36 Parc Maillol - Mocassins 4ème
Mila coupe le contact.
Pas de 308, mais un fourgon vieillissant et Pierre à l’intérieur en train de vider au seau des matériaux dans un big bag [1].
— Bonsoir Pierre
— Bonsoir.
— Vous pouvez me montrer ce que vous avez fait cette semaine ?
Pierre descend du fourgon, prend la direction du mur, le seau de maçon vide à la main. Il s’arrête à l’angle de la maison, laissant Mila examiner par elle-même.
Non plus de couloir creusé entre le mur enduit et le talus. Au contraire l’ensemble est comblé de cailloux gros en bas, plus petits en haut. Cette muraille dépasse de la pente, des bouts de tissus sortent de chaque côté. Devant elle, à ses pieds, la terre a été retournée jusqu’à l’angle de la maison.
Mila sourit, elle regarde Pierre et lui demande :
— Vous pouvez m’expliquer s’il vous plaît ?
— Le géotextile empêchera la terre de remplir les espaces entre les pierres. Mais ça je vous l’ai déjà dit.
— Oui.
— Avant de mettre les pierres, j’ai pris un bout de tuyau à gros diamètre que j’ai trouvé derrière chez vous, et je l’ai mis au fond. Il amènera l’eau dans le coffret d’eaux pluviales.
Il indique la plaque de béton carrée au pied de l’angle de la maison.
— Pour que, si l’eau venait à être très abondante en descendant du talus notamment, le drain ne soit pas trop sollicité. Vous avez une gouttière, là...
Il montre le tuyau vertical dans le coin de la maison.
— Et un coffret d’eaux pluviales en bas. Ça tombait bien.
— Et là vous récupérez au seau les cailloux livrés qu’il reste pour faire place nette.
Pierre ne dit rien, fixant le petit tas restant de cailloux.
— C’est un travail ingrat que vous faites seul, qui plus est. Je vous remercie.
— Semaine prochaine, je finis ici et je serai dans la maison, sur le plafond, il indique l’atelier du menton. Edmond ou moi, on amènera les rails et on les stockera dans la pièce.
— Très bien. J’ai commencé à entreposer des choses dedans. Je les pousserai sur un côté. Par où commencez-vous ?
— N’importe.
Un silence.
— Vous connaissez Edmond Vallone depuis longtemps ?
— …
Pierre ramène le seau dans le fourgon.
Il tire un carton, en sort une couverture bleue et la déplie sur le bord. Il s’assoit dessus et approche la caisse plastique, la rouge. Il en sort un mocassin souple, retire une botte et enfile le mocassin. Il attrape le second mocassin, retire la seconde botte, enfile le second mocassin et secoue les deux bottes l’une contre l’autre.
Il met les bottes dans la caisse, la caisse dans le fourgon, il la pousse au fond contre le siège. Il replie la couverture, la remet dans le carton, il ferme les deux portes et monte à la place du chauffeur.
Et puis s’en va.
Mila pose son livre, éteint la grande lumière du séjour et allume une lampe de chevet dans la vilaine bibliothèque métallique.
Elle se déshabille, enfile un pyjama gris chiné et ses mauvaises chaussettes de tennis coupées à l’élastique. Elle attrape la couette et l’oreiller, emmène tout ça dans le séjour et se love sur le vieux canapé. Elle se couche sur le côté, l’oreiller contre son ventre, enlacé, elle ferme les yeux.
De dehors, la maison laisse échapper ses volutes de fumées claires. Les volets sont ouverts car il n’y a pas de volets. La petite lampe et les flammes de la cheminée diffusent leur lumière dans la maison et sur le sol défoncé devant la vallée.[1] Grand sac à gravats de 1 m3.
Annotations
Versions