~ Chapitre 13.2 ~

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*


Peu avant le début des cours, Zack, rongé par une culpabilité dévorante, s’engage dans un couloir discret du lycée avec Andréas et Noah. Désespéré, il souhaite confesser à son comparse blond que Mickaël Davis l’a manipulé pour piéger leur cousin afin de le passer à tabac. 

Perplexe, le jeune Beckers écarquille ses grands yeux bleus. Il n’en revient pas et dévisage avec dégoût ses deux interlocuteurs. « Que Mickaël déteste Joakim est un fait connu de tous, mais que les deux crétins devant lui participent à un plan pour le faire attaquer lui file la nausée »

Andreas ne se joint pas à la conversation. 

Tout répéter ainsi au blondinet reste l’idée stupide de son binôme et il ne l’approuve pas. « Bien entendu que cela créera ensuite des tensions au sein du Crew… » songe-t-il avec dépit.

— On s’est laissés avoir… marmonne piteusement Zack.

— Tout ça est vraiment naze, souffle Noah avec agacement, mais ça nous permet quand même de réaliser le trublion du Crew.


*


Pendant ce temps, Trisha revient vivement vers son petit ami pour le forcer à s’allonger, car elle le trouve encore assis sur son lit ! « Oh qu’il peut l’énerver, celui-là, alors ! » Elle fronce les sourcils, en colère :

— Sois un peu sérieux ! le gronde-t-elle.

— Mais tu m’emmerdes ! 

— Je t’ai dit de rester couché !

— Pousse-toi ! Je vais chez Miguel.

— Hein ? Mais pourquoi tu irais chez lui ? Je t’ai dit que tu ne déranges personne, ici !

— Parce que tu m’emmerdes et je préfère être chez mon pote que chez une meuf !

— Une… Une meuf ? Accuse amèrement Trisha en faisant un bond en arrière, surprise et choquée.

L’appellation la blesse et elle le déteste de l’avoir nommée ainsi.

— Quoi ? Tu n’en es pas une, peut-être ?

— T’es vraiment trop con, souffle-t-elle en sortant de sa chambre, furieuse.

— Quelque chose ne va pas ? s’étonne sa mère en la voyant traverser le salon en trombe pour se précipiter vers la cuisine.

— Tout va bien, je vais juste déjeuner, lui ment-elle tristement pour réponse.

Agacée, Maya fonce discrètement auprès de Joakim dès qu’elle constate sa progéniture occupée à se préparer son petit déjeuner.

Une fois devant le blessé alité, elle se dépêche de le gronder :

— Oh, toi ! Mais qu’est-ce qu’elle peut bien te trouver, à la fin !

— Hein ? De quoi, encore ? ronchonne celui-ci, boudeur.

— Comporte-toi bien avec ma fille, car sinon ça va très très mal se passer pour toi ! menace Maya en se baissant à son niveau, les sourcils froncés de colère.

Agacée, elle appuie fortement sur ses côtes, aux emplacements de ses contusions. 

— Arrêtez ça, vous êtes folle ! rugit Joakim en repoussant furieusement sa main, ne refaites jamais ça, bordel !

— Ne blesse plus jamais ma fille alors ! Un petit con tel que toi ne la mérite déjà pas, alors ne laisse pas passer ta chance… Minable !

— Mais je n’ai rien fait ! se défend le jeune Bauer, choqué.

— Comporte-toi bien avec elle ou tes parents pourraient être mis au courant de ce qui t’est arrivé hier soir. Si tu vois ce que je veux dire, petit con !

Furieuse, elle sort de la pièce après sa réplique tandis que Joakim se recouche pour se rendormir. Tant pis, il n’ira pas chez son ami aujourd’hui.

En colère contre lui, Trisha ne revient pas à ses côtés après avoir englouti ses céréales. Elle choisit de revoir Friends pour la douzième fois, armée d’un pot de glace familial, douillettement installée devant la télévision, au salon. Sa mère quitte l’appartement peu après pour se rendre à son travail, blasée de la réaliser aussi impactée par un imbécile. « Elle a le chic pour s’enticher des pires, la pauvre… » songe-t-elle.

