Ressac

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Pour commencer, Paul observa le suspect, ses pensées en roue libre. Des déviances, il en connaissait une large gamme, pour avoir fréquenté, par son travail ou ses affaires personnelles, nombre d'individus dits « atypiques ». Paraphiles pour le médical. Certains s'en revendiquaient, d'autres en souffraient ; d'autres, enfin, faisaient leur possible pour en garder le secret et tout son poids, parfois à eux-mêmes. Ceux-là étaient les plus dangereux, pour eux, voire pour leurs proches.

Le cœur lourd, il consentit à casser ce silence si éloquent par un murmure : « Je vois… » La photographie remisée dans son enveloppe, le brigadier orienta la conversation sur un nouveau sujet, une autre découverte dont il avait cette fois bon espoir de retirer plus qu'un simple mutisme.

— Comme tu as dû le déduire, la brigade et la scientifique ont passé ta maison au peigne fin. Je peux te dire qu'on a eu de quoi faire ; les gars sont toujours là-bas, ça n'en finit jamais. Une baraque comme celle-là, je t'assure qu'on aimerait presque en voir tous les jours, en tant que flic. Il y a tellement de choses à en retirer qu'on ne sait plus par quel bout les prendre. Tiens, un détail qui m'a frappé dès les premières secondes : les animaux du salon.

Élément inévitable. N'importe quel œil, même aveugle, aurait été attiré par cette débauche de trophées de chasse, laquelle laissait à croire que les propriétaires des lieux avaient détroussé la forêt des deux tiers de sa faune. Entre les massacres et les bêtes empaillées, la demeure comptait aujourd'hui plus de créatures mortes que vivantes en ses murs.

— Ton père était amateur de chasse ?

Antoine opina.

— Ouais, les mots sont superflus ce coup-ci, je te l'accorde. La question aurait pu être rhétorique. On n'a pas eu besoin de chercher longtemps pour dénicher la collection de fusils et sa réserve de matériel de chasse. Du matos de pro, soit dit en passant, très sympa pour qui s'y intéresse un peu.

Malgré l'absence de réaction, il persista dans son laïus :

— Il n'empêche, y'a un truc qui cloche, un truc qui m'a paru bizarre. Dans ta chambre, cette fois, on n'a trouvé aucun fusil. Tout un stock de couteaux, notamment de chasse, comme je te l'avais dit tout à l'heure, mais pas d'arme à feu. Tu n'en possèdes même pas une, une petite ? Les fusils ne t'intéressent pas ?

— Pas vraiment.

— Ah. Tu ne sais peut-être pas tirer, c'est ça ?

Si Maillou avait, par cette grossière provocation, pour intention de s'aliéner le suspect il allait devoir intégrer à son discours davantage de fourberie. Antoine demeura prostré.

— Si. Et même très bien, si vous voulez savoir, délaya-t-il sur le ton de l'écœurement.

— Alors quoi ? Ton père t'a bien emmené chasser une fois ou deux, non ? Vu ce qui se raconte à propos du bonhomme, le contraire m'étonnerait beaucoup.

— Une fois y'a longtemps, oui.

— Longtemps ? (Paul se saisit de son calepin) Quel âge avais-tu ?

Une procession de rides bossela le front de l'auditionné. Le regard fuyant, il lança à la figure du brigadier une réponse trop brusque pour gager son honnêteté :

— Je sais plus !

— Allons, Antoine…

La réplique suivante se vida de sa substance. Moins de brusquerie, moins de persuasion pour cette fois :

— J'sais plus…

— Bien sûr que si, tu le sais.

— Pfff… P't'être, genre… six… non, sept ans. Je crois.

— Sept ans.

Maillou répéta et repensa cette donnée, puis en travers des dernières lignes de son carnet reporta une série de chiffres qu'il entoura à l'encre noire. Depuis sa place, à l'autre extrémité de la table, Antoine parvint à lire à l'envers le nombre inscrit : « 1986 ». Paul ne daigna pas s'attarder sur la signification de cette date ; son intérêt ne déviait plus du rôle de la chasse dans le quotidien du jeune Dereuil.

— Au cours de cette fameuse occasion, tu avais abattu quelque chose ? Je veux dire : un animal quelconque, petit ou gros. Un cerf, un sanglier, faisan… ?

— Non. Enfin si, je…

Antoine déglutit.

— Un lapin. C'était la première et dernière fois.

L'annonce, telle une guillotine, avait tranché l'air devant sa bouche.

— Un lapin. À sept ans, donc ?

— C'est ça.

— Et depuis tu n'es plus jamais retourné chasser, conclut pour lui le policier.

— La chasse, c'est pas trop mon truc.

— Bien sûr, bien sûr, et c'est tout à ton honneur. Je respecte ça. Pour être franc, je n'en suis pas fan non plus. Bon, au moins maintenant je m'explique mieux l'absence de fusil dans ta chambre. Les couteaux, par contre…

— Des cadeaux d'mon vieux surtout. Je les gardais pour pas qu'il… se vexe, ou à la limite pour me protéger, quand je sortais.

