- Depuis que j’habite la campagne et que je jardine, j’en ai appris des choses… Savez-vous par exemple que les plantes ont des yeux ?

- C’est possible ; après tout, les pieds ont bien des plantes !

- El le nez des végétations et les intestins une flore, évidemment …

- Vous avez un jardin d’intérieur ?

- Non, j’opère en pleine terre où sont les vers.

- Quelle poésie !

- Mais ceux-ci sont sans pieds…

- Cent pieds sous terre ?

- Ben non, voyons.

- Cent pieds de longueur, peut-être ?

- Mais enfin, comprenez donc qu’ils n’ont pas de pieds !

- Ah ! je me disais aussi que ça ne tenait pas debout… Et ces yeux, alors ?

- De futurs boutons.

- Sur le visage ?

- Sur la tige, bien sûr, comme les boutons de roses !…

- Bon, j’arrête de vous taquiner car je sens que vous avez les nerfs à fleur de peau. Mais, tout de même, ôtez-moi une épine du pied : votre couperose, ce n’est pas à cause de l’absinthe ?

- Pour sûr non ! J’ai la main verte, pas la langue !

- Elle, vous l’avez de bois !

- Pas davantage que la gueule !

- Vous adoptez un langage qui fleure le terroir !

- Oui et je devrais vous appeler « vieille branche ».

- Vous me considérez donc comme un pote âgé ? Vous n’êtes plus dans la fleur de l’âge non plus !

- Ne vous inquiétez pas, vous n’êtes pas encore un légume… et l’amitié, ça se cultive… comme un potager !

- Pas en semant la discorde.

- Je ne suis pas non plus de la graine de violence, mais le poil à gratter m’irrite et je risque d’en écraser les fruits pour faire de la confiture !

- Gardez votre paume de fer pour vos pommes de terre ! Ou votre gland…

- Pardon ?

- Non, rien. On enchaîne… Et votre jardin, on peut le voir ?

- Non, c’est un jardin secret.