Délicatement du bout des doigts, je pousse mon réveil, qui me rappelle sans cesse qu’il est l’heure de se bouger.

– Debout mon ange.

Ces quelques mots me sortent de ma douce torpeur, j’ouvre un œil et puis l’autre, je ne suis pas seule ? Impossible, je suis rentrée tard et je me suis couchée aussitôt, exténuée.

Je me redresse plus par curiosité que par peur. Finalement mon rêve est devenu réalité, il est là, le beau gosse qui me fait fantasmer.

Quelle déception ! Rien autour de moi ne suggère une nuit d’amour torride. Cette voix, d’où vient-elle ? Et une fois de plus la fenêtre est grande ouverte. Impossible, je me souviens de l’avoir fermée et j’habite au dernier étage.

Un indice, aucun vêtement sur moi. Ma nuisette jonche le sol et ma culotte en soie et dentelle vibre au son de ce réveil qui me casse les oreilles.

Est-ce que je deviens dingue ? Mes fantasmes prendraient-ils le pas sur moi ? Les moindres parcelles de mon corps me font penser tout le contraire.

Là, plus le temps de me prendre la tête, Anna doit m’attendre, nous avons rendez-vous pour bruncher. Une fois de plus, elle me racontera sa dernière conquête, la petite brunette avec de grands yeux bleus. Je l’écouterai parler sans me lasser, leurs jeux à deux, et qui sait peut-être que je lui confierai mes aventures de ces deux dernières nuits.

Anna avait des seins joliment dessinés

Nul doute qu'ils avaient fait des envieuses.

Nichés bien au chaud dans son décolleté,

Attendant qu’une main vienne les déloger.

Elle est là, assise sur le sofa, jouant du bout de ses lèvres avec sa paille sous le regard intimidé d’un jeune homme qui épie, caché derrière son journal. Elle a tout pour séduire la gent masculine, pourtant elle s’en tape. Elle prend un malin plaisir à en jouer, juste pour voir leur désir s’évanouir au son du « non » qu’elle claque, une étincelle dans les yeux.

– Allez mon ange, viens par-là, me lance-t-elle avec une voix pleine de tendresse.

Comment m’a-t-elle appelée ? C’est la première fois, d’habitude elle m’accueille juste avec un allez, viens poser ton joli cul par-là, que tout le monde puisse en profiter. Cela ne me gêne plus, et je trouve même ce compliment agréable. Après tout, ces fesses me permettent de gagner ma vie, le soir, dans ce cabaret minable où je les expose.

Nous commençons une discussion endiablée, sur ce que la journée pourrait nous réserver. Je voudrais partager avec elle un peu de mes rêveries de la nuit, mais l’heure qui avance me rappelle que je dois me presser, la salle de sport m’attend pour mon entraînement quotidien.

Son « Allez mon ange », reste dans un coin de ma tête. Elle est mon amie, celle sur qui je peux compter, mais ces quelques mots lancés là, résonnent en moi. Ai-je fini par accepter ses avances ? Impossible, elle vient de me donner tous les détails de sa nuit torride avec Esméralda. Mais qui est cette Esméralda ? Elle ne me l’a jamais présentée.

Une fois dans la salle de sport, je m’amuse à faire des entrechats, des arabesques, enivrée par ces quelques mots.

Maintes fois, tes mains se sont glissées

Outrageusement sur mes seins qui t’attendaient.

Nus devant toi, ils t’appelaient.

Alors désespérément, tu n’as pas pu leur résister.

Naturellement ta langue s’est posée

Goulument sur mes mamelons fièrement dressés.

Et là, tout s’est accéléré.