Emily Bishop se tenait devant sa toile, les sourcils froncés, concentrée sur les coups de pinceau qui semblaient ne pas vouloir obéir. Le matin était déjà bien avancé, mais la lumière douce du soleil d'automne perçait à peine les grandes fenêtres de son studio. L’université de New York, avec ses bâtiments historiques et ses jardins cachés, était un endroit idéal pour se perdre dans la création. Pourtant, ces derniers temps, l'inspiration lui échappait.

Emily soupira et posa son pinceau. Elle tourna lentement la tête vers la grande horloge accrochée au mur. Onze heures. Peut-être était-il temps de sortir un peu, de changer d’air.

Elle attrapa son manteau en laine noire et quitta l'atelier sans un mot. Ses bottes claquaient sur le sol pavé du campus tandis qu'elle traversait la cour centrale, la tête pleine de pensées. Depuis quelques semaines, elle avait cette sensation étrange, presque désagréable. Comme si quelque chose la frôlait, la suivait. Pas une présence menaçante, non. Plutôt une sorte d’énergie sourde, persistante, qui se manifestait par des frissons, des éclats de lumière ou des rêves qu’elle oubliait au réveil.

De l'autre côté de la ville, Jake Morgan regardait par la fenêtre de son bureau au 27e étage d'un gratte-ciel de Manhattan. Architecte accompli à seulement 29 ans, il était habitué à jongler entre les projets ambitieux et les réunions interminables. Mais ce matin-là, quelque chose l'empêchait de se concentrer. Il ne pouvait se débarrasser de cette étrange impression d'inachevé.

_ Jake, tu es là ? demanda une voix derrière lui.

Il sursauta légèrement, puis se retourna. C’était son assistant, David, tenant une pile de documents. Jake s'efforça de sourire, mais son esprit restait ailleurs.

_ Oui, désolé... je pensais juste... Il laissa sa phrase en suspens. Que pouvait-il dire ? Qu'une force invisible semblait s'être immiscée dans sa vie, rendant ses pensées floues et désordonnées ?

_ Ça va ? s’inquiéta David, remarquant son air absent.

_ Oui, juste une journée bizarre, répondit Jake en passant une main dans ses cheveux bruns, un geste nerveux qu'il faisait lorsqu'il réfléchissait trop.

Il repoussa sa chaise et se leva brusquement :

_ Écoute, je vais faire un tour. J’ai besoin de sortir un peu. Il ne pouvait pas expliquer pourquoi, mais il savait qu’il devait quitter ce bureau.

David, perplexe, hocha simplement la tête et regarda son patron sortir, le visage préoccupé.

Jake descendit dans les rues animées de Manhattan, se laissant porter par la foule. L’air frais lui fouettait le visage, mais cela ne l’empêchait pas de ressentir cette agitation interne qui le suivait depuis des jours.