Un bon matin, pendant qu'il revassait, Horace vit Ray l'éléphant, le plus vieux et le plus sage de son royaume se diriger à pas lents vers le sud, seul.

– Où vas-tu bel ami? lui demanda-t-il.

– Je pars vers le cimetière, lui répondit Ray sans s'arrêter ni se retourner.

– Pourquoi faire? tu as perdu un proche?

– Je suis vieux, il est temps pour moi de m’en aller. Pour toujours.

Ce fut le choc pour Horace. Son coeur battait très fort et sa crinière tremblait. Il imaginait son ami allongé au milieu des carcasses et des ossement de ses aïeuls attendant patiemment que la faucheuse l’emporte. Une mort à petit feu, quelle triste fin. Il allait crever lui aussi mais n’avait rien fait ni vécu d’exceptionnel. Il comprenait enfin d'où lui venait ce mal-être. Il fallait qu'il profite de la vie pendant qu'il était encore temps. Sa décision fut aussitôt prise: il allait changer de vie, sinon il finirait comme un vieil éléphant, par mourir d’ennuie.

Horace se sentait au sommet de sa jeunesse et de sa force et il fallait qu'il en profite car il ne peut pas arrêter le temps. Nul ne le peut. Alors que faire et avec qui? il pensa à Saphir, sa femelle. Elle passait son temps à chasser, à s'occuper des lionceaux et surveiller la troupe. Et puis, elle prenait de l'âge et devenait moins svelte qu'avant. Elle était tout sauf l'idéal qu'il s'était déssiné ce soir là.