3.2 Les risques du métier

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En revenant prendre place à son bureau, le banquier regarda la pendule.

— Le train de Panama est en gare depuis dix minutes… comment se fait-il que le courrier ne soit pas déjà arrivé ?

— Je vais voir, répondit le garçon ; mais ce monsieur, faut-il le faire entrer ?

— Oui, introduisez-le… en descendant, vous remettrez ces fiches à M. Weber et vous le prierez de les classer immédiatement.

Joignant le geste à la parole, il tendit au garçon la liasse de notes apportées par Brad Peterson.

Au bout de quelques instants, un individu qui s’exclamait bruyamment tout en montant l’escalier entra dans le bureau.

Il parut au banquier qui l’examinait par-dessus ses lunettes, passablement agité et de mauvaise humeur.

C’était un grand gaillard, bien bâti, au regard déterminé.

— C’est vous M. Schmidt ? demanda-t-il sans détour.

— Oui, que me voulez-vous ?

— Je veux que vous me rendiez mon argent.

— Votre argent ! s’exclama le banquier, quel argent ?

— Celui que je vous ai confié.

— Mais d’abord, qui êtes-vous ?

— Pedro Alvarez, de Bogota.

Conrad Schmidt sembla chercher dans sa mémoire.

— Ah ! dit-il après quelques secondes, c’est vous qui nous avez expédié vingt-cinq mille dollars la semaine dernière.

— Oui… m’en remettant à vous du soin de les investir dans de bonnes valeurs.

— Eh bien !

— Eh bien ? Voilà ce que vous m’avez envoyé… des obligations que vous avez achetées au poids du vieux papier ! cria-t-il jetant à la face du banquier une liasse de papier qui s’éparpilla sur le plancher.

M. Schmidt demeura impassible.

— On a fait pour le mieux, répondit-il avec sang-froid.

— C’est du vol ! hