• Oui, la société de Phir. Les Hammer ne l'auraient jamais toléré, cela aurait été une honte pour la famille. Le seul bute sur cette île est d'embellir son image à son comble, d'élever sa famille au plus haut rang, par tous les moyens. Le mariage est le plus courant. Il était donc impossible que j'entretienne une relation avec mon frère adoptif. Dans le meilleur des mondes, notre histoire serait restée secrète et nous aurions tôt ou tard continué notre vie chacun de notre côté avec le regret d'un amour inaccompli. Mais il en a décidé autrement et je suis tombée enceinte d'Eneko. C'est à ce moment précis que le cauchemar a pris une ampleur dramatique. Entre temps, lui et moi, nous nous étions unis à des partenaires selon des arrangements familiaux. Nous entretenions une jalousie sans merci l'un envers l'autre. Même accrochés à nos amours communs, nous n'arrivions pas à nous détacher de ce que nous avions construit ensemble. Après nos mariages, il s'est écoulé une année entière de calvaire et d'amour haineux entre nous avant que je renonce à nous. Il était d'une déraisonnable jalousie, possession et passion. J'ai tout avoué à mon mari et nous sommes repartis à zéro sur une île voisine appartenant à sa famille. J'ai enduré trois longues années de rumination, me persuadant que Bewen incombait définitivement au passé. Mensonge, encore et encore des mensonges tourbillonnant dans ma tête. J'étais totalement embrouillé. Malgré cela, j'ai tout de même profité des ces années avec ma vraie famille, les meilleurs...

Ma voix vacille de en temps à autre sans que je ne puisse me reprendre. L'émotion des mots est bien trop forte, je ne peux plus m'arrêter. J'ai cette nécessité de finir mon récit.

• Nous sommes rentrés pour quelques mois sur l'île, Sébastien devant faire affaire. Je n'ai pas renoué de lien avec Bewen, seulement, il était mordu par une jalousie noire qui l'obsédait jour et nuit. Perdant tous ses moyens, il m'a menacé et torturé à sa manière sans relâche... J'ai eu peur, peur pour mon fils et j'ai tenté de fuir avec lui...La loi considère que l'enfant appartient toujours à l'homme dans un couple, alors c'est comme si vous aviez kidnappé un enfant...

Je n'ai pas la force de rajouter quoi que ce soit. Mm.Black s'empare de ma main en signe de soutien, pour une fois cela semble un acte sincère. Je ne peux l'affronter de peur de fondre en larme devant elle, ce qui me paraît inconcevable. Je ne peux pas me montrer si faible face eux. Elle se reprend, se rasseyant dans sa chaise appuyant un regard des plus sérieux sur moi.

• J'imagine que je dois aussi accomplir ma part de contrat et répondre aux questions que vous m'aviez posées à propos de The Tower, reprit-elle

Surprise, je fronce les sourcils, ce n'était pas du tout prévu. Je venais vider mon sac, donné une histoire croquante, accentuant mon désir flambant de vengeance pour les sectionneurs de The Tower. Je peux à peine souffler qu'elle se lance aussitôt à la poursuite de ses explications. Qu'est-ce qui lui prend de subir autant de risques ? Je n'ose l'interrompre, car il y a deux fins à cela: soit ils me tuent pour en savoir trop soit les portes de la tour s'ouvriront à moi.

• Aucun prisonnier libéré de sa peine n'avouera jamais l'existence des jeux. Pourquoi ? C'est simple chaque personne à sa sortie d'Elario voit une partie de ses souvenirs supprimés. Je ne peux cependant pas vous révéler comment. Cela serait bien trop dangereux.

Quelle bande de putes ! La capitale se permet une manipulation sans limites sur chaque être humain peuplant ce qui reste de la planète bleue.

• Elle ne s'assure ainsi de l'extinction de tout soulèvement de la part des autres clans qui seraient pleinement outrés face à de tels agissements. C'est pour cela qu'aucun habitant de Zaia n'a le droit de quitter le sol de la capitale sans d'autorisations spéciales.

La blonde s'arrête un instant, elle paraît en grand moment de réflexion. Ma psychologue semble tiraillée.

• Il y a une chose importante que vous devez savoir ! s'exclame-t-elle tout en se jetant sur moi qui me trouve à l'autre bout de la table métallique qui nous sépare. S'il venait à ce que vous participiez aux jeux, il n'y a aucune échappatoire. La liberté a un prix exorbitant, elle...!

