IV

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Un de ces vendredis, alors que nous revenions d'un de ces repas assez arrosés, nous nous dirigions vers un autre bâtiment de l'entreprise où je n'étais jamais allé.

Je demandais à Christophe ce que nous faisions et celui-ci me répondit :

"Oh, j'ai oublié de te prévenir ce matin ! On a une réunion avec le directeur général pour faire un point sur l'évolution du service info. On fait ça une fois par trimestres, t'inquiètes pas."

Finissait-il par blaguer, un sourire aux lèvres, en voyant déjà l'ennui se dessiner sur mon visage. J'avais prévu de finir un gros segment de mon application cette après-midi, mais visiblement ça devrait être reporté.

Et pour quoi...

Nous arrivions dans une grande salle de réunion aux murs d'un vert clair particulièrement moche. Chacun tirait alors une chaine et s'y installait. Tirant moi-même la première qui venait, je m'essayais et parcourait la longue attablée. Je remarquais que nous nous étions tous installé selon l'ordre hiérarchique et par service.

Tout au bout, devant un mur de fenêtre donnant sur une petite parcelle de pelouse, se trouvait, au milieu, le grand patron, que je voyais pour la première fois, à sa droite Sébastien, et de l'autre côté Cédric, le responsable du support informatique, qui, j'avais remarqué, travaillais beaucoup avec le manager, bien qu'il me semblait qu'ils aient une relation particulière.

Venait après Sébastien, sur le flanc de la table cette fois, Christophe et le responsable du réseaux, puis Morgan, ensuite l'employé réseaux, et enfin moi.

En face de moi, dans le sens inverse, étaient assis les deux jeune du support, les deux employés du service de statistiques, puis leur responsable. Ça ne voulait peut-être rien dire, mais ça ne ressemblait pas tellement à ce que j'appelais une équipe soudée et égalitaire comme voulait me faire croire qu'elle était le manager.

La réunion commença alors. D'abord, le PDG nous présenta l'évolution du chiffre d'affaires du groupe depuis le début de l'année, comparé à celui, à la même époque, de la dernière, nous disant que l'entreprise avait pris quelques bons pourcents de valeur financière. Il félicitait alors le service informatique en entier, disant que c'était en grande partie grâce à notre travail à tous, en se tournant particulièrement vers Sébastien. Ainsi, selon les estimations, l'entreprise devrait faire selon lui plus de 520 Millions de chiffre d'affaire et ainsi battre tous ses records. Pas mal...

Et c'était là le moment le plus intéressant des 3 heures qui suivirent, pour dire à quel point cette réunion fut une perte de temps.

Le manager prit la parole à son tour et procéda lui aussi à féliciter ses équipes, sans qui rien de tout cela ne serait possible, dans une fausse modestie connue de tous les employés qui le connaissaient un peu.

Défilèrent ensuite, devant l'écran sur lequel un rétroprojecteur diffusait des graphiques camemberts et autres atrocités, les différents responsables de service, chacun énonçant les efforts de son équipe afin d'optimiser les process de l'entreprise dans le but d'attiré de nouveaux prospects. Comment la méthode agile, liée à la méthode lean nous permettrait d'être toujours plus rapides et précis dans nos projets. On parlait de Data, de Benchmark, de BtoB, BtoC, de Business Plan allant même jusqu'à dire BP, et on remerciait tous les collaborateurs tous parfaitement opérationnels...

Je ne comprenais pas bien à quoi cela nous servait, à nous les collaborateurs, quel était le but d'une telle réunion si ce n'était de brosser le grand patron avec son beau costume dans le sens du poil. Renforcer notre lien à l'entreprise ? Nous l'aimerions plus et nous travaillerons encore plus à son essor au bout des interminables discours aux termes plus incompréhensibles les uns que les autres ? Finalement ne cachant qu'une chose, qu'on avait bien compris qu'il nous fallait encore poussé le rendement plus loin afin que les gens au bout de la table d'en mette un peu plus dans les poches...

Je luttais avec force pour tenir mes yeux ouverts à la fin de la réunion. Il m'avait semblé que cela avait duré une éternité et étais rassuré que ce genre de choses n'arrive qu'une fois tous les 3 mois, bien que si j'avais pu ne pas y participer, ça aurait été aussi bien.

Nous sortions donc, tous un peu sonnés de ces hypocrisies en chaîne, et nous revenions vers nos bureaux respectifs quand Sébastien, fier comme il l'était toujours, nous dit alors qu'aux vues des appréciations du directeur, nous pouvions partir tout de suite. Il nous invita cependant à venir le soir même dans un bar, certainement pour rire ensemble de ce qui s'était passé... Prétextant une autre invitation, je refusais et rentrais chez moi, dans mon petit cocon silencieux. Je pensais, sur le chemin du retour, que si j'aimais toujours le travail qu'on me demandait de faire, tout ce qu'il y avait autour et qui me paraissait bien futile commençait à m'exaspérer un peu.

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