Les tempêtes ont ceci de commun avec la fatigue

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Les tempêtes ont ceci de commun avec la fatigue, c'est qu'elles suscitent le repos. J'ai dormi autant que j'ai pu, même si dans mon sommeil j'étais resté conscient, malgré moi, pour m'imposer certaines choses. Contrôle de ma respiration, lutte silencieuse et immobile contre la froidure, incertaine élaboration d'un plan. Plein de choses, uniquement pensées pour ma survie. Je n'étais pas bien convaincu de la sévérité de ma position, cependant, une petite voix intérieure me disait de ne pas prendre les choses à la légère. Certes, le réveil m'a trouvé transi de froid, grelottant, mais j'avais l'assurance que ces heures d'inaction n'étaient pas perdues. Si je ne sentais plus mon corps, je savais au fond de moi que j'avais récupéré l'énergie nécessaire pour me sortir du pétrin. Les doigts engourdis et douloureux, je recommençais déjà à vouloir creuser cette terre qui prétendait devenir mon tombeau. La peur de mourir n'est rien, par contre la sensation qu'une ombre rôde autour de soi est autrement plus terrifiante. Cela ressemble à une invitation pour un voyage qu'on n'a pas envie de faire et dont on redoute la destination parce qu'elle sera inconnue et sans retour.

Donc, j'ai gratté la terre. J'ai repoussé les débris, les branches mortes et les pierres les moins lourdes, me réservant les plus imposantes pour plus tard. Le temps passé ne comptait pas, les écorchures supplémentaires non plus. Mon coude était toujours sensible mais j'avais décidé de ne plus le sentir. Je ne parlais pas.  A qui, de toute façon ?
J'avais entamé une lutte à mort contre les éléments sans déclaration inutile. Pas un mot, pas un soupir, pas la moindre trace d'impatience ou de renoncement. J'avais décrété pendant mon sommeil que j'allais sortir de mon trou pestilentiel et que je reprendrais, d'une façon ou d'une autre ma position verticale d'être humain. Ainsi, et à la seule force de mes mains, je parvins à me dégager assez pour bouger mes jambes. Ce ne fut pas simple, ce fut douloureux, pour ça aussi, mais la sensation de mon sang irrigant mes membres me soulagea mieux qu'aucun autre médicament aurait pu faire. Une douce impression de chaleur gagna mes cuisses puis mes mollets. Je m'inquiétai un instant d'avoir les pieds terriblement froids mais, pour me rassurer, je me fis la réflexion que sentir le froid était quand même signe de vie de leur part. Je n'en creusais alors qu'avec une vigueur nouvelle. Convaincu que je toucherais vite au but, je redoublais d'effort, m'exhortant de quelques "Allez, mon gars ! Tu y es presque". Je pouvais maintenant remuer les genoux, presque plier la jambe droite. Je pouvais arrondir un peu mon dos et cela rendait mes efforts moins fatigants et plus efficaces.
J'ignore combien de temps tout cela me prit, mais arriva le moment que je n'avais pas prévu. Celui d'une faim féroce qui me tordit le ventre, brisa mes bras et mes mains, fit tomber mon souffle et ruina vite mon courage. Sans prévenir, mon corps me réclamait, exigeait, plutôt, une forte dose de carburant, comme le moteur de mon camion, en somme. Brusquement, ma tête se mit à tourner, une méchante envie de vomir me crispa le bide, mes mains n'eurent soudain plus la moindre force. Et ma vue se troubla d'un coup. Je fermai les yeux pour arrêter le vertige qui m'assaillait mais c'est à peine si je me rappelle m'être évanoui presque tout de suite après.

Malheureusement, ce malaise imprévisible eut une conséquence qui manqua me tuer, tout simplement. Parce que, à cet instant capital, je déplaçais au-dessus de ma tête une pierre qui devait bien peser une quinzaine de kilos ! Eh oui ! Mon corps me trahissant sans prévenir, celle-ci me tomba directement sur le crâne, m'emportant pour quelques heures, au moins, au pays des rêves !

Cette pierre aurait pu n'être qu'un détail dans la multitudes des emmerdes que je cumulais depuis le début de cette tempête qui n'en finissait pas pour moi.

Mais, ne dit-on pas que le Diable se cache dans les détails ?



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