Chapitre 63

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Anouk dormait depuis environ une heure. La maison était très calme depuis notre pseudo dispute de tout à l’heure, à Norah et moi. J’étais dans le bureau quand je l’ai entendue s’approcher doucement, comme si elle avait peur de moi.

Je n’arrivais quant à moi pas à être plus tendre avec le pauvre clavier de mon PC. Je tapais un rapport que j’aurais du terminer il y a longtemps. J’étais du genre à procrastiner, mais quand j’étais en colère, j’avançais sur mes dossiers en attente à une vitesse folle. J’avais presque rattrapé tout mon retard. Je sentais toujours que j’avais mal partout, au point de dire des choses sans vraiment le vouloir. Je sentais quelque chose qui s’était accaparé mon esprit et le faisait parler à ma place. Ça me faisait peur.

Norah s’est approchée doucement et s’est arrêtée au pas de la porte. J’étais de profil par rapport à elle et la voyait de mon œil gauche, toute penaude.

- Je sais pas ce qui m’arrive en ce moment... a-t-elle commencé à dire, ce qui ne servait à rien pour moi.

Autant ne rien dire puisque je n’apprenais rien de nouveau!

- ...

- C’est pas de ta faute, c’est pas ce que tu crois...

- De mieux en mieux, ai-je pensé, en sentant la moutarde me piquer fort au nez.

- C’est quoi, alors ? Lui ai-je sèchement coupé la parole. Tu vas me dire que c’est toi qui a un problème et que tu me mérites pas, bientôt ?

- ...

Je voyais des larmes mouiller ses yeux et tenter de s’échapper de ses paupières, malgré ses clignements incessants. Pour seule réponse, elle a tourné les talons et est allée vaquer à ses occupations, sans grande conviction. Je prenais ça comme un aveu. Elle me trompait, j’en étais sûr. Elle se serait pas mise à pleurer, sinon. Elle n’avait qu’à me le dire, en fait. Je suis pas sa chose. Elle croit quoi ? Que je vais accepter de la partager avec un autre mec ? Il manquerait plus que ça... Au bout de quelques minutes, n’y tenant plus, je l’ai rejointe dans la cuisine. Cette colère s’emparait de moi et ne me laissait pas la place à la réflexion, ni à l’empathie.

- Si tu me dis pas tout-de-suite ce que t’as, je m’en vais.

- …

- Et hors de question que je parte sans Anouk.

- Quoi ? Anouk reste ici, c’est pas négociable. Tu veux partir, soit. Mais c’est ta décision, ne la mêle pas à ça. Elle a encore beaucoup besoin de moi.

- C’est ma décision ? Mais tu as vu ce que tu me fais subir ? J’ai pas décidé de me faire prendre pour un con, moi !

- Je te prends pas pour un con, jamais j’ai fait ça…

- Mais arrête, s’il te plaît ! Personne n’y croit à ce baratin !

Je sentais qu’elle me cachait un truc et je ne supportais pas ça. J’étais très en colère, pire encore que quand j’essayais de l’appeler sans obtenir de réponse, quand j’avais l’impression que j’aurais pu hurler sur quelqu’un tellement ça m’exaspérait. Pire que quand je l’attendais avec Anouk à la maison, sans savoir où elle était. Il fallait que je garde mon calme pour la petite mais ça me mettait encore plus en colère. Sa voiture était garée devant la maison, je savais donc qu’elle n’était pas loin et que rien ne lui était arrivé. Je crois que quand elle est entrée, je me suis contenu pour ne pas lui sauter à la gorge comme je ne me suis jamais contenu. Elle paraissait toute calme et avait l’air de ne pas réaliser qu’on l’attendait et qu’on s’était inquiétés. Et surtout, elle ne m’a donné aucune explication, comme si c’était normal de ne pas répondre au téléphone pendant plusieurs heures, de zapper sa fille à aller récupérer à la crèche et de prendre tranquillement son temps pour rentrer.

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