La jeune fille boudeuse reste ainsi une heure loin de son petit ami, avant de craquer et d’ouvrir doucement la porte de sa chambre pour vérifier son état. Elle soupire de frustration alors qu’elle le constate endormi, car elle souhaitait lui exprimer à nouveau sa colère. De mauvaise humeur, elle retourne donc visionner son feuilleton sans un bruit. « Il ne perd rien pour attendre ! » râle-t-elle très vite auprès d’Amy sur Whatsapp*1. Elle discute désormais avec son binôme en riant devant sa série, tandis que celle-ci lui confirme que son compagnon la prend pour acquise et qu’elle devrait peut-être tenter de le rendre jaloux pour voir sa réaction. La rouquine apprécie l’idée et prépare déjà un plan dont son idiot ne se relèvera pas !


*1 Application mobile multiplateforme qui fournit un système de messagerie instantanée.


*


Quelques heures plus tard, la nuit tombe sur Los Angeles et Noah passe du temps avec son père. Ils s’amusent à mettre quelques paniers avant le diner.

— Tu as une petite mine, fiston. Quelque chose ne va pas ? s’enquit Jeffrey avec inquiétudes.

« S’il devait commencer à se livrer au sujet de ses angoisses et peines, ses proches devraient poser un congé maladie de trois mois pour l’écouter… » songe le blondinet en repensant à l’absence de son meilleur ami en cours, ainsi qu’aux révélations de Zack.

Énervé, il en rate un panier. 

— Ça va avec tes amis ? Et avec ta copine ? s’inquiète son père en analysant son air abattu. Et avec jojo, tout va bien ?

— Oui, oui… tout va bien.

— Tant mieux alors ! Parce que tu ne parles plus beaucoup de lui, ces derniers temps. J’en déduis donc que vous trainez moins ensemble. Alors si tu as besoin de parler…

— Je…

Noah en perd ses mots devant la lucidité d’un père qui rebondit aussitôt face à son mutisme :

— Quoiqu’il se soit passé entre vous, je suis sûr que ça se résoudra. Jojo tient vraiment à toi ! 

— Il m’aime bien, comme on apprécie un membre de sa famille, sans plus… soupire Noah avec dépit.

À quoi bon cacher son désespoir et ses angoisses devant quelqu’un qui le connait mieux que quiconque. Sa gorge se noue et son cœur se serre.

— Qu’est-ce que tu me chantes ? Tu es bien plus que ça pour lui, tu es son meilleur ami ! s’exclame son père avec assurance.

— Non, il est le mien, mais je ne suis pas le sien… lui renvoie Noah, blasé.

— Oh non, je ne sais pas ce qui te fait douter à ce point, mais je suis sûr que tu te trompes. Tu sais, il se peut que la vie éloigne les amis, mais elle finit toujours, d’une façon ou d’une autre, par les ramener l’un vers l’autre. 

— Sauf qu’avec lui, plus le temps passe et plus il s’éloigne. Et ça ne va pas en s’améliorant depuis qu’il sort avec Trisha.

— Trisha ?! s’exclame à nouveau Jeffrey en manquant de s’étouffer. Joakim a une copine ?

— Ouais ! 

— Une vraie de vraie ? Une relation suivie et tout ? Avec une humaine ?

— Ça va faire trois semaines, quasi un mois, qu’ils sont ensemble.

— Oh bordel ! pouffe Jeffrey avant de reprendre avec sérieux. Et pour tes doutes, je reste persuadé que tu n’as pas à t’inquiéter, car tu es très important pour Jojo. 

Noah acquiesce pour faire plaisir à son père, mais, connaissant les doubles vies de son cousin, il ne se sent en rien réconforté par ses beaux discours sur l’amitié indéfectible…


*

Au même moment, dans la maison voisine, Erika Bauer vient de revenir de New York avec son école de danse

Désespérée par sa compétition ratée, elle a couru s’enfermer dans sa chambre pour y pleurer toutes les larmes de son corps.

Masochiste, elle remet sur sa télévision la prestation qui lui a valu sa victoire aux nationales il y a deux ans.

Elle se déteste et meurt de honte quand elle se revoit remporter ce trophée, puis devenir, grâce à lui et petit à petit, l’icône des Watcha Say.

