Un voyage en une seule traite : La Conscience versus les idoles
Il partait et déambulait de sa résidence, mieux lotie qu’un terrier, d’un pas fermement souple et décidé, tel une piqure de moustique sur le coin de la joue. Il rassemblait ses affaires dans lesquelles il prenait des vêtements de circonstance, sa boussole et des bricoles, telles que de la Cervusé et sa copine, légère comme une babiole.
Il s’attablait pour la dernière fois avec ses parents. Lui, il mangeait comme un ogre, sa copine comme une mouette et ses parents comme des rois. Tous se retrouvaient baignés dans une félicité exemplaire. Sans dire mot, ils consentaient tous les quatre au périple de ce voyage et rêvaient d’un avenir où les papillons voltigeraient au son de la trompette pour annoncer le retour triomphal de Théopharne.
Avant son départ vers les cieux, ou plus exactement, vers la mère des mères, la Conscience de toutes formes humaines : son débarras intérieur, il comptait bien redécouvrir les goûts d’un peu de Cervusé.
Cette boisson lui procurait autant de satisfactions qu’une valse amoureuse endiablée. Dépendant mais évidemment sûr de son projet, il finissait par quitter ses parents et, en guise d’un adieu ou plutôt un au revoir, il lançait au sol des pédales fruités d’oranges.
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Par delà une vision, une raison et une logique : commune, vacillante et approximative, Théopharne prenait grand soin d’avoir porté l’essentiel. Autant qu’il portât des lunettes et une attention accrue s’il devait faire demi-tour !. Donc, c’était son premier pas vers l’extérieur et l’exigence d’ un fin voyageur inexpérimenté, habile et allant vers l’aventure.
Il n’avait, par ailleurs, aucun soupçon, aucune idée où il aurait pu satisfaire son amour-propre : ces informations cruciales afin accéder au couloir du royaume divin lui manquaient. Car, en effet, il devra sans doute avoir recours à de stratagèmes inadéquats en tant qu’homme pour s’assurer qu’il pût entrer en contact avec la déesse, si bonne était elle : une Conscience, vigueur, force et volonté.
L’incongrue face inconnue de son voyage ne soumettait pas, outre mesure, notre jeune bonhomme à de vives tensions. Il avait vainement dicté, des années auparavant, son souhait de voyager. Si, en plus, il le faisait pour une bonne cause, il n’en demeurait pas moins fier et d’un visage enjolive comme une conquête amoureuse. Pour cela, il avait déjà sa Jédoké, une bonne confidente en soi. D’ailleurs, il lui répétait constamment une fois les préliminaires…du voyage entamé. « Jédoké, mon cœur, je me sens fatigué, Veux tu bien que nous nous reposons, cinq minutes »
Jédoké profitait de ce moment de repos pour dire à son compagnon : « Nous avons quitté le village et si je me réfère à cette ancienne carte, nous allons bientôt atteindre les creux de chemins ardus. »
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Fixant la lettre X sur la carte, ils se trouvaient à mi-chemin de ce lieu, en face. Ils comprenaient toute l’importance que pouvait avoir Frodotéa pour Théopharne. Dès son plus jeune âge, il avait toujours cru aux dieux, pensant que ces divinités faisaient partie de la nature au même titre qu’une colline ou une maison.
Un élément avait fait chavirer son cœur : le nectar de la Cervusé. Même si Jédoké apportait, à sa manière, douceur, compréhension et entrain, rien, pour Théopharne, ne justifiait plus qu'une gorgée de ce nectar, en l'absence d'une alternative. La Cervusé menaçait l’écosystème de son corps et perturbait ses besoins primaires comme uriner. On peut comparer ses effets à une vaste destruction de toute forme de vie, car ce nectar n’apportait ni confiance en soi ni une plus grande estime personnelle.
Cependant, il agissait, bien malgré lui, sur les cellules, les dopant et les revitalisant avec des substances d’envergures plus importantes que la simple stature de Théopharne.
