Pour Emy…

2 minutes de lecture

« Décidément

Si toi tu m’entends, du firmament

Je t’aime tant »

Firmaman, Vanessa Paradis

Cours, Marie ! Cours et ne te retourne pas. Les bruits de bottes sont à ta suite, ils se rapprochent.

– Maman !

– Relève-toi vite, ma chérie…

31 mars 2034. Des années de rébellion contre le régime totalitaire en place. Nous étions dissidents, Marie. Nous n’acceptions pas les exécutions arbitraires, les persécutions et autres délits de faciès. Alors, on s’est soulevé, on a rejoint le maquis. Nous ne pouvions pas rester impassibles devant le massacre de nos frères. Il nous fallait lutter, nous battre pour recouvrer la liberté d’exister, le droit de vivre tout simplement. Pour qu’Emily puisse grandir dans un monde qui lui ressemble, malicieux, espiègle, et le regard empli de candeur enfantine.

Faufile-toi là, à droite. Oui, la porte dérobée. Emy est épuisée, la pauvre. Elle n’a que huit ans ; ses petites jambes ne sont faites que pour jouer à touche-touche loup, pas pour fuir des tortionnaires…

– Maman, qu’est-ce qu’on fait ?

– Chut, ma chérie ! On attend ici…

– On attend quoi ?

– Qu’ils renoncent à nous poursuivre…

Trois kilomètres de galeries souterraines. L’obscurité, des lueurs blafardes, du béton brut et des tuyaux partout. Bientôt la lumière, la délivrance au bout du tunnel. Les bottes s’éloignent. Il fait froid.

– Et papa ? Qu’est-ce qu’il va devenir ?

– Je ne sais pas…

Ne pleure pas, Marie. Je n’aurais jamais pu supporter vos supplications, vos souffrances. Ils vous auraient utilisées pour me faire parler. Ma propre douleur, je peux l’endurer. Même au prix de ma vie, je ne lâcherai rien. Pour que notre combat ne soit pas vain, je ne leur livrerai jamais nos frères. Ma mort est inéluctable…

– Pleure pas, maman…

Non, ne pleure pas Marie. Garde au plus profond de toi l’amour que nous avons fait ensemble. Il est le plus pur, le plus précieux des trésors. Et nous l’avons prénommé Emily. Ne regrette rien, darling. On a relevé la tête, on a brisé ces chaînes esclavagistes pour que les millions d’enfants de l’âge de notre fille puissent avoir un jour la chance d’être heureux, de courir dans les flaques quelle que soit la couleur de leur peau.

Sèche tes jolis yeux, ma belle, ceux qui m’ont fait craquer la nuit de notre rencontre. T’en souviens-tu ? La pluie détrempait nos vêtements, mais on s’en foutait. Rien n’aurait pu interrompre notre premier baiser, ni ceux qui ont suivi.

Courage, mes princesses ! Plus que quelques mètres et vous serez dehors. Zack et Chouffa seront là, ils vous conduiront à la frontière. Ne proteste pas, Marie… Tu as suffisamment donné de ta personne, suffisamment perdu. Il est inutile de m’attendre, je suis condamné. Ici, le danger est omniprésent. Il te faut protéger Emy, je te confie son avenir. L’avenir de notre amour…

– Viens ma chérie, la voie est libre.

Libre comme vous bientôt. Les projecteurs, Zack, Chouffa et leurs hommes. Il pleut comme lors de notre première nuit. Il pleut des larmes sur ton somptueux visage… Une brève étreinte, puis la camionnette, le refuge.

– Luigi… murmures-tu dans un souffle.

Ta vue se brouille, la mienne aussi. J’entends la porte de mon cachot s’ouvrir. Il est l’heure je crois. Mes bourreaux sont là. Ils m’enjoignent de les suivre. Je ne reviendrai pas… Embrasse Emy de ma part, serre-la fort dans tes bras si ces maudits cauchemars reviennent la hanter et surtout, surtout Marie, dis-lui tout mon amour. L’amour que j’ai pour elle, et celui que j’ai pour toi. Ne l’oublie jamais, darling ! Non, ne m’oublie jamais…

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Aventador ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0