À ma reconnaissance éternelle

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Je vis avec un syndrome anxio-dépressif, une hypersensibilité marquée et peut-être un TDAH. Ces trois aspects forment une toile complexe, où chaque jour est une lutte pour maintenir un semblant de stabilité.

La dépression, c'est comme une ombre silencieuse qui s'infiltre dans tout. Elle rend les journées lourdes, étouffantes, même lorsque rien, en apparence, ne va mal. Il y a des matins où me lever, affronter le monde ou même juste respirer profondément semble insurmontable.

À cela s'ajoute l'anxiété, cette constante agitation intérieure. C'est comme si mon esprit était toujours en alerte, anticipant le pire, cherchant des solutions à des problèmes qui n'existent peut-être même pas encore. Elle me fait douter de moi, de mes choix, et me pousse parfois à m'épuiser à vouloir tout contrôler.

Mon hypersensibilité, c'est à la fois une force et une faiblesse. Elle me permet de ressentir profondément, de m'investir pleinement dans mon travail et dans mes relations, mais elle me submerge aussi. Les émotions des autres deviennent les miennes, les remarques innocentes peuvent me blesser bien plus qu'elles ne le devraient, et chaque épreuve, même petite, devient une montagne à gravir.

Le TDAH, quant à lui, rend tout encore plus chaotique. Mon esprit fonctionne à cent à l'heure, passant d'une pensée à l'autre sans pause. Je m'éparpille, j'ai du mal à me concentrer sur une tâche à la fois, et souvent, cela me donne le sentiment de ne jamais être "assez". Assez organisée, assez performante, assez présente.

Mon métier dans ce contexte, est un défi immense. J'aime profondément ce que je fais, et il me donne un sens, une raison d'avancer. Mais il est aussi incroyablement exigeant. Je me donne corps et âme pour les autres, parfois jusqu'à l'épuisement, parce que je ressens leurs douleurs, leurs peines, et que je veux les apaiser. Mais il arrive que je n'aie plus rien à donner, car je me suis oubliée dans ce processus.

Chaque journée est une épreuve. La douleur émotionnelle que je ressens, c'est un poids invisible que peu de gens perçoivent. Mais elle est là, dans chaque silence, dans chaque regard que je détourne pour ne pas montrer mes larmes. Il y a des moments où je me sens brisée, où je doute de tout, de ma valeur, de ma capacité à tenir.

Mais malgré tout, je continue. Parce que je veux croire qu'un jour, ça ira mieux. Que cette douleur constante finira par s'apaiser. Que je trouverai des moyens de vivre avec ce que je suis, avec mes forces et mes faiblesses. Et surtout, parce que des personnes comme mes proches, avec qui je peux être sincère, m'aident à tenir.

Ce qui rend tout encore plus difficile, c'est le poids des "on dit". Les gens parlent sans savoir, sans comprendre ce que je traverse, et parfois même sans chercher à le faire. Les remarques qu'ils lancent, souvent sans réfléchir, me percutent comme des flèches. Des phrases comme "elle exagère", "elle est trop sensible", "elle devrait juste se ressaisir" ou encore "elle se complique la vie pour rien" résonnent en boucle dans ma tête.

Ces jugements, ces mots légers pour eux mais lourds pour moi, viennent s'ajouter à la bataille intérieure que je mène déjà chaque jour. Ils me font me remettre en question encore et encore, jusqu'à me demander si c'est moi le problème, si je suis vraiment "trop".

Autrefois, quand j'étais plus jeune, tout ça m'a brisée au point de ne plus voir d'issue. J'ai fait des tas de tentatives pour mettre fin à ma douleur, à ce trop-plein qui me submergeait. Chaque mot, chaque regard de travers, chaque remarque banale prenait une ampleur démesurée dans mon esprit, et je n'avais pas les outils pour y faire face. Tout me percutait, tout me semblait trop. Trop intense, trop injuste, trop lourd à porter.

Aujourd'hui, même si j'ai grandi et appris à mieux me connaître, ces blessures sont encore là. Elles restent à fleur de peau. Chaque remarque injuste, chaque jugement hâtif ouvre une vieille cicatrice. Et ça engendre un cercle vicieux dans ma vie : je me renferme, je m'épuise à essayer de plaire à tout le monde ou de prouver que je mérite d'être respectée, et finalement, je m'oublie.

C'est tellement difficile de vivre en se sentant incompris, constamment jugé ou étiqueté. Ce que je voudrais, c'est qu'on prenne le temps de voir au-delà des apparences, de comprendre que derrière mes failles et mes réactions, il y a une personne qui fait de son mieux avec ce qu'elle a.

J'ai beau essayer d'être forte, de m'accrocher à ce qui me fait avancer, ces "on dit" et ces jugements sont des boulets que je traîne. Parfois, j'aimerais juste que les gens prennent conscience de l'impact de leurs paroles, que les mots qu'ils jugent anodins peuvent résonner dans la tête de quelqu'un pendant des jours, des semaines, voire des années.