— Te protéger, d'accord. (Une nouvelle inscription au carnet, sur la page suivante) Gros bagarreur, hm ?

— Oi ! La loi de la jungle, mec.

— Plutôt cogneur ou planteur ?

— Planter, c’est du dernier recours. Planter dans l’dos, alors que l’autre a que ses poings, c’est jouer en traître, ça rapporte que dalle.

— Ton père devait partager cette vision, tant que ça ne concernait pas les animaux.

— Jamais su.

— Je te fiche mon billet que oui, mais dis-moi un peu : il en pensait quoi alors, de ton dégoût de la chasse ?

— On n'en parlait pas.

— Ça ne devait quand même pas lui faire très plaisir, j'ai raison ?

Cataloguant la supputation comme une futilité, à laquelle il estimait par ailleurs avoir en partie répondu par ses répliques antérieures, Antoine en fut pour un haussement d'épaules. Paul n'y accorda aucun crédit.

— Je n'ose pas imaginer ce que ça donnait, de se mettre ton père à dos. De ce que j'ai cru comprendre, il ne valait mieux pas l'énerver. Ce n'était pas quelqu'un de très patient, comme en atteste son casier judiciaire. À propos, vos voisins nous ont rapporté toutes les disputes et surtout les cris qu'on percevait de par chez vous. C'était quotidien, il paraît.

La nonchalance d'Antoine butta sur un accroc lorsque Paul développa :

— Des bruits de coups aussi.

— C'était quelqu'un de bien.

Ferme et puissante, sa voix tonna dans la pièce, fit frémir les papiers étalés sur la planche de bois. Maillou ne s'en montra pas ému ; cet emportement était prévisible. Aussi prévisible que le prurit d’hématomes que le médecin avait répertorié sur le dos d'Antoine.

— « Quelqu'un de bien », assimila Paul, l'air grave.

Il ajouta derechef la déclaration à ses griffonnages, et cette note acide à ses pensées : Mouais… toi, t'as bien appris ton texte. En resta là, son sujet épuisé. Le droit de correction, celui d’un parent envers un enfant, était légalement et universellement reconnu, inscrit au Code civil, du moins en filigrane, à travers les notions « d’autorité » et de « devoir d’éducation ». Que des aînés en abusent, cela s’entendait, personne ne l’aurait nié ; néanmoins, le concept-même d’abus se perdait derrière un flou sémantico-juridique, et tendait à varier d’un foyer à l’autre, voire d’un juge à l’autre. Les jurisprudences croisaient le fer, d'une chambre à l'autre, d'une instance à l'autre, changeaient de ton, et le JAF[1] voyait passer à la barre des pères aux mains lestes, quand des mères au martinet leste ne devaient jamais se refléter dans les hautes fenêtres du tribunal. A contrario, les affaires de violences conjugales s’abordaient avec plus de sérieux, un effet des années 70. L’on ne s’offusquait certes pas d’une gifle occasionnelle sur le coin de la joue, mais une sanction administrée poing levé trois fois la semaine ne se couvrait plus d’un silence d’ordre privé. Les épouses ne divorçaient plus à la va-vite, leurs bleus sous le manteau ; elles ameutaient les avocats, les policiers, auraient ameuté des camionnettes et des convois entiers de journalistes, si elles l’avaient pu. Il suffisait d’un aveu, assorti d’une vilaine marque, une première main courante, la plainte déposée, le mari coincé.

Faute de plainte ou de main courante, Patrick Dereuil n’avait jamais rien encouru, sûrement pas ce qu’il méritait. « Quelqu’un de bien » ne risquait pas tout cela.

— Puisqu'on en est à parler couteaux, il y'a un autre point que j'aurais aimé éclaircir avec toi. Vois-tu, lorsqu'on est passés à ta chambre, on n'a pas hésité à tout fouiller de fond en comble. Pardon pour le bazar, mais eh ! le boulot c'est le boulot, n'est-ce pas ? Enfin bref, je n'ai pas pu m'empêcher de relever un… on va dire un fil conducteur au cours de cette perquisition. Tu ne m'en voudras pas de ne pas te donner mon avis sur tes passions bien particulières, mais je n'en pense pas moins.

Une allusion de moindre subtilité, qu’Antoine traduisit sans mal. Il ne s'autorisa pas de remarque, intrigué à l'idée de découvrir ce que le chef de brigade avait à lui révéler.