On lui adressait la parole, les yeux brillants d’admiration, après cette victoire, et elle marchait ensuite fièrement, telle une reine, aux côtés de ses camarades Watcha Say, qui la considéraient alors comme l’étoile montante de leur école. Celle que toutes rêvaient d’égaler ! Celle que l’on montrait en exemple ! Elle possédait ce petit statut privilégié… Qu’elle vient de perdre brutalement cette année ! Car Molly Gray le lui a dérobé en s’illustrant à son tour, et à Starquest, en plus ! L’adolescente ne s’en remet pas. Quelle humiliation ! Son estomac en fait des pirouettes et elle s’en mord la main pour s’empêcher de hurler dans toute la maison.


*


Pendant ce temps, Joakim, assis sur le lit de sa rousse, émerge d’une sieste et l’observe se préparer d’un air sceptique : elle vient de terminer son maquillage devant sa coiffeuse, après s’être vêtue d’une robe courte et moulante. Perplexe, il se demande les raisons d’une telle tenue.

— Tu vas quelque part ? questionne-t-il rapidement dans sa direction, tandis qu’elle prend la pose devant son miroir.

— Je vais retrouver Alex, Amy, Noah, Hajer et Aïdan. On va manger dehors, lui répond-elle avec innocence.

— Pardon ? Tu me laisses ici, tout seul ? C’est une blague ? grommelle-t-il aussitôt, choqué.

Il n’en revient pas de son audace, alors qu’il reste chez elle un jour de plus ! « Faites du bien à Martin ; il vous chiera dans la main ! » Songe-t-il avec dégoût. « Déjà qu’il ne l’a quasi pas vue de l’après-midi. Elle exagère ! »

— Tu ne peux pas venir dans ton état, lui sourit-elle tendrement en se rapprochant pour lui déposer un baiser sur le bout des lèvres. Repose-toi bien, je ne tarderais pas !

— Tu sors le grand jeu pour manger avec la bande ! 

Il lui répond avec une moue boudeuse et la regarde marcher de façon sexy jusqu’à la porte de sa chambre. « elle roule du cul, en plus ! »

— Je sors toujours le grand jeu, quoi que je fasse ! réagit-elle avec malice et amusement. 

Elle quitte ensuite la pièce sans un mot et plus, tandis qu’il reste perplexe et perturbé par son attitude.

« Elle a osé le planter là ! » Pour la première fois depuis le début de leur relation, il n’est pas le centre de son existence !

Son iPhone vibre soudain sur la table de nuit. Il prend aussitôt l’appel de sa soeur.

— Papa a dit que tu révises chez un ami… râle-t-elle dès qu’il décroche. 

— Ouaip, je bosse sur un projet de sciences. Pourquoi ?

— Il parait que tu n’as pas regardé Starquest avec eux… et ça m’étonnerait que tu l’aies regardé de ton côté…

— En effet, mais, vu le résultat, ça vaut mieux. Tu ne crois pas ?

— Je… Mais t’es dégueulasse ! Tu m’avais promis…

— Je devais réviser.

— Mon œil, oui, ironise Erika en geignant, tu es méchant, tu m’avais promis…

— Si tu es désespérée parce que tu as été naze, y a pas écrit « bureau des plaintes » sur mon front.

— Quoi ? Non ! Je m’en fous de ces résultats qui mentent ! crache sa cadette avec dégoût en hoquetant entre deux sanglots. Mais toi tu es méchant parce que tout passe toujours avant moi, pour toi !

— Oh la Drama Queen, tu as fini ? Va t’entraîner au lieu de me péter les oreilles, LA Dance Magic approche à grands pas et il ne faudrait pas que tu sois minable à cette compétition-là aussi. Tu vaux mieux que ça.

— M’en fous de la danse, j’en ai marre de tout. Je vaux rien… C’est Molly, maintenant, la reine, et moi, je… je…

— Ferme-la, un peu. Tu es bien meilleure qu’elle, quand tu veux.

— Aux yeux de tout le monde, maintenant, je suis derrière Molly ! Je la déteste, je la déteste ! J’ai envie de quitter les Watcha Say pour leur montrer que je peux être meilleure qu’elle, sans eux !

— Eh bah fais le.

— Sérieusement. ? s’intrigue Erika devant la réaction de son frère, tu penses que, si je postule dans une autre école, je serais prise ?

— Pourquoi pas ?

— Parce que je pensais aux Rolling Deep, s’exclame joyeusement Erika, ragaillardie. Mais c’est une école beaucoup très réputée, alors t’imagines pas le niveau qu’il faut pour passer leur audition ! Je t’en avais parlé à l’époque !

