoiles, je fais naître des rêves au coeur de l'obscurité. Depuis quelques temps, mon imagination déborde sur la réalité, mais j'attends que les mots se précipitent sous ma plume par la fenêtre de mes pensées. Je dors sur mon écriture et je relie à la lumière de mes nuits toutes les pages que je n'ai pas encore écrites. Je frôle par mon esprit la faiblesse des jours passées, l'achèvement des maux de coeur et les lourdes langueurs d'un corps aux aguets.


Avant ma solitude m'allait si bien, tout était bohéme, indéfini et insignifiant. Avant tout était blanc ou noir ou plat. Maintenant, je ne vibre plus que par les souvenirs et les larmes des verres vides noyées par des lèvres rougies ou grisées. Maintenant, j'ai besoin de relief, de nuances, de montagnes à gravir, de lunes à décrocher.


Je veux de l'impossible et de l'impensable. Je veux m'enfuir là où le monde me mène. Je veux me jeter à la mer dans le creux des vagues, perdre le nord. Je veux du vertige, du danger. Je veux du brillant dans les yeux. Je veux des lettres d'or et des trésors dérobées. Je veux faire de sang-froid ce que les autres n'osent pas. Je veux tenter le diable, me battre dans le vide. Je veux perdre le fil des jours et le calme des nuits. Je veux oublier. Je veux refroidir le coeur qui brûle en moi.  Je veux du pluriel.

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