— Ce que je veux dire, c'est qu'on notait sans problème un thème. Sauf que voilà : au milieu de ces couteaux et de ces bibelots typiques d'un fanatique extrémiste, j'ai découvert deux choses détonantes. La première…

Du deuxième dossier Aff. Dereuil, qu'il ouvrit d'un claquement des doigts, il dégagea une pochette plastifiée au fond de laquelle Antoine aperçut deux objets. Pour lors, le brigadier se contenta d'en déloger un cadre de bois brut. De petite taille, ce cadre contenait un portrait au format paysage qui fut brandi devant le visage d’Antoine. Sous son nez, son reflet sembla le narguer. Pétrifié dans la gaieté obsolète d'un insaisissable instant, tant aux mains qu'à la mémoire, cet Antoine de quelques mois plus jeune que lui arborait une figure que son double était incapable de présenter : illuminé d'une aura de joie insouciante, d’une jaune phosphorescence. Un autre lui qui jamais ne devait rien connaître de la fatalité, alors qu'il enserrait une Gabrielle aussi radieuse que la vie qui dans ses veines courait encore.

— Une belle photo, commenta Paul. Deux jeunes amoureux, c'est mignon, il faut le dire. Sans rire, désolé que ça n'ait pas duré entre vous et surtout qu'elle ne soit plus là aujourd'hui. Comme tu te souviens, j'ai bossé sur son cas, et sincèrement j'ai de la peine pour toi.

Antoine lui opposa un regard circonspect. Tu s'rais bien le premier, mon gars. Était-ce là une nouvelle stratégie vouée à lui faire baisser la garde ? Rien dans l'expression faciale du policier n'indiquait que son empathie fut simulée, pas plus que la suite de son discours :

— Vraiment triste… Une jeune fille plutôt jolie, intelligente, et pas prude à ce qu'on m'a dit. Je comprends ce qui t'a attiré chez elle ou encore pourquoi tu traines autant au cimetière, même si, sur ce dernier point, beaucoup trouveraient ça un peu glauque.

Glauque… ? Ce terme aurait pu résumer les derniers instants d'Antoine sur Terre.

— Ta famille l'appréciait ?

« Glauque » ; Antoine sentit le mot empoisonner son organisme. Un état d'épuisement subit l'envahir de nouveau. Et une lassitude, lassitude croissante, lassitude anéantissante de tout et pour tout ce qui l'entourait. Se battre ou même vivre encore, il en était fatigué.

— Mon père, soupira-t-il. Lui, il l'aimait bien.

— Pas ta mère ?

Si fatigué.

— Hm… Bah, c'était plus compliqué.

— C’était un sujet de bagarre entre eux ?

— Dispute.

— Dispute, si tu veux. Alors, c’est oui ?

— Pas qu’je sache.

— Il peut être parfois difficile pour une mère, surtout une mère au foyer, de voir son grand garçon qu'elle a passé tant d'années à aimer et élever avoir l'ingratitude de lui préférer une autre femme. Si en plus le mari s’y met, ça vire vite à la bagarre…

— Dispute.

— À la dispute, pardon. Certaines mères le supportent mieux que d'autres, mais toutes en sont affectées.

— Y'a un peu d'ça.

Trop fatigué pour encore se dominer. Par ces quelques mots il en avait déjà dit plus qu'il ne l'aurait dû ou voulu, et des choses qui ne plaidaient pas en sa faveur. Plus grave encore, il se faisait l'impression d'essuyer sans vergogne ses mains souillées sur la mémoire de feue sa mère, sa très chère mère.

Était-elle effectivement immaculée ?

Je sais plus. Je… je veux pas savoir.

— Cela dit, intervint Maillou, je conçois que ce sujet (il tapota la photographie) reste sensible pour toi. Alors je n'insisterai pas ; ça n'est pas si important que ça, après tout. Beaucoup moins important que ceci.

De l'enveloppe brune glissa avec peine un morceau de papier d'un gris passé, prosaïquement découpé en forme de T, un T crénelé et déséquilibré dont la barre horizontale penchait un peu trop à gauche. Sa finesse était telle que, placé sous le halo de lumière, son contenu apparaissait par effet de transparence. Des enfilades de mots dactylographiés et dispersés autour d'une image aussi petite qu'un timbre-poste.

Alors comme ça, il t’arrivait de lire un peu ?

Bien trop fatigué.

*

Une du journal local, édition du 4 mai 1986

JETÉE À L’INFIDÈLE

Le corps de Thérèse N’Gambé retrouvé dans la rivière

Hier matin, vers 7 heures, alors qu’ls partaient pour l’école, deux jeunes enfants aperçurent un cadavre à la dérive sur la rivière l’Infidèle, au sud de Notre Dame d’Islemortes, à hauteur du pont de la Tourelle. Ils s’empressèrent d’aller trouver leurs parents qui en avisèrent le brigadier-chef Cassien Lacombe, au commissariat de la commune.

Les agents municipaux repéchèrent immédiatement le corps qu’ils déposèrent à l’hôpital Nord, dans un local prévu à cet effet, puis avertirent les autorités judiciaires. M. Pinaud, commissaire de police, aidé du lieutenant Lafon ainsi que du docteur Moreau, médecin-légiste, procédèrent peu après aux constatations légales.