Une explosion éteint subitement les dernières paroles de sa phrase. La porte de la salle est propulsée ax confins de la pièce et une balle se loge entre les deux yeux de Mm.Black avec une précision effrayante. Mon pouls s'accélère, mon cœur fait plus d'un bond dans sa cage thoracique.

Je me tiens à la table comme une femme à une bouée au bord de la noyade, je bloque un cri strident à l'intérieur de ma gorge. Le corps de ma psychologue s'abat sur le sol. Et vite, trop vite, un escadron de gardes m'agrippent par les bras me traînant à l'extérieur de la pièce. Ils portent tous des combinaisons noires. Je n'ai jamais vu de pareil équipement. Un masque se pose sur mon visage est une fumée froide s'introduit dans mes poumons. L'obscurité se loge dans mes paupières sans que je ne puisse me débattre.

« Une brise chaude vient se faufiler sous mon oreille, une caresse tendre semblable à celle d'une mère. Il trouble mon sommeil. Je me délecte de l'oxygène pur qui m'environne. Les arbres me surplombent, allongée sur mon bout de tissus me servant de nappe, l'herbe engloutit ma silhouette, elle me cache aux yeux des autres.

Sans prévenir, un bonheur immense envahit mon estomac, jusqu'au bout de mes pieds, il coule avec légèreté dans mes veines. Cette sensation est indescriptible. Pour la première fois, je peux le sentir. Je me laisse submerger par ce cadeau. Je souris, oui il se peut bien qu'un mouvement vient de se dessiner sur mes lèvres. Il est authentique.

Je crois que l'on me transporte sur un engin à roulette, probablement un brancard.

Attiré par les rires et les cris de joie qui se jouent, non loin de moi, je me dirige avec entrain vers la source de ses bruits. Il est alors bien difficile de rater les imposantes boucles de Bewen et Eneko tournoyant dans le ciel bleuté. À présent, ils roulent tous deux au sol, insouciant du temps qui passe. Je les observe ébahi devant un film aussi jouissif. Une explosion scintillante de satisfaction et de bonheur retentit dans mes entrailles. C'est une scène si saisissante. Le vent secoue mes cheveux, je détourne les yeux vers le ciel, accompagnant le vent dans sa folle danse. Je me sens à ma place ici. Je ne trouverai un endroit plus convenable.

Mes mains, mes jambes, mes pieds sont paralysés.

Tout d'un coup, je me vacille vers le sol. Bewen vient de me sauter dessus par surprise. Il n'a pas perdu son âme d'enfant. Je rigole de bon cœur. Il est sur moi à califourchon. Il sourit malicieusement et me vole un baiser. Je m'esclaffe à nouveau et le scrute tendrement. Je lui offre ce regard qui saigne de passion ardente. C'est à mon tour de l'embrasser furtivement. Je me sens entraîner dans tourbillon de joie, mes poils se hérissent et le monde s'efface. J'ai cette impression étrange que je suis sur le point de tomber dans le vide alors j'enfonce mes lèvres de plus belles sur les siennes et attrape le col de sa chemise pour me retenir.

Je ne sais pas où ils m'emmènent, mais je ne peux m'y opposer.

Je me sens plus vivante que jamais. Tout mon corps, vibre au rythme du sien. Chaque fois c'est toujours plus fort et plus intense. Ce qui est étonnant après tant de baisers échangés. Mais cela va s'en dire, ce n'est qu'avec lui, personne d'autre que ces émotions se ravivent. À bout de souffle, je m'écarte de son visage et abandonne ma tête contre le sol pour faire face aux nuages. Il s'allonge à côté de moi et ne se prive pas de saisir ma main. Il ne la jamais serré autant fort. J'évite la remarque, car je sais pertinemment pourquoi il réagit de la sorte. Je voudrais tellement passé une éternité couchée auprès de lui plonger dans un monde dont les clefs nous appartiennent. Je me perds en m'aventurant dans cette conquête qu'on appelle l'amour.

« Alors c'est ça d'être heureux ? demande le blond les yeux fermés.

• Je crois que oui, en fin j'imagine que oui.J'aime bien ton rêve.

Il se pose sur le côté et me dévisage tout en jouant avec mes cheveux.

• Mon rêve ? Ce n'est pas le tien ? Ça serait un mensonge de te dire que je n'y ai jamais pensé, mais dans ma tête c'est différent, tu vois.

Vivre ensemble sans personne pour contrer notre lien et notre famille. Avant c'était le but de ma vie, l'écho assaillant ma détermination qui me permettait de me lever chaque matin. Je me suis accrochée à cette idée pendant des années. C'était beau.

