Théopharne et Jedoké

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La Vroiens, dans le dessein d’aiguiller chaque habitant vers un chemin placide et solide d’un rassemblement amoureux de l’Avenir, était désignée en premier lieu comme « Azur d’horizon », pour le meilleur et pour le pire ! On ne se tracassait pas de leurs venues demeurant comme des esprits inébranlables dans la détermination de leurs fois, la bénédiction de leurs paroles et le sacrement de leur action.

En outre, ces fonctionnaires émergeaient des eaux du fleuve Vivios et usaient des paroles bénies pour séduire. Néanmoins, vu que les paroles équivalaient à des dizaines d’heures d’orations, les présages du destin et de la déesse Frotodéa pouvaient être mal interprétés et donner naissance à de fausses interprétations dans l’éducation personnelle. Cette nuance grisâtre dans le mental que chaque esprit allait façonner selon sa propre personnalité devait encore s’émanciper de tous leurres.

Entièrement efficaces, ils s’enivraient de la vie active des citadins ! En effet, cette organisation s’investissait activement dans la vie des citoyens. Chaque habitant se retrouvait rythmé comme une pendule. Chaque jour, de nouvelles structures organisationnelles émergeaient. Depuis le tumulte inexorable de la fragilité mentale des habitants, menés avec délicatesse, ces derniers ne s'attendaient pas à être mis sous pression de cette manière par la Vroiens, toujours à la poursuite d'amélioration. Ainsi l'avait voulu la Déesse.

Leur dévotion ainsi que leur conscience demeuraient liées à celle de l'humanité ! Pour dynamiser les parcelles d’émotions refoulées dans le désarroi d’une vie jadis sans lueur, ils troquaient leur costume mat de paysan et de commerçant de première Sainte Nitouche, visage fermé et émotions serpentant les temps mauvais, contre un uniforme de travail chatoyant. Ainsi plongés dans l'intimité des préoccupations singulières, avec frivolité et désireux de dépasser les lisières de l’horizon, les fonctionnaires dispensaient une éducation en lien avec les difficultés que les habitants vivaient.

Théopharne faisait partie de cette cohorte filiale à la fois perdue et retrouvée ! Durant son adolescence, il avait été témoin des flagrations intenses d'une vie où l'au-delà faisait partie intégrante de la réalité quotidienne par des meurtres à foison.

Sans prévenir, après les tumultes et un avenir englouti dans un présent dépourvu d'émotions favorables à l'éclosion harmonieuse d'un esprit équilibré, il avait laissé les paroles des fonctionnaires s’engouffrer dans son esprit sans y prêter une attention particulière. Ainsi, Théopharne s'était construite une personnalité complexe façonnée par l'éducation familiale, l'influence de la Vroiens, ainsi que par tous les éléments du quotidien et les mystères éveillant sa curiosité, venant de la Déesse Frodotéa.

Cet homme fraîchement adulte, aux mille sensations et émotions, élancé, avec une touche d’humour au bout des lèvres, ne se préoccupait que d'une seule chose lorsqu'il se promenait sous les fenêtres épaisses de la Vroiens : veiller sur Jedoké, sa petite amie, comme la lueur azur de ses yeux et l’épouser. C'était un rêve immensément mature pour ce jeune de 18 ans, aux yeux bleus scintillant d’amour et aux mille éclats éblouissants, et sa nature faisait de lui un adulte très appréciable à côtoyer.

Sans cesse, il répétait à sa copine : « Jedoké, je voudrais t’aimer jusqu’à ce que mon esprit parcourt les firmaments de ta félicité. Je t’aime du plus profond de mon cœur, et mon âme est entièrement ensorcelé par tes faits et gestes. J’espère que tu ressens la même chose que moi. »

Jedoké lui répondait sans une pointe de plaisanterie, mais avec amour : « Je sais, mon tendre chéri, que tes pensées sont miennes. Mais ne pressens pas trop vite un solide attrait sans penser à notre jeune stade de vie et aux désirs de nos familles ainsi que de la Vroiens.

Les désirs de Théopharne pour sa compagne traduisaient au plus profond de lui l'aspiration de créer une famille avec elle. Jedoké était une jeune femme soudaine, mais son écoute et sa bienveillance lui valaient l'estime de ses pairs.

La passion de Théopharne pour sa compagne pouvait être perçue comme le chemin tout tracé vers les fondements d'un centre incassable d'éducation multiforme. La transmission des valeurs se faisait naturellement à travers des rires et une dose d'amour.

