Chapitre 5

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  « Eh bien, je dois dire que tu as changé. Sans la couleur de tes yeux, j'aurais eu peine à croire qu'il s'agissait bien de toi, déclara le Grand Qalam, après avoir fini de tasser de la poussière d'herbe bleue au fond de sa pipe.

  • Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis notre dernière entrevue, répondit Bhagttat. Non, merci, je ne fume pas », déclara-t-il en faisant passer la pipe du côté de ses hommes.

 Des hululements ponctuèrent les taffes des fumeurs assemblées autour de la table. Le Prince ne détacha pas son regard de celui du Grand Qalam. Ce dernier sentit que le monarque cherchait timidement une ouverture dans son esprit, au moment où les composés de l'herbe bleue arrivèrent jusqu'à son cerveau.

 « Enfin, comme vous pouvez l'imaginer, je ne suis pas venu pour discuter de l'apparition de ma barbe et de la mue de ma voix, soupira le Prince.

  • Cela va de soi », répondit le Grand Qalam.

 Il l'observa intensément, alors que la pipe était revenue à lui et qu'il appréciait la fumée de sa seconde bouffée.

Sauf tout le respect que je vous dois, mon Prince, je pense qu'il est inutile d'essayer de m'ausculter. Restons-en aux méthodes de discussion plus conventionnelles, pensa-t-il.

 « J'ai bien pris connaissance des événements survenus ici, grâce à votre lettre, ainsi qu'aux conversations que j'ai pu entretenir avec Pratha, reprit le Prince sans se décomposer. Au passage (il se retourna vers l'adepte), sache que je suis avare de compliments ; mais il me semble que le Chram sera en de très bonnes mains, le jour où il te sera confié. Ghasni a fait un excellent choix. »

 Pratha rougit.

 « Néanmoins, pour en revenir à notre propos, il se trouve qu'à travers la décision que vous avez prise, vous m'avez mis dans une situation... des plus embarrassantes. En effet, vous n'êtes pas sans savoir que nos charmants voisins sont en proie à des troubles importants depuis bientôt trois ans. La police de l'Empire massacre les opposants, qui, en conséquence, se radicalisent, commettent à leur tour des violences à l'égard des autorités, ce qui entraîne une réponse toujours plus brutale et ainsi de suite... le serpent se mord la queue.

  • Jusque là, tu fais état de nouvelles plutôt positives, nota le Grand Qalam.
  • Vous avez raison. Néanmoins, ce contexte on ne peut plus tendu rend le dialogue avec l'Empire – déjà laborieux par bien des aspects – encore plus délicat. L'Empereur, d'après mes sources, est gangrené par une paranoïa que chaque massacre dans son pays renforce. N'oublions pas que la quasi totalité des jayshis postées aux frontières lui reste éperduement fidèle. Et notre armée n'est pas encore de taille à les affronter. C'est pourquoi, faute d'avoir une autre option, je dois montrer patte blanche.
  • Je comprends bien la situation, mais venons en aux faits, répondit le Grand Qalam. Officiellement, nous n'avons fait qu'accorder l'hospitalité à des marchands en fuite. Marchands qui, par ailleurs, ont été des hôtes exemplaires. »

 Pratha repensa à l'attitude de Jébril lors du premier banquet et sourit.

Bien sûr, je ne suis pas dupe et j'ai parfaitement conscience que ces étrangers, aussi aimables soient-ils, ont traîné dans des affaires louches, ajouta le dignitaire en pensée.

 « Des marchands ? En êtes-vous bien sûr ? rétorqua le Prince. Bien... Je pense que nous ne pourrons pas aller plus loin tant que nous ne serons pas seuls, pensa-t-il.

  • Je te rejoins. Messieurs, nous aimerions nous entretenir en privé. »

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