Le corps a été identifié ce jour : il s’agit de celui de Mlle Thérèse N’Gambé, dont la mort tragique vient d’être annoncée à sa famille, qui avait auparavant signalé sa disparition. Depuis près de deux mois, Mlle N’Gambé, étudiante en Histoire âgée de 19 ans, n’avait pas reparu au domicile familial. (…)

*

— Qu'est-ce que tu fichais avec ça ?

Antoine inclina la tête, lèvres pincées. Entre ses doigts, Maillou fit onduler la coupure de presse comme un très fin mouchoir qu'il aurait agité en signe d'adieu.

— Au début, je n'y ai pas prêté plus attention que ça. Tu vois, quand je te parlais du fil conducteur de ta chambre, c'est en partie à ce genre de chose que je faisais allusion.

Nonobstant la distance le séparant du fragment de papier, Antoine put aisément lire, comme il avait pris pour habitude de le faire chaque soir de chaque jour depuis onze ans, le titre en lettres capitales chapotant le contenu de l'article. Plus difficile, en revanche, restait l'étude du portrait monochromatique au centre de l'écrit, réduit à un ovale noir au cœur duquel brillait d'un éclat falot le blanc de deux grands yeux surpris par un flash.

— Je t'imaginais bien prendre ton pied en te rejouant le film de cette tragédie, le soir dans ton pieu. Un de moins sur cette terre, c'est génial pour toi, non ? Sur le moment, ça m'a juste foutu en rogne, mais, une fois calmé, j'ai alors senti que quelque chose ne collait pas…

Paul Maillou centra son index sur le visage obscur, masquant celui-ci plus encore que la mauvaise qualité de l'image.

— La question qui m'est venue était toute bête, si bête que j'ai failli ne pas m'en soucier : pourquoi cette histoire en particulier ? Non, ne réponds pas tout de suite, je m'en charge. Admettons que tu sois bel et bien de ceux que le massacre de minorités fait bander, auquel cas pourquoi se contenter d'une seule affaire ? Des drames de ce type, ce n'est pas ce qui manque, peut-être plus outre-Atlantique qu'en France ceci dit. J'ai pris le temps d'y réfléchir et j'en suis d'abord venu à la conclusion que ça s'expliquait par le fait que cette mort avait eu lieu ici-même, à Notre Dame. La présence de l'article répondrait en l'occurrence à, je ne sais pas, une espèce d'esprit de clocher ? Ça pouvait se tenir, et pourtant je ne me sentais toujours pas totalement convaincu. J'avais cette sorte d'intuition, celle dont on parle souvent quand il s'agit des policiers, qui me poussait à croire que ça allait beaucoup plus loin.

Un tressaillement agita la bouche d'Antoine. Il la garda close. La réflexion de Maillou était encore loin de son terme :

— En bon flic, j'ai donc mené ma petite enquête parallèle. Une affaire vieille de onze ans, pour une commune où il ne se passe quasiment jamais rien : un jeu d'enfant pour un vieux de la vieille comme moi, d'autant plus que j'étais déjà en service, à l'époque des faits. Il ne m'a pas fallu plus de dix minutes pour écluser les archives et en dégager le dossier N'Gambé. Ou plutôt les dossiers, au pluriel ; ça n'avait rien d'une banale petite affaire. Enfin, pour cette fois, un seul suffisait.

Sur ce, il isola de sa montagne de documents le dossier éponyme, dernier et plus anarchique amas de feuilles jaunies qu'il éplucha sans prendre la peine de les lire.

— Sale histoire. La pauvre demoiselle était portée disparue depuis des semaines et personne n'avait la moindre idée de l'endroit où elle se trouvait. Ou, du moins, personne ne s'en souciait plus que ça. Elle était majeure, jeune, on ne pouvait même pas vraiment parler de disparition, sur le plan légal. Juste d'absence. À l'époque, mes collègues avaient jeté l'éponge en avançant qu'elle avait tout bonnement fugué. Je les soupçonne surtout de ne pas avoir fait grand cas de "l'absence" d'une petite Noire, mais bon, on ne réécrira pas le passé, les années 80 et leur racisme décomplexé ont fait leur temps. Je te laisse imaginer la tête des membres de la brigade lorsque le corps a été sorti de l'eau et la dépouille identifiée. Le rapport du légiste avait de quoi glacer le sang : séquestration, violences, viols, lacérations, brûlures au second degré… Pour te donner une idée de cette horreur : son bras droit s'était échoué sur la rive, à deux kilomètres en amont de là où les gamins l'avaient trouvée. Pas tranché net, mais arraché. Idem pour sa jambe, qui a lâché pendant le transport. Putain de boucherie. Ça peut s'expliquer par la cause de sa mort, une « collision » avec un véhicule. Elle a dû être méchamment secouée ; le conducteur y est allé franco. Puis le corps a fini balancé dans l'Infidèle post-mortem. Mais jusqu’ici je ne t'apprends pas grand-chose, l'article le révèle aussi. Ce qu'il ne donne pas, c'est l'identité des responsables.