Un traumatisme, une nuée de pensées contradictoires, menaient sa marche confuse et peu persuasive comme un équilibriste sans fil.
Pourtant, les pas portés dans la direction de la déesse lui faisaient du bien. Invétéré des plans soumis à sa logique, quelque peu faiblarde, il se disait : « Je n’y arriverai jamais pourvu que… »
Sa démarche, tellement handicapante pour quelqu’un qui s’était toujours refusé à marcher, s’était trouvée un poids léger au fur et à mesure que Théopharne prenait la peau de l’ours par le dos.
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Un mix de confusion et de bataille contre soi avait raison de sa nonchalance et continuait son voyage, tout penaud, en compagnie de sa copine Jédoké. Il parcourait les sentiers battus et se retrouvait sur les chemins de son devoir afin de mettre la main sur sa volonté, son refus de céder à la tentation et son désir ultime de pencher son profond désarroi en salut libérateur.
Tout en longeant les bords caillouteux de ces voies embellies de végétations verdoyantes, il murmurait à Jédoké son besoin de dénicher un endroit où il aurait pu reposer ses jambes. La force instinctive d’éluder de ses pensées le perchoir de ses tourments se tournait vers Jédoké qui avait ce pouvoir d’accorder à Théopharne, les aptitudes nécessaires à dégoter une contrée, dans ce vaste panorama de verdure, riche en suggestion de l’esprit, afin de mettre les membres inférieurs de Théopharne, dans une plaine luxuriante de facilité.
Il y en avait tant de possibilités qu’il était presque gênant de sonner le glas de Théopharne en lui imposant. Alors, Théopharne, voyant sa chérie prendre place sur un tronc d’arbre déraciné et vieilli par des millénaires d’immobilisme, ne se faisait pas prier et comptait rejoindre sa bien-aimée, juste côte à côte. Ils en profitaient pour faire un point éclairant d’une situation où la maîtrise et le point à atteindre étaient assez loin. Mais, d’une longueur égale à leur détermination, ils auraient bientôt fait d’entrer dans le sanctuaire de la Déesse, Frodotéa où ils ne savaient pas si elle allait leur faire un signe.
Faisant son rituel « divin » d’une manière soigneuse, Théopharne buvait de la Cervusé, seul nectar qu’il appréciait pour sa vigueur, son énergie et son goût. Il avait fini par s’y habituer et tel un saltimbanque projetant des flammes de sa bouche, il émettait un rot aigre et fumeux. Fameux joueur d’harmonica, avec sa bouche serrée, Théopharne profitait de la digestion de son estomac pour entonner une air de musique jovial et entraînant.
Tout en jouant, il faisait signe à sa mie de danser afin de reposer les moments tendus et difficile de la journée de marche jusqu’à présent. Après ce bref moment de complicité entre eux, ils profitaient du coin calme et douillet tel un lit herbeux pour s’endormir à la belle étoile. Voyant le ciel étoilé propagé ses lumières, ils fermaient les yeux et songeaient par de doux rêves à la fabuleuse épopée qu’ils étaient en train de vivre.
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Quelques jours plus tard, ils réussissaient dans leur entreprise. Ils avaient mis les obstacles de côté, surtout, les km de marche : une longue, longue marche du village de Vlotrios jusqu’à cette large cavité creusée, à même, au pied du cratère d’un volcan.
Si ce n’était pas cela l’accès de l’antre, je n’aurais imaginé pareil sculpture. Théopharne doutait en ses capacités de faire croître en lui un geste de courage pour affronter, ce qu’on pouvait logiquement appelé la péninsule de connaissances intérieures, jamais dévoilées au grand jour.
Jédoké et Théopharne se rapprochaient l’un de l’autre et se tenait la main fermement et tangiblement, avec un peu de tracas qui leur parcouraient le corps et l’esprit ntel une énorme décharge de vents avec mouvements brusques et imprévus.