Il lui disait : « Avec le soutien de la déesse, nous vivrons dans un nouvel horizon uni et empli d'un bonheur infrangible. Ne penses-tu pas ? »

Jedoke lui répondait sans une pointe de réalisme: « Veillons à nous comporter bien vis-à-vis de la communauté. Surtout, tu dois songer que nos attentes traduisent des envies différentes. Mais je pense que nous avons comme tâche de nous unir dans l’esprit de Vlotrios et de vivre selon notre croyance en la Déesse, sans oublier la Vroiens, capable d'apporter de la stabilité au sein de la cité. »

Théopharne, impatient, voulait remplir au plus vite ses propres engagements, en dehors des banalités familiales qu'il avait su gérer avec toute son intelligence sociale.

Malgré ses 18 ans, il était prêt à envisager une vie à deux ! Nul besoin du cadre imposé par le roi Valdriek 1er ; avec son éloquence et son talent pour animer, écouter et proposer des idées, ce jeune oisif était déjà heureux.

Les frayeurs du passé n’avaient pas traumatisé Théopharne, même si la Vroiens avait contribué à maintenir un niveau de vilipende retombé. En couple, Théopharne et sa copine incarnaient des valeurs respectables, jamais avares de gentillesse et de dynamisme pour aider leurs prochains. Chacun d'eux exprimait l'amour typique d'un couple de 18 ans, et Frodotéa n'était pas opposée à une union si jeune. Cependant, il fallait encore concilier les avis parfois divergents des familles respectives.

Les prémices de leur réunion furent enrobées d'une nuance subtile de difficulté, car ils émergeaient tout juste des tourments de la guerre, où les sonorités des douleurs et des épreuves retentissaient encore parmi eux. Mais au fil du temps, l’appréhension laissait place à une effervescence jubilatoire de vivre ensemble à nouveau.

A cette époque, Théopharne se trouvait ensorcelé par la vue d'une jeune femme aussi agréable que charmante, et son cœur s'embrasait de désir.

Alors qu’il s'ouvrait aux promesses de l'amour, on ressentait que tous les habitants de la communauté ne diffusaient pas son élan et la même tournure d'esprit. Pour certifier d’une vie ensemble entre les habitants, La Vroiens, dans sa sagesse, veillait à garantir un confort et une assurance minimum, aussi bien pour les célibataires endurcis par les tourments de l'esprit que pour les couples étreints par la timidité et la lassitude et se privaient ainsi du bonheur véritable. Cet accompagnement vers un avenir meilleur en communauté ne laissait personne indifférent, et les efforts de ces fonctionnaires commençaient à porter leurs fruits, ainsi soit-il, et semaient les germes de la transformation et de la réconciliation au sein de la communauté.

La compagne de Théopharne incarnait l'idéal de partenaire au sein du couple : douce, rigoureuse, fière de son temps passé à servir la patrie. Cependant, derrière cette façade se cachait un océan de souffrances psychologiques, la décadence humaine responsable de ses problèmes. La communication avec elle était souvent un défi, car elle se repliait fréquemment dans son monde intérieur. Si les Vroiens avaient contribué à lui redonner goût à une existence paisible et confortable, ils s'étaient bien gardés d'intervenir dans leur relation amoureuse. C'était là une manifestation flagrante des limites de leur influence et reconnaissait humblement que leurs savoirs étaient pâles en rapport aux connaissances profondes de la déesse de la conscience, Frodotéa.

Alors que l'amour pur de Théopharne coulait tel une source limpide, nul ne devait être laissé pour compte. Ainsi, la famille de Théopharne rendait hommage aux Vroiens. Leur contribution financière ne visait pas à amasser des richesses, mais plutôt à honorer la juste valeur des biens échangés. Cependant, cette valeur n'était pas simplement monétaire ; elle résidait dans l'opinion des gens et dans le moral des individus. En effet, plus les Vroiens élargissaient les horizons imaginaires et réels des habitants, plus ces derniers, par leur ingéniosité, propulsaient Vlotrios vers des sommets vertigineux, et contribuaient ainsi à son développement et à son progrès fulgurant.

Sous l'égide des Vroiens, en association étroite avec la Déesse, régnait une atmosphère dépourvue de toute quête mercantile, où les seules idoles vénérées étaient divines. Les notions de richesse et de profit étaient vigoureusement combattues par les autorités. Ils considéraient que la vraie richesse résidait dans la maturité de l'esprit. Ainsi, lors des périodes tumultueuses, la valeur de la cité semblait frôler le néant, mais en période de prospérité, elle étincelait d'une élégance et d'un raffinement rivalisant avec les manifestations les plus extravagantes de l'imagination humaine.

