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J'ai froid. Il faut que je me lève. Théo ? Où est Théo ?
Je me mets debout d'un bond, la tête me tourne et je m'accroche au rebord de la baignoire pour ne pas tomber.
Chez mes parents, oui.
On est vendredi. Non, jeudi ? Vendredi, c'est vendredi. Théo est chez ma mère.
Je m'approche du lavabo et manque de me casser la figure en glissant sur du sang. Il y a du sang sur le carrelage de la salle de bain. Merde, je viens de la nettoyer.
Je me regarde dans le miroir, ça cogne dans ma tête, la douleur est lancinante. C'est mon nez, je pisse le sang, je vais en mettre partout, fait chier !
J'attrape la première serviette qui me passe sous la main et j'essaie de stopper tout ça.
C'est juste le nez. C'est très douloureux mais il n'est pas cassé cette fois.
J'entends la porte d'entrée claquer.
Il faut que je me dépêche de laver tout ce merdier, sinon il ne va pas s'en remettre, comme toujours. Il va se sentir hyper coupable et cela va nous plomber tout le week-end alors qu'on se retrouve tous les deux en amoureux.
Je parviens à arrêter le flux et je ferme la porte de la salle de bain à clés.
Je l'entends grimper les marches lentement. Il entre dans la chambre, à pas de velours, j'entends son cœur battre dans sa poitrine, je sens sa respiration saccadée, je peux même sentir l'odeur de sa peine à travers cette cloison qui nous sépare. Nous ne faisons qu'un, nous nous connaissons parfaitement et nos sentiments sont des brumes épaisses qui transpercent les éléments.
Il appuie sa tête contre la porte de la salle de bain. Je sursaute et recule, réaction épidermique et ridicule, puis pose ma main sur la porte où je sais qu'il ressent ma présence.
Je ne dis rien, car il n'y a rien a dire. Mes mots n'auraient pas de valeur, pas plus qu'une comptine entêtante qu'on serine sans la comprendre.
« Tu vas bien ? Dis-moi que ça va. Ouvre cette porte, tue-moi. »
Des mots vides de sens.
Jamais je ne pourrais vivre dans un monde où il n'est pas. Il le sait, je le sais.
« Je t'aime »
Oui. Il m'aime. Tellement, tellement si fort.
J'approche mon visage de la porte, embrasse le bois froid qui nous sépare, et j'attends, car il n'y a que ça à faire. Je le sais. J'apprends.
J'entends son corps glisser lentement contre la porte, à l'unisson du mien qui réagit instinctivement, miroir de son âme torturée.
Nous restons assis là, un long moment, à écouter la mélancolique mélodie de nos cœurs meurtris.
Puis, après ce moment de communion, nous nous relevons, il sort de la chambre, et je sors de quoi nettoyer tout ça.
Chapitre terminé, il faut changer de disque.
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