Pour la maison
Ma douce,
Comme il me tarde de rentrer à la maison, de te serrer dans mes bras et retrouver la sérénité de la campagne. Ils me manquent, tes yeux, le chant des criquets, le calme et les rires. Elles me manquents, tes lèvres, la chaleur du foyer et les hautes herbes. Dans ma tranchée le bruit est incessant, le paysage n'est que boue et mort, personne n'esquisse l'ombre d'un sourire. Je nous sens sombrer dans la folie. Tu es ce qui m'empêche de sombrer. Je nous sens devenir des monstres. Dans quel état vas-tu me retrouver, mon amour ? J'ai peur de t'effrayer à mon retour.
Hier, mon ami Émile est mort. Il s'est pris un obus et seuls des lambeaux de chairs restaient de lui. J'ai peur de finir comme ça un jour, de partir sans avoir vu de femmes, d'enfants et de parents une dernière fois. Sans avoir vu de vie. Sans avoir vu du bonheur dans les yeux de quelqu'un. D'emmener avec moi une image de détresse.
Je reviendrai, ma douce. Je reviendrai et nous vivrons heureux. Nous aurons des enfants et nous les regarderons grandir. Je t'aime, Jeanne. Prends soin de toi, de tes parents et des miens.
Alfred
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