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Ils se mettaient à la recherche d’un signe de vie. Peu importe, la tournure de l’apparition, ils se devaient de déceler une marque de fabrique de la Déesse Frodotéa. Car, la Cervusé avait fini de faire son effet. Et, Théopharne résistait à son appel mais les tentations se faisaient nombreuses et la résistance s’amenuisait.
Ils arrivaient dans une étendue d’eau où quelques dizaines de mètres à l’intérieur, se trouvait une statue représentant la Déesse. Ils l’avaient reconnues par son visage marqué par les signes de sagesse et ses cheveux en bataille où chaque fil de pierre représentait une parcelle de la connaissance humaine.
Ils cherchaient, par des moyens tout rustique, les possibilités qui s’offraient à eux, pour traverser, voyant au loin, la stature de Frodotéa leur incitant de braver la difficulté de l’eau. Au vu de la distance, ils s’imaginaient ramasser des bois étanches et suffisamment rude pour pouvoir nager jusqu’à la terre ferme de l’autre côté. Rien de bien extraordinaire se présentait à eux, si ce n’est que le lac intérieur était en train de virevolter au gré du vent.
C’était Théopharne qui prenait l’initiative et entrainait sa compagne avec lui. En quelques heures et suffisamment reposés, ils dressaient un bateau de fortuné formé de huit planche de bois. Mais ce n’était pas tout, pour arriver à bon port, un gouvernail et un mat avec des bouts de feuilles étaient érigés. Et aussitôt, Théopharne disait à Jédoké : « Bien, voilà, nous pouvons nous hisser à l’intérieur et se faire transporter par les courants. Nous atteindrons notre but. »
Jédoké se mettait sur le bord de l’embarcation et Théopharne dirigeait les manœuvres. Après 10 minutes, ils atteignaient la berge et débarquaient tout en fixant leur regard sur cette statue de Frodotéa où offrande et sacrifice avaient eu cours lors de cérémonies vieux de quelques dizaines d’années.
Ils se rapprochaient tout en scrutant l’horizon. La statue était éclairée par de minuscules petite lucioles et ils voyaient très bien le regard, les bras et buste de la Déesse qui était pour l’occasion à moitié habillée comme de simplets feuillets lui suffisaient pour se couvrir.
Ils ne comprenaient pas toujours les raisons qu’ils les ont poussés hors de leurs tanières. Ils savaient qu’une aide pouvait leur être accordée pour, justement, aider Théopharne à se sortir de la dépendance. Il se sentait fortement oppressé et résistait à la tentation de boire de la Cervusé, ce qui fut une première fois.
Acheminés dans les décombres de Frodotéa, Théopharne et Jédoké se rendaient compte que le but de leur voyage était atteint, avec une pointe de soulagement. Maintenant, ils leur faillaient découvrir la façon dont la Déesse de la Conscience interagissait avec les humains mortels.
Aucun moyen, aucune voix audible ne surnageait de la statue. Bien qu’ils eussent examiné et scruté dans les détails, ils ne trouvaient pas la facilité de converser avec elle.
Théopharne, dépité, disait à Jédoké : « Tout ce chemin n’aura servi à rien. Nous sommes peu avancés même si nous avons marché jusqu’ici. Que faire ? »
Jusqu’ici, ils n’avaient, pour ainsi dire, que débroussailler la vaste statue de Deux mètres de haut. Néanmoins, quelque chose semblait avoir mis le curseur de curiosité de Théopharne en alerte.
Il avait vu d’étranges inscriptions sur le bas et ceux-ci faisaient référence à d’anciens privilèges accordés aux médiateurs de la Déesse. Cette Divinité de la Conscience avait par le passé aidé les hommes dans leur épanouissement personnel. Elle connaissait la totalité de la Conscience et, par ses hautes paroles de sagesse, elle avait éprouvé le sens de la vie que chaque homme et femme recherchaient dans leur longue existence.
Sans plus, Théopharne dictait à Jédoké les gravures, un peu effacées, suivantes : « Quicumque in meum solum ingreditur, cogitationes animi sui scire debet. Dicam igitur. »
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