12. Le sens du vide

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Quelques jours après, quelque chose d’inattendue se produisit. Ce matin-là, il se leva avec une impression de légèreté nouvelle, comme si un changement profond s’était opéré en lui. Ce n’était pas exactement de la tranquillité, mais une sorte d’acceptation douce et fluide de sa nouvelle réalité. Ce qui était auparavant une source d’angoisse devint, d’abord imperceptiblement, un espace de quiétude intérieure. Il s’aperçut alors qu’il n’avait pas cherché à prononcer les mots de sa routine habituelle.

Le vide qu’il ressentait ne le lui pesait plus, il l’accueillait. Il s’était débarrassé de son trouble sans effort brutal, un simple lâcher-prise dû à la fatigue de lutter suffit.

En se regardant dans le miroir de la salle de bain, il fut surpris par son propre reflet. Il avait l’air plus vieux, plus fatigué, mais une fatigue différente de celle des journées de travail épuisantes. C’était une fatigue intérieure, qui semblait être là depuis toujours. Ses traits étaient plus marqués, son visage plus grave. Ses cheveux, autrefois noirs et pleins de jeunesse, portaient maintenant des reflets gris qu’il n’avait jamais remarqués. Cela ne le dérangeait pas. En fait, cela ne l’affectait pas le moins du monde. Il ne ressentait ni tristesse ni mélancolie. Au contraire, une étrange légèreté s’empara de lui. Le changement dans son apparence, ce vieillissement soudain, lui semblait une libération, un délaissement d’une tension qu’il portait depuis trop longtemps. Il se sentait vidé, mais d’une manière douce, relaxante.

Cette absence tant redoutée ne se révélait plus menaçante, elle devenait une forme de liberté. Il ne ressentait plus l’angoisse des obligations impératifs à prononcer, des attentes sociales. Il n’avait plus l’obligation de dire « bonjour » pour se sentir validé, ni de parler du travail pour donner un sens à sa journée. Remplir l’espace avec des mots qui lui échappaient était superflu. Cela lui permettait de respirer profondément, d’exister sans la pression du langage, sans les chaînes du quotidien.

Le monde autour de lui semblait plus vaste, plus ouvert. Il observait les détails qu’il n’avait jamais remarqués auparavant : le grain du bois sur la table, le reflet du soleil sur les rideaux, le bruit de la rue à travers la fenêtre. Tout avait une intensité nouvelle. Il se laissait simplement être. Un poids s’était effondré et il ne ressentait plus de peur. Il était comme un homme qui renaît, qui se sent étrangement complet, tout en étant vide. Une acceptation sereine de ce qui est.

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