Chapitre 2

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Une année avait passée et le café matinal n’avait pas commencé à refroidir quand les esprits s’échauffèrent un peu plus que d’habitude.

- Non, William. Je ne contacterai pas la police de Chesterfield pour leur indiquer qu’un de leur concitoyen est un violeur et un assassin, déclara le prix Nobel.

- Mais les actes ont été commis à Chicago, il est impossible pour les Britanniques de faire le rapprochement.

- Cessez de m’importuner avec ce genre de choses, les données auxquelles vous avez accès ont été obtenues de manière… pas totalement légale. N’oubliez pas que vous avez signé une clause de confidentialité et je ne voudrais pas qu’on remonte jusqu’à nous, indiqua Nicolai d’un ton ferme, avant de sortir de la pièce.

- Je te comprends, mais nous n’avons pas le choix, dit Élisabeth.

- Ce projet ne mène nulle part, mon contrat sera renégociable dans quelques mois. Je partirai surement.

- Pourquoi ? demanda la scientifique qui en pinçait toujours un peu pour le jeune homme. Il aurait même pu lui plaire s’il n’avait pas été en fauteuil roulant et si son petit ami n’avait pas été un surfeur.

- La leucémie provient de l’altération aléatoire d’une séquence ADN sur les 100 000 milliards de cellules que compte un être humain. Rechercher une seule d’entre elles n’a rien donné. Mes travaux ne pourront à terme que cerner un groupe prédisposé, pas de proposer un traitement et Paul semble aller de moins en moins bien.

Il y eut un moment de silence et Élisabeth se toucha le bout du nez avant de froncer les sourcils.

- J’ai étudié les amibes, les êtres les plus génétiquement simples, car composés d’une seule cellule. Ce que j’ai retenu de cette époque, c’est voir les choses dans leur globalité. De quoi sommes-nous sûrs ?

- Il y a 50 % d’ADN communs entre un homme et un virus.

- D’accord, ce n’est pas brillant ! Dans ce cas, nous pourrions prendre le problème à l’envers. Existe-t-il un gène identique à tous les ADN ?

- À vrai dire, je n’en sais rien, mais cela me changera un peu les idées de faire cette recherche.

William Graham fit le tour de la table à l’aide de son fauteuil roulant ce qui permit de recentrer sa pensée, puis il invita sa collègue à le suivre dans son bureau et de montrer l’écran de son ordinateur.

- Voici l’Intelligence artificielle qu’on nous a fournie et qui cherche l’altération génétique entrainant la leucémie.

Le docteur Raslan fixa la longue ligne de données qui semblait sans fin, avant de hausser les épaules. Le bio-informaticien sourit, puis arrêta ce programme afin d’en créer un autre. Il tapa une liste d’instruction demandant une séquence d’ADN commune aux cent millions d’échantillons dont il avait accès.

- Personne ne possède le même ADN, sauf les vrais jumeaux, fit remarquer Élisabeth.

- Oui, mais non. Tu as raison, mais ce serait une erreur de les exclure, car leurs gènes évoluent différemment au cours de leur vie.

- Autant pour moi. Au fait, ce sera long ?

- Je ne le pense pas, car l’IA va chercher des séquences ADN uniquement communes au trois milliards de nucléotides qui constituent le génome de tous les êtres vivants. C’est par exemple grâce à ces données que la police scientifique de notre beau pays arrête les malfaiteurs… dans les films. Ils comparent les échantillons trouvés sur la scène de crime et l’ADN des suspects. Personne ne sait à quoi correspondent précisément ces chaines génétiques, mais si elles sont les mêmes, la preuve est irréfutable et donc recevable devant un jury.

- Je suis une généticienne et il m’arrive de regarder le TV, dit Élisabeth qui avait la fausse impression qu’on cherchait à la dénigrer.

Après quelques minutes, le résultat apparut sous forme d’un graphique. Si aucune n’était identique, la première se composait de plus de 1 million de gènes, alors que la seconde n’en comptait que 7.

- C’est foutu William. On ne peut même pas partir sur une base commune. Au fait, que représente cette longue chaine ADN ?

- La reproduction ou la respiration, va savoir.

- Peut-être un problème avec les prélèvements ? dit la biologique.

- Attendez, je vérifie, indiqua William avant de commencer ses investigations, puis de s’exprimer d’un air interloqué : Mammouth !

- Pardon ? demanda Élisabeth.

- Lis toi-même, c’est écrit là. Le prélèvement a été réalisé il y a 15 ans sur un spécimen de Sibérie sorti des glaces. Il y en a d’autres… plantes, reptiles, mammifère, toutes les ponctions où la séquence de 1 million de gènes est manquante se situent avant… je ne sais pas… longtemps.

- Un instant, à quelle époque le dernier mammouth a-t-il disparu ? fit remarquer Élisabeth.

- Attends, je regarde sur le Net… 4000 ans.

- Qu’est-ce que cela signifie ?

- Les animaux et végétaux morts ne peuvent plus créer de cellules, ce qui permet de dater quand ils sont décédés. Ma chère, un évènement mystérieux a surement modifié l’ADN de tous les êtres vivants, il y a plus de 4000 ans.

À ces mots et sous l’effet de l’excitation de cette découverte, Élisabeth prit William dans les bras, avant de lui voler un baiser, ce qui ne fut pas pour déplaire au jeune homme. Celle-ci comprenant que le paraplégique ne pourrait jamais la satisfaire se leva un peu honteuse, puis posa une simple question.

- C’est peut-être un désastre naturel, comme pour les dinosaures ? Une sorte de radiation qui aurait affecté l’ADN de la planète entière.

- Peu importe. Au fait, on en parle à Nicolai ? demanda le bio informaticien d’une voix fluette.

- Et bien, cette découverte n’est pas directement liée à la possibilité de guérir Paul, mais elle a eu lieu dans les locaux de la GFA. Dans le doute, je pense que oui.

- Nicolai n’aura pas de second prix Nobel, car nos recherches sont secrètes, mais il pourrait sa faire mousser auprès de la patronne, alors que nous, rien du tout. Il est parti faire son rapport à Chatterton et ne reviendra pas avant demain.

- Moi, il me fait un peu peur. Je ne préfèrerais pas lui faire un coup pareil, dit la généticienne en faisant non de la tête.

- OK, je n’insiste pas. On lui en parlera dès son retour.

- D’accord, indiqua Élisabeth avant de finir de remettre sa blouse.

Le reste de la journée ne fut qu’une suite de banalité, à un détail près : avant de partir, William créa — sans grand espoir — un programme afin que l’IA à sa disposition essaie de déterminer à quoi pouvait correspondre l’ADN composé d’un million de gènes. Il ne savait pas à quel point sa décision allait changer l’humanité.

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