Chapitre 9 : La Belle Rencontre (3e partie)
C'est alors qu'on frappa à la porte. Je m'empressai de me laisser glisser dans l'eau chaude, étouffant un cri de frustration. Une femme, visiblement embarrassée de nous déranger, informa Geralt que quelqu'un mandait sa présence nous invitant, lui et moi, à partager le souper. Elle refusa de nous donner son identité. Nous n'avions à priori pas vraiment le choix… Celà déplut fortement à Geralt qui laissa échapper un chapelet de jurons dès la porte fermée.
Je poussai un soupir résigné. A défaut de reprendre là où nous en étions, notre excitation ayant été bien douchée par cette intrusion, je lui proposai de faire le nécessaire pour sa suture à la cuisse. Nous nous séchâmes et il s'installa sur le lit pour que je puisse opérer à mon aise, agenouillée devant lui. Je fis au plus vite tandis qu'il semblait perdu dans ses réflexions quand à l'identité de notre hôte du soir.
Je trouvai dans mes sacoches une tunique verte joliment décolletée et fendue sur les côtés que j'associai avec des braies sombres, pas question d'être entravée par une jupe. C'était agréable de porter des vêtements à ma taille. Par précaution je dissimulai ma serpe dans la ceinture de mes braies, sous ma tunique et mon poignard dans ma botte gauche. Geralt s'était fait prêter des vêtements le temps que les siens soient à nouveau portables. Il se retrouvait donc affublé d'une chemise moulante à l'aspect satiné et de braies noires. Cela mettait en valeur ses muscles qui apparaissaient clairement à l'étroit dans cette tenue pour le moins différente de son style habituel.
Nous suivîmes l'aubergiste jusqu'à une table à l'écart. Les hommes avinés semblaient avoir dépassé le stade de l'ivresse, certains somnolant sur place tandis que d'autres parlaient d'une voix pâteuse sans plus savoir coordonner leurs gestes. Croiser le regard de l'un d'entre-eux me provoqua un frisson de peur et de dégoût incompréhensible. Les nains chantaient à présent les aventures d'un de leurs ancêtres, battant le rythme du refrain à coup de chope sur la table. La famille était partie, probablement pour prendre du repos avant de commencer une nouvelle journée.
Geralt me fit une pression sur la main pour me ramener à l'instant présent. Un homme, d'apparence tout à fait ordinaire était installé à table, visiblement en train d'attendre impatiemment mais il feignit l'indifférence et nous invita à nous asseoir. Geralt l'apostropha sèchement d'une voix où la colère était à peine voilée.
– Nous préférons rester debout. Viens-en aux faits. Qui es-tu et qu'est-ce que tu me veux ?
– Je vous en prie, partagez mon repas, je vous expliquerai en mangeant. Vous êtes bien Geralt de Riv, dit le Loup Blanc, n'est-ce pas ? Me présenterez-vous votre compagne?
– L'identité de qui m'accompagne ne vous regarde pas. Par contre j'aimerais savoir qui vous êtes.
– Qui je suis n'a pas d'importance non plus, contrairement à pour qui je travaille. Je vous invite à nouveau, asseyez-vous.
– En toute franchise, peu m'importe pour qui vous travaillez. Je ne cherche pas de travail actuellement. Merci de votre invitation mais je me dois de la décliner définitivement.
Geralt s'inclina sèchement et fit demi-tour se dirigeant vers le comptoir où était l'aubergiste. Déconcertée je suivais le mouvement quand une main me saisit par la taille. Je poussai un cri de surprise. Et Geralt fit volte-face en jurant, il porta la main au dessus de son épaule et jura de nouveau : il avait omis de prendre son glaive. Il secoua la tête effaré par cette constatation.
C'était le moins saoul des avinés qui m'avait mis la main dessus, me coinçant violemment les bras dans le dos d'une main, me serrant le cou de l'autre de sa grosse main poilue. Son haleine était puante de relents d'alcool et de chou. Il me rota au visage, dévoilant ses dents pourries.
– En voilà une belle prise !
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