Notre vie aurait pu ressembler à ça. Malheureusement nous ne sommes que dans ta tête, reprit Bewen déçu.

J'ai envie de voir son visage et je me penche vers lui.

• Cela semble si réel.Si seulement, murmuré-je

Les bonnes choses finissent toujours par avoir une fin. Nous nous observons une dernière fois, face à face, il ramène ma main contre ma joue et je le suis dans son geste. Un sourire fend son visage.

• Ne m'oublie pas. 
• Comment oublier ? »

Une lumière blanche aveuglante m'inonde le visage. J'essaye tant bien que mal de m'en protéger avec le revers de ma main, mais rien n'y fait. Elle est trop puissante. Subitement, la source s'éteint et je découvre mon nouvel environnement. Surprise, j'examine chaque détail de la pièce. Mais je suis forcé de constater que seul un imposant vide m'enveloppe. Rien ne vient parasiter le blanc brillant qui décore les murs. Un silence imperturbable pèse sur moi. La première idée qui percute mon esprit est l'évasion. C'est évident, je suis une âme indomptable qui se bat pour la liberté. Aucune caméra, aucun laser ne se présente à moi pour barrer ma route.

Mon chois se porte alors à m'avancer prudemment pour tâter ce terrain inconnu. Je me dirige, la main dans le vide pour ne vérifier qu'aucun obstacle invisible ne se tient devant moi. Seulement, un choc électrique puissant s'abat sur moi telle la foudre sur la terre. Une paroi de verre se déploie face à moi et je me retrouve enfermé dans une cage encore une fois. Cela semble interminable. Finirai-je la fin de ma vie barricadée entre quatre murs ? J'ai envie de croire que non, mais tous me laissent songer le contraire.

Ils m'ont sûrement placé dans l'isolement de la section deux. Ne sachant comment contrer une telle situation, je m'allongeai sur le sol ressassent la sensation des mains de Bewen enroulant les miennes. J'ai l'impression d'avoir palpé ses lèvres enivrantes, il n'y a pas quelques secondes. Nos illusions sont là pour nous jouer de mauvais tours. Cet amour est une infection ravageuse qui s'est déjà trop répandue dans mes veines calcinées. Un poison m'affectant malgré le remède que la vie m'a imposé à lui.

Je ne peux accepter le faite que je n'ai cessé d'aimer un homme qui m'a embarqué dans la souffrance de tant de façons dégradantes. Je serai prête à commettre le pire des péchés pour effacer les blessures infligées à mon coeur par cet homme. Avez-vous déjà détesté quelqu'un au point de vouloir sa mort ? Eh bien moi oui. L'amour la haine après tout où se trouve la différence ?

Je culpabilise d'avoir laissé Jayce et Jade mariner en prison sans aucune explication. Après tout ce qu'ils ont fait pour moi, mon comportement à leur égard est affreux sur tous les points. Je me maudis sans cesse pour cela, quelle infâme petite garce prétentieuse suis-je.

Dans un autre recoin de ma tête, il y a Sébastien, sûrement mort à l'heure qu'il est. Je n'ai eu le courage de lui faire confiance ou même de me faire aimer correctement par un homme qui aurait été digne de toutes récompenses. Receleuse du mal ne devinant pouvoir solliciter la félicité. Peu à peu je ressasse, trie, efface, essaye.

Un bruit métallique tinte, un micro vient de s'allumer, une voix s'élève dans le silence tyrannique de la pièce.

« Bienvenue à tous et à toutes aux sélections de « The Tower ».

Les sélections ? Comment ça les sélections ? Mon esprit disjoncte, j'ai du mal comprendre. En conclusion, je ne serai donc ni en isolement ni participante officielle des jeux ?

• Vous êtes 32, aujourd'hui, à avoir eu l'honneur d'être choisis parmi des milliers de détenues de la prison d'Elerio. Vous passerez trois différentes épreuves pour prouver que vous méritez votre place dans le jeu.

Des épreuves ? Je ne comprends pas ! 

• Nous devions être 16 ! Crié-je sans que la voix ne prête attention à moi.
• Nous espérons pour vous une expérience baignée par la chance, mais rappelez-vous, il ne peut avoir qu'un seul gagnant, une unique personne qui atteindra le sommet de la tour vivant. De la mort nous revivrons, du soleil nous naîtrons, de notre force nous nous battrons. Que la force s'imprègne de votre être et prospère jusqu'à votre dernier souffle. »

FIN DE L'ACTE 1