— Tu as tout à gagner et rien à perdre en tentant ta chance.

— C’est sur, mais…

— Bref je dois te laisser, miss gros égo, j’ai du boulot ! Alors, bon vent et va postuler !

— D’accord, à demain ! s’exclame joyeusement l’adolescente.

Joakim conclut sa conversation et se relève du lit de sa petite amie pour s’asseoir devant son bureau afin d’utiliser son laptop.

Il doit effectuer une recherche et efface toutes traces de son passage dès qu’il a terminé…

Dix minutes plus tard et après un certain appel, il sort de la chambre pour se dégourdir les jambes. 

— Le prince se déciderait enfin à quitter l’antre ? le nargue Maya dès qu’elle l’aperçoit entrer dans le salon. Viens t’asseoir !

Il obéit sans attendre et s’installe sur le canapé à ses côtés, devant la télévision qui diffuse sa série préférée. Desperate housewives. Dépité par ce visionnage, il dirige son regard vers le sol, sur le moelleux tapis à longs poils que ses petons déchaussés apprécient beaucoup.

— Au fait, qu’est-ce que tu penses d’Alex ? lui demande soudain son acolyte d’infortune.

Un sourire narquois accompagne sa question et cela ne pas du tout a Joakim, car d’habitude, le maitre du sarcasme, c’est lui.

— Comment ça ? répond-il alors, l’air détaché en apparence. Je ne m’intéresse pas aux hommes, j’aurais pensé que ça paraissait évident.

— Tu laisses ta belle sortir avec un charmant damoiseau qui en pince pour elle ? Poursuis Maya, follement amusée.

Elle souhaite l’inquiéter et le redescendre de son trône.

— Je ne vois pas ce que je crains, soupire Joakim, indifférent.

— C’est dommage que tu ne le voies pas, alors ! Parce que Trisha s’est faite drôlement belle pour sortir, ce soir.

— Elle fait ce qu’elle veut, on n’est pas mariés, grince le jeune homme sur une pointe d’agacement

— Oh, ne t’énerve pas, petit chou ! Je disais ça comme ça, car, bien entendu, un prince tel que toi n’a rien à craindre, voyons ! sourit Maya en s’enfonçant confortablement dans son canapé. 

Elle reprend très vite en promenant son regard dans la pièce :

— Comment tu trouves notre appart ?

— Sympa.

— Mal élevé, va ! La réponse attendue est : oh, madame, la déco de ce salon est juste incroyable ! Ah, ces hommes, il faut tout leur dire !

Joakim esquisse un rictus amusé. Elle n’a pas tort, car cet appartement luxueux qu’elle habite sa fille, n’a rien à envier aux demeures de stars de Santa Monica ou Beverly Hills. « Lui posait-elle sa question pour réconforter un probable complexe d’infériorité ? » Elle qui ignore pourtant l’identité de sa mère dans le monde de la musique…

— Et ce tatouage de tigre, quelle est sa signification ? lui demande-t-elle ensuite, curieuse.

Il n’a aucune réponse glorieuse à lui offrir pour justifier ce que subissait son épaule gauche, il y a trois ans et après une fête d’anniversaire qui rassemblait tout les Drifterz. L’alcool avait coulé à flots ce soir-là et son paternel avait mis six mois à lui pardonner son manque de maturité.

— Pas très bavard, le p’tit père, rit son interlocutrice devant son mutisme.

Il en soupire d’irritation et se relève pour repartir s’allonger, quand elle reprend encore :

— Tu as l’air d’aller mieux, j’ai l’impression que tu as moins mal !

— Ça va, oui. Je rentrerais chez moi demain. Merci pour tout. Souffle-t-il en revenant dans la chambre.

Il se recouche peu après, agacé de penser encore à sa petite amie. L’image de son comparse Alex s’impose sans cesse dans son esprit alors qu’il l’imagine échanger des baisers passionnés avec elle. Une visualisation qui l’ulcère et le dérange, puisque cela ne lui ressemble pas de se sentir aussi frustré pour une femme. Il en hausse finalement les épaules et ferme les yeux pour s’endormir. « Il doit arrêter de songer à une idiote. Ils ne sont pas mariés et il se fiche de cette folle ! »

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