En dépit de l'énergie qu'Antoine mobilisait aux fins de se dominer, une multitude de gouttes de sueurs commença à poindre à son front. Il contint son envie de les chasser d'un revers de manche, se limita à espérer que les symptômes de son angoisse passeraient sous les radars du policier dont la verve ne s'était épuisée :

— Mais nous, on les connaît, ces responsables. Les enquêteurs avaient déniché un véhicule utilitaire renversé dans un fossé en bordure de bois. À l'intérieur : deux morts. Et encore plus intriguant : des traces d'un troisième passager sur la banquette arrière. Les empreintes relevées sur place ont vite été exploitées. Verdict : Thérèse N'Gambé. On tenait nos tortionnaires, un couple qui vivait en périphérie, pas très loin du dernier lieu où la jeune Thérèse avait été vue avant sa disparition. Parfait ! Cette découverte marquait un début de victoire pour la police islemortoise. « Un début » seulement, car il restait une inconnue, l'identité du conducteur à l'origine de la mort de Thérèse. Parce que tu vois, les indices recueillis jusque-là laissaient entendre que les ravisseurs avaient eu cet accident fatal avec à leur bord la victime encore en vie, accident dont celle-ci aurait été la seule rescapée. J’allais dire « miraculée », mais ce serait vraiment mal venu, dans le cas présent.

L'enchaînement des événements se dessinait dans toutes les têtes. Antoine entendait, écoutait, parfois en était d'un « Hmm » ou d'un soupir, jamais n'intervenait, n'osant s'intégrer, de près ou de loin, au récit policier.

— Elle se serait extirpée de l'utilitaire, se serait enfuie, en piteux état mais bien vivante, puis aurait gagné la route en vue, probablement, de trouver de l'aide. C'est là qu'une autre voiture l'aurait renversée. Boum. Fin de partie.

Clac ! Le dossier fut refermé sans plus de cérémonie.

— Les marques sur le corps étayent cette théorie. L'impact n'a pu être causé que par un véhicule de grande taille, à la calandre large et taillée dans un acier extrêmement résistant. Une camionnette de type « pick-up ». Une description qui ne concorde pas tout à fait avec l'automobile des ravisseurs. Aujourd'hui, on ignore toujours à qui pouvait appartenir ce fameux pick-up.

La coupure de presse quitta le plateau pour retrouver son enveloppe. La pochette renvoyée au sommet de la pile, Paul croisa les bras sur son buste qu'il pencha au-dessus de la table, au plus près du suspect.

— Antoine, réponds-moi maintenant : ton père, il conduisait quoi, comme voiture, y'a onze ans ?

Encouragées par l'accélération de son rythme cardiaque, les billes de sueurs roulèrent tour à tour sur les tempes d'Antoine, scintillant autour de son front tels des diamants liquides.

— Je me rappelle plus… chuchota-t-il.

Ces mots contenaient l'amertume ferreuse du sang en bouche.

— Ben voyons, bien sûr que tu ne te rappelles plus… (Paul tordit ses lèvres de biais) C'est une amnésie qui ne m'arrange pas ; tu avais l'occasion d'abréger mon exposé. Tant pis, ça ne change rien…

Il suspendit sa phrase, guigna du coin de l'œil les réactions de son vis-à-vis qui, de parole en parole, se répandait sur la table en une flaque de nervosité.

— … rien à mes déductions. J'y viens dans un instant, mais d'abord permets-moi de te parler plus en détail de la victime. J'ai énoncé le moment où les enquêteurs l'avaient repêchée. Le corps avait longtemps dérivé, emporté par le courant, tu te représentes donc l'état dans lequel il était, et je ne parle pas que de son bras. L'eau, c'est fatal pour les indices, presqu'autant que le feu. Heureusement pour nous, l'immersion n'avait précédé la découverte du cadavre que d'une dizaine d'heures. Le légiste, un véritable artiste médico-légal, est arrivé à estimer la date de la mort. Toi aussi, tu la connais.

La vision trouble, la respiration hachée, Antoine secoua lentement la tête.

— C'était un samedi, le 26 avril. 1986.

Le mouvement de rotation nucal ralentit, la mécanique du corps grippée soudain.