Théopharne contemplait le don d'impôt comme une piété louable. Souvent, il évoquait avec sa compagne les bienfaits de cette contribution et lui exprimait ainsi :

"Jedoké, en cette île divine où nous résidons, je nourris le désir ardent de te combler d'un présent, pour enrichir davantage la splendeur de ta parure déjà si enchanteresse. Je m'en irai récupérer dans les échoppes les pierres précieuses mises de côté, afin de confectionner pour toi une bague ornée de diamants. Ce bijou symbolisera le sommet de mon bonheur, te le remettre, toi, ma plus précieuse possession."

En réponse, Jedoké répliquait avec tendresse : "C'est un privilège immense que de te voir si passionné lorsqu'il s'agit d'imaginer de nouvelles façons de me ravir."

Les Vroiens s'assuraient que les habitants de Vlotrios soient peu enclins à la cupidité et favorisaientt ainsi un climat d'infatigable générosité. Dès lors, les fonctionnaires de la Vroiens étaient souvent désignés sous le deuxième nom ironique de "collecteurs d'impôts".

Ils trouvaient une certaine satisfaction dans leur rôle, car les résidents de la cité offraient volontiers leurs richesses dans un dessein bien précis : conquérir les faveurs de la déesse Frodotéa et bénéficier ainsi d'émotions positives tout au long de l'année. Et le stratagème fonctionnait : au début de chaque année, une vague de joie et d'enthousiasme submergeait la population, enchantée par la vie qu'ils menaient au sein de la cité.

Théopharne éprouvait une grande satisfaction à participer à la grand-messe dédiée à la Déesse, mais comme tous les citadins, il devenait parfois lunatique. Avec le temps, une certaine morosité semblait s'emparer des esprits, sans que personne ne puisse en identifier la cause. Théopharne conjecturait que la Déesse les récompensait temporairement pour leurs contributions, puis les abandonnait pour se tourner vers d'autres cités et apaisait leurs tourments de conscience. Cependant, ce qu'ils ignoraient, c'était le long chemin parcouru au fil des saisons. Ce voyage intérieur avait lentement mais sûrement transformé leurs esprits les plus récalcitrants et les guidait vers un idéal commun de vie en communauté, d'harmonie et de générosité.

Les habitants de Vlotrios faisaient des offrandes d'objets précieux à la Déesse et espéraient ainsi garantir une vie agréable et honorable, ainsi qu'apaiser leurs tourments psychiques.

En dépit des traitements bienveillants dont ils bénéficiaient dans la cité, des idées de peur et d'angoisse les tourmentaient, même dans l'au-delà, car ils n'avaient pas su apprivoiser la Déesse entièrement

Pour leur part, celle-ci demeurait silencieuse face à leurs incessantes supplications et demandes pour une existence meilleure. Les habitants étaient confrontés à de nombreux défis, des ravages des tremblements de terre à leurs propres luttes intérieures et nécessitaient une volonté inébranlable pour surmonter.

La technologie était un allié précieux pour les habitants de Vlotrios. Théopharne avait eu l'occasion de découvrir les avancées technologiques transmises par la Déesse, telles que les Révudo, une ingénierie sophistiquée permettant de solidifier la lave et de la rendre inoffensive pour la population.

Cette technologie consistait à canaliser les jets d'eau provenant de la fontaine de Frodotéa dans des centaines de barils, une solution ingénieuse et efficace.

Bien que ces innovations fussent utilisées à l'occasion, les habitants préféraient souvent s'en remettre à leurs propres ressources et à leur intelligence pour surmonter les difficultés et nourrissaient ainsi leur fierté et leur indépendance.

Les Vroiens avaient également la charge de la santé publique et de l'hygiène. Leur troisième nom, « soigneur des maux » était synonyme de vigilance dans ce domaine. Il remédiait aux soins pour les souffrants mais une boisson dont les maux psychiques étaient encore inobservables faisaient des tempêtes de désespérés.

Cette boisson énergisante aux saveurs vives, imprégnées de substances potentiellement nocives pour le corps et l'esprit humain, représentait une tentation pour ceux qui cherchaient un refuge dans un oasis de plénitude.

Les buveurs de Cervusé se trouvaient envahis par de nouvelles idées et une volonté décuplée et défiaient l'harmonie à laquelle Vlotrios était habitué. Avec le temps, leur nombre ne cessait de croître et suscitaient l'inquiétude des Vroiens quant à d'éventuels désordres.

Mise sur le marché légalement, la Cervusé était très prisée par les jeunes générations, semblant délaisser peu à peu la quête personnelle d'ambition et de connaissance de soi pour élever un nouvel idéal dans leur esprit : celui de la Cervusé.

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