8.5

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 Partout autour de la troupe, la douceur de l’aube s’était étendue sur les plaines. Bhagttat, d’un simple signe de la main, ordonna qu’on cherche un endroit où camper jusqu’au soir. À mesure qu’on approchait de Jarapour, les forêts se faisaient de plus en plus rares, remplacées par des terres à la fertilité insolente, entièrement recouvertes de rizières.

 Les villages, également, s’étaient faits plus nombreux ; ainsi, la troupe avait dû effectuer quelques détours pour les éviter. Bien qu’encore peu présent, le Shâdhâvar* Rébéen, brodé sur des étendards, était parfois visible sur les plus hautes bâtisses de bourgs et ornait quelques carrefours sur la voie ducale.

 On parvint à trouver, entre trois rizières, un lopin de terre préservé de toute activité humaine. Garajja et Draîgankee installèrent les tentes et le matériel de cuisine et aidèrent Pratha à rouler Tindashek dans la chaleur d’une couette.

“Il ne devrait pas se réveiller avant cette nuit, déclara le Prince. Quand nous arriverons à Jarapour, j’aimerais que tu le fasses travailler sur la maîtrise de sa psyché, parce que... comment te dire : je ne crois pas que nos hôtes apprécieront le fait de braquer toute l’attention des occupants sur eux.

  • Je comprends, soupira Pratha. Je vais faire ce que je peux.
  • Dites, Garajja, demanda Vartajj, je me demandais si dans l’histoire anacressoise, Photophoros est considéré comme le premier à avoir dégagé la Voie du Nord ?
  • De quoi tu parles ? questionna Modshi.
  • Jusqu’à il y a deux siècles, les Anacressois avaient pris l’habitude de livrer de grosses quantités de poudre et de faire exploser le mur de glace pour se rendre dans la terre verte, expliqua la jeune femme. De l’autre côté, le Refroidissement est moins marqué.
  • Vous me posez une colle, songea Garajja. J’ai appris cette histoire lorsque je travaillais pour Anacresse XIV, mais son conteur n’a jamais précisé ce fait.
  • Cela va probablement de soi pour eux, nota Bhagttat.
  • En effet. Ce que je peux dire, néanmoins, c’est qu’on arrive bientôt à sa fin ! Je pense que je l’achèverai peu avant que nous arrivions à destination.”

 La suite de la matinée se divisa entre la dégustation d’une bouillie rudimentaire quoique savamment épicée par Draîgankee, une discussion sur la crédibilité de l’histoire de Photophoros, et puis chacun rejoignit le Comté des Songes.

 À aucun moment, le chêne des pendus ne fut mentionné, bien qu’il occupât, en vérité, une grande partie des pensées de Pratha, Modshi, Vartajj et Tindashek. Les deux généraux et le Prince, quant à eux, avaient été habitués à leur lot d’horreurs, et, bien que ce souvenir ne leur laissât pas un goût agréable, leurs esprits étaient entraînés pour l’accepter.

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Note de l’éditeur : Le Shâdhâvar, créature mythologique Rébéenne, présente sur l’ancien étendard (changé à la suite de la Restauration La-Hukuma-Dawom. Pour plus de renseignements sur la période, consulter l’Encyclopédie du Monde Rébéen des Seigneurs Guerriers jusqu’à nos Jours, 1421ES, disponible dans notre catalogue), était une sorte de licorne carnivore. Les auteurs Rébéens la décrivent comme gracieuse, très mince, des taches sombrent dégoulinant de ses yeux, dont la forme évoque des larmes. Lorsque le vent souffle dans sa corne creuse, on dit qu’elle émet le son d’une flûte. Selon la direction du vent, la musique est soit très joyeuse et remplit celui qui l’entend de bonheur, soit très mélancolique, au point de le faire pleurer.

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