— 26 avril 1986, insista Maillou. Pas n'importe quelle date. Chaque Islemortois de plus de douze ans s'en souvient, car aucun d'entre nous ne pourra jamais oublier le jour de la pluie de viscères. Les petits patelins ont la mémoire longue ; c’est un peu tout ce qu’ils ont. Tu peux demander à qui tu veux, n'importe quel habitant sera capable de te dire avec précision ce qu'il était en train de faire lorsque les poissons sont tombés du ciel, de même que ce qu'il a fait juste après. Moi, j'étais au commissariat, à interroger un jeune délinquant avec mon ancien chef de brigade, dans cette (il claqua la table du plat de la main) salle. Je me rappelle le moindre détail, jusqu'au procès-verbal devant moi. À ma droite : le chef Lacombe, qui énumérait les preuves. Un vieux copain de ton père, si je me trompe pas. Il en était au témoignage du dealer quand Giscard a fait irruption puis a annoncé qu'il fallait qu'on vienne voir ce qu'il se passait dehors. « De toute urgence ! », il a ajouté. Son visage… bon sang, il m'a foutu une trouille bleue.

Sur une inspiration, Paul posa un regard mélancolique sur la porte verrouillée. Derrière ses iris, lesquels se voilèrent imperceptiblement, la scène se rejoua pour quelques minutes. Non, il ne voulait pas voir cela, pas tout de suite. Un cillement, puis l'écume des souvenirs se retira sur la toile du présent.

— Et toi ? Tu faisais quoi ?

La question eut beau tourmenter les oreilles d'Antoine, elle ne donna jour à aucune réponse. Sous son poitrail, son cœur avait scellé ses artères afin de s'accaparer tout le sang nécessaire à la mise en action de la langue ou l'élaboration d'une pensée structurée. Privé de son suc, le cerveau alla se rendre à d'autres contrées interdites.

Pendant la pluie, pendant la pluie… Des images, des sons, de disparates sensations. Le chaos. La chambre. Les coups sur la vitre, les carreaux qui vibrent. Le bruit du tonnerre, celui de l'avion. L'avion ! L'avion tombe, il rase le domaine. Il ne s’y écrasera pas, même si c’est ce que tout le monde redoute sur l’instant. Il passe, mais vient le sang à la fenêtre, le ciel qui dégouline sur le jardin. Le jardin que les poissons ont enseveli, toutes ces têtes aux yeux ronds, lambeaux d'écailles et gerbes d'entrailles, sur le layon et carré fleuri du jardin. Il est rouge, il pourrit, le jardin. Maxime, alors entré dans l'adolescence, tremble devant ce qu'il croit être l'Apocalypse. Antoine regarde son grand-frère d'en dessous ; lui est à genoux. Il ne craint ni la pluie ni les poissons. Il a déjà connu l'effroi. L'effroi, c'est son grand-frère. L'effroi, c'est le pantalon sur les chevilles. C'est la moquette qui râpe la peau. C'est la main tendue. Sa petite main, au-dessus de sa tête ; il sent le cœur de Maxime battre au creux des veines palpitantes, au creux du membre dressé, au creux de sa paume vendue à l'ignominie. Et ce cœur s'accélère comme s'intensifient les heurts contre le verre. Ce cœur qui aujourd'hui ne battait plus.

De retour au présent, pas un mot d'Antoine ne trahit l'existence de ce cauchemar ; Maillou pressentit qu'il lui fallait faire le deuil de sa précieuse confidence.

— Certains t'apprendront même, et de façon surprenante, qu'après coup ils ont pris la voiture, expliqua-t-il. Malgré l'état de la chaussée ravagée par les bouts de poissons, ils ont vagabondé à travers la ville et ses alentours. La raison ? Pas sûr qu'il y en ait une. Pas une qui s'applique à tous, rien d'universel. Parfois, c'était juste pour fuir, purement et simplement, mais cela ne concerne qu'une minorité. De mon côté, je devine une autre motivation assez originale, quoique plausible : la chasse. Si, ça tient debout ! c'était l'occasion rêvée de faire une belle prise, seul dans les bois. Pas de concurrent pour nous coiffer au poteau, pas de flic pour nous rappeler que la saison n'est pas ouverte. Juste nous, notre fusil et notre gibier. Ce qui, ironiquement, nous ramène encore à notre pauvre Thérèse. Figure-toi qu'avant d'être abandonnée à la rivière en crue, on avait pris le temps de lui attacher les membres. Je suppose que le bras devait encore s'accrocher, même de pas grand-chose. Si le bain de minuit l'a emporté avec une partie des cordes, la scientifique a tout de même relevé quelques fibres sur le corps. Cordeau tressé noir en nylon, le type de liens dont on se sert pour ligoter le gibier. Du matériel de chasse.

Plus aucune couleur sur le visage de l’auditionné ; son teint se confondait avec la pâleur cancéreuse de la lumière épanchée sur eux. Dilué dans le flot lumineux, son être s'en était retourné à ce jour, ce 26 avril 1986. Tel un acteur maudit, il le revivait scène après scène, en boucle. À ses tympans, flottèrent insensiblement les mots de l'agent de police, insignifiants papillons aux ailes desséchées : « Tu vois où je veux en venir ? » Il n'avait plus assez de vaillance pour les chasser. Des battements d'ailes dont il finit par ne plus percevoir que le lointain écho, pareil à un bruit de fond roulé sur le décor d'un passé réveillé sur le tard.

Puis, après la pluie… La forêt ; ses arbres dont les ramifications partaient s'ancrer dans le ciel, sombre réseau veineux ; sa fraîcheur humide, héritée de l'ondée qui l'avait giflée, et qui agglomérait la pulpe des doigts au métal du fusil ; sa faune somnolente…

… « Une putain de traque » …

Ses lapins.

Autour de lui, la lumière se rétracta à mesure que murs et plafonds se resserraient sur son corps.

— J'ai vu les photos à ton salon. Il y a celle de ton père dans les années 80, celle où il pose devant sa voiture. Son pick-up blanc.

Ses lapins désorientés si faciles à berner, en cette période de rut, si faciles à marquer au plomb. L'enfant n'avait pas voulu tirer, il l'aurait juré sur sa vie. Bien au contraire, il avait même prié pour la survie de l'animal prisonnier de ce fichu collet, en dépit des hurlements dont Patrick l'assaillait : « J'ai dit : tire ! » Tout ce qu'Antoine désirait à cet instant : libérer le lapin, regagner son domicile, sa chambre, son abri, lové dans les profondeurs interstellaires d'une autre réalité plus clémente que celle de sa prison palpable et respirable.

— Tu veux entendre ma théorie ?

S'enfuir en quête d'ailleurs et de rédemption, tant que le lapin et lui bénéficiaient encore de cette chance.

… « TIRE ! »

Mais le coup était parti, et l'espoir de la bête avec. Père et fils avaient repris la route, leurs vêtements imprégnés d'une odeur de sang et de feu, sans un cadavre animal à épingler à leur mur. Soufflé par la déflagration, le lapin était trop altéré pour constituer un trophée digne de ce nom, mais Patrick n'en avait pas pris ombrage. La peau du gibier importait peu, du moment que brillât la victoire du petit homme. Et c'est alors que…

— Voilà comment, d'après moi, s'est déroulée la journée : une fois l'averse passée, ton père, passionné de chasse, a eu pour idée d'aller crapahuter dans les bois cueillir le gibier que les viscères en putréfaction auraient attiré. Il t'a embarqué, pour une sorte de rite initiatique qu'il imagine répondre à ses valeurs tordues. Vous arrivez, la fleur au fusil, et peut-être même que là, coup de bol, vous débusquez une bestiole à abattre, du genre, pourquoi pas, un lapin ? Et en rentrant chez vous en bagnole, pleins d'un sentiment de fierté propre aux salopards de votre espèce, vous « tombez » sur Thérèse N'Gambé qui erre à poil au milieu de la chaussée, à quelques mètres du fossé où s'est renversée la voiture de ses ravisseurs. Mais ça, vous ne pouvez pas le savoir. Non, de votre point de vue tout ça n'a pas de sens ; que fait-elle ici ? Vous l'ignorez, mais sa présence ne réfrène pas une seconde votre détermination. C'est même pire : elle vous agace, cette fille, avec sa peau noire et ses cheveux crépus, à interrompre comme ça votre chevauchée victorieuse. Pied au plancher, vous remontez la route, ne prenez pas la peine de freiner et bam ! Vous envoyez valdinguer la négresse. Bon débarras ! Elle ne peut s'en prendre qu'à elle, elle n'avait rien à foutre sur cette route.

… « Qu'est-ce que tu foutais sur la route ? » …

— Mais en dépit de ce que son cadavre vous inspire, sans doute l'impression d'une mission menée à bien (j'ai tout bon ?), sa mort ne fait pas trop vos affaires. Si on, et par « on » j'entends plus particulièrement les flics, venait à s'intéresser de trop près à sa mort, vous auriez du mouron à vous faire. Ouais, vous voilà mal barrés. Alors, ni une ni deux, vous vous jetez sur votre matériel, ligotez la victime comme un chevreuil crevé, puis balancez le tout dans la rivière. Et pour faire bonne mesure, vous vous dépêchez, dès le lendemain ou surlendemain, de vendre le pick-up au premier gogo d'accord pour vous le racheter une poignée de queues de cerises, et de vous débarrasser des autres cordes en votre possession. Sans oublier de surtout, surtout, garder pour vous cette histoire.

Paul braqua sur Antoine des yeux brûlants, passa à travers son buste et son dos. Derrière lui, il guetta le spectre mutilé de Thérèse N'Gambé. La nuque brisée, la tête obliquée sur son épaule déchirée ; coincée dans une perpétuelle expression d'incompréhension saturée de désespoir. Elle semblait les sonder tous deux. Les implorer : « Pourquoi ? Pourquoi ?! », ne jamais en retirer ni réponse ni salut. Morte pour rien, son sort ne valait pas plus que celui d'un chien galeux. « POURQUOI ? »

Il se remémora alors : c'est vrai, elle n'aurait pu prononcer ces mots. Ils lui avaient coupé la langue.

Paul planta ses incisives dans la sienne, ne parvint à la maîtriser pour autant. Mordue jusqu'au sang, déversé par grosses coulées dans son œsophage.

— Thérèse, elle avait toujours son bras quand vous l'avez percutée, hein ? … Bordel… Toute cette boucherie, tout ce gâchis, juste parce qu'elle a eu la malchance de naître Noire. Une pauvre Noire mal en point et vulnérable, que le destin aura eu le malheur de placer sur la route de ces tarés fascistes de Dereuil.

« NÉGRESSE DE MERDE ! » …

La mâchoire d'Antoine se décrocha. Quelques paroles partirent, ondulantes, guidées par les molécules d'oxygène, lesquelles donnaient la sensation étouffante de s'être raréfiées. Une inspiration laborieuse, sifflante comme une vieille locomotive, et il se rendit à Maillou :

— C'était un accident. Involontaire. Pas ma faute. Pas vue, sur la route, avant l'impact.

Se révélait-elle. Sa mine chagrine, sa mélodie hachurée ; elle était là, la vérité.

Une fois encore, Paul Maillou, chef de la brigade policière de Notre Dame d'Islemortes, quarante-deux ans, dont seize dédiées à la justice et aux citoyens, avait vu juste. Et à son grand dam, cette révélation ne s'accompagnait pas de la satisfaction attendue. À la force de ses mots, il avait remporté une décisive bataille, sous peu remporterait la guerre, mais de sa victoire ne savourait pas le goût. Celle-ci, au contraire de celles qui l'avaient précédées en seize années de service, lui était bien trop amère.

— Ce n'est pas le lapin, ça n'a rien à voir avec un lapin, pas vrai, Antoine ? C'est Thérèse. C'est cet accident monstrueux qui te poursuit, qui te dégoûte de la chasse, qui explique ton comportement…

Des théories aux airs d'axiomes, auxquelles Antoine souscrivit d'un hochement de tête mécanique. Aux derniers mots du brigadier : « … la haine que tu éprouves envers ton père. », il acquiesça encore, trop abattu pour réfuter quoi que ce fût. Ses actes véritables, passés ou présents, ne se distinguaient plus de ses prétendus torts. Il ne savait plus. Éclaté par le deuil, deuil de celle qu'il aimait, deuil de ceux qu'il avait toujours connus, comme de l'individu qu'il avait appris à être. Son quotidien se fragmentait en une mosaïque absconse de laquelle il ne retirait plus de sens. Le récit de ses dernières journées, aux cendres soufflées sur sa mémoire. Patrick, sa mère, ses frères… Devait-il s'avouer meurtrier, en fin de compte ?
Il en doutait, encore un peu, ne fut-ce que pour la seule paix de son âme.

C'est pas possible.

Impossible, et pourtant…

Onze ans en arrière, il n'avait voulu causer la mort de cette fille, pas plus que celle du lapin. Pas sa faute. Pas davantage sa faute si Patrick l'avait contraint à s'enchaîner au silence du coupable. Ce n'était qu'un enfant, il n'avait pas eu le choix.

C'est l'heure.

Des années de silence, comblées par d'oppressants murmures, tout le temps, de partout, dans les confins des ténèbres qui à sa peau s'agglutinaient un peu plus à chaque seconde.

L'heure de briser le sceau.
Avoue quel mal cela te fait.

Ces ténèbres aujourd'hui à son crâne faisaient entendre leurs voix. Dans leur fureur, elles l'exhortaient à exhumer la vérité enfouie, si profondément.

Je peux pas… S'il creusait, s'usait les ongles jusqu'à la chair, jusqu'au sang… S'il vous plait ! … tout au fond…

Dis-le, Antoine, et enfin libère-toi.

Une rancœur à l'encontre de son père aurait-elle pu survivre en lui ? Sans doute.

Arrête ça !!

Regrettait-il d'avoir tant souffert pour lui ? Non ! Il le regrettait. NON !

En voulait-il à sa mère, sa très chère mère, de n'avoir protégé l'enfant innocent, de ne l'avoir préservé de son mari, sa violence et ses délires ? De son frère et sa perversité ? Beaucoup. Pitié… arrête…

Dis-le. Délivre-toi.

S'en voulait-il d'avoir sciemment livré Gabrielle à l'horreur de son monde ? Gaby, je suis désolé. Plus que tout. Je suis tellement désolé.

Haïssait-il à ce point Patrick ainsi que les autres membres de sa famille ? Oui, à ce point.

Oui, à ce point.

Attendu qu'ainsi se le figurait le chef de brigade, tout comme le feraient les villageois une fois la nouvelle répandue. La majorité adoptait cette thèse, pourquoi la combattre encore ? si cela lui permettait de clore le chapitre de son infortunée existence.

— C'est terminé, Antoine.

— Je sais.

[1] Juge aux Affaires Familiales, en charge, notamment, des affaires relatives à l’exercice de l’autorité parentale depuis 1993.

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