Mais malgré tout, je continue de me battre. Pour moi, pour les personnes qui comptent sur moi, et pour cette petite voix en moi qui me dit qu'un jour, je trouverai la paix que je cherche. Ce n'est pas facile, mais j'essaie de transformer cette hypersensibilité, ce TDAH et ce vécu en une force, en quelque chose qui me permet d'apporter de la lumière et du soutien aux autres.

Une autre part de mon histoire, et pas des moindres, c'est l'anorexie. Pendant une période de ma vie, elle a pris le contrôle. Ce n'était pas seulement une obsession pour le poids ou l'apparence, comme beaucoup peuvent le penser. C'était bien plus profond. L'anorexie, pour moi, était une manière de reprendre un semblant de contrôle dans un monde qui me semblait complètement hors de ma portée. Quand tout autour de moi semblait chaotique, incontrôlable, et que mes émotions me submergeaient, la seule chose que je pouvais maîtriser, c'était mon corps.

Je me souviens des regards des autres, entre inquiétude et incompréhension, et des remarques qui, au lieu d'aider, faisaient encore plus mal : "Mange un peu, tu es trop maigre", "Tu fais ça pour attirer l'attention ?" ou encore "Mais pourquoi tu te fais ça ?". Ces mots, censés être bienveillants ou alarmants, m'enfonçaient encore plus. Ils me faisaient sentir encore plus incomprise, encore plus seule. Ce que les gens ne voyaient pas, c'est que ce n'était pas un choix, mais une prison dans laquelle je m'étais enfermée.

L'anorexie m'a volé une partie de moi. Elle m'a épuisée physiquement, mentalement, et émotionnellement. Elle a laissé des marques, visibles et invisibles, sur mon corps et dans mon esprit. Aujourd'hui encore, même si je m'en suis sortie, les séquelles sont là. Les rapports que j'entretiens avec mon corps, avec le regard des autres, restent fragiles.

Cette période de ma vie, pourtant si jeune que j'étais, a amplifié ma douleur, mon hypersensibilité, et mon sentiment de déconnexion avec le monde. Et tout comme mes autres combats, elle m'a appris à quel point les jugements des autres, même involontaires, peuvent être destructeurs. On ne sait jamais ce que quelqu'un traverse, ce qui le pousse à agir de telle ou telle manière.

Mais malgré tout, je suis toujours là. J'ai traversé l'anorexie comme j'ai traversé d'autres épreuves, et même si cela m'a laissée vulnérable, cela m'a aussi rendue plus consciente de mes forces. Chaque jour où je choisis de prendre soin de moi, même un peu, est une petite victoire que je célèbre.

Aujourd'hui, avec tout ce que j'ai traversé, je peux dire que je suis une survivante. Chaque épreuve, chaque moment où j'ai cru que je ne m'en sortirais pas, m'a rendue plus forte. J'ai porté des fardeaux que beaucoup ne pourraient même pas imaginer, mais je suis toujours là, debout. Et ce n'est pas juste "être là", c'est continuer à avancer, à grandir, à me reconstruire.

Je suis fière de la personne que je deviens de jour en jour. J'ai appris à transformer mes blessures en une force incroyable, à tirer des leçons de tout ce que la vie m'a infligé. Certes, ce n'est pas toujours facile. Il y a encore des jours sombres, des moments où je me sens faible ou où mes vieux démons refont surface.
Mais malgré ça, je continue à me relever, à me battre, à choisir la vie. Être fière de moi, ce n'est pas toujours naturel. Pendant longtemps, je n'ai vu que mes failles, mes erreurs, ce que je pensais être des échecs. Mais aujourd'hui, j'apprends à voir mes réussites, aussi petites soient-elles. Chaque pas que je fais vers le mieux-être est une victoire. Chaque jour où je choisis de prendre soin de moi, chaque fois que je fais preuve de patience et de bienveillance envers moi-même, c'est un acte de courage.

J'ai aussi appris à m'aimer différemment. À accepter que je suis hypersensible, que je ressens tout intensément, et que c'est une part de moi qui me rend unique. J'accepte mes failles, mes blessures, mon passé, parce qu'ils font de moi celle que je suis aujourd'hui. Et cette personne, celle que je deviens, je l'aime de plus en plus. Elle est résiliente, courageuse, et pleine de ressources. Elle est capable de transformer la douleur en lumière, la peur en force, et les jugements en une détermination à prouver qu'elle mérite sa place dans ce monde.

Je sais que ce chemin est encore long, que je ne suis pas arrivée à destination. Mais peu importe, car ce qui compte, c'est la progression. Et je suis tellement fière de cette progression.

Ce que je suis aujourd'hui, c'est une version de moi que je n'aurais jamais cru possible autrefois, et pour ça, je suis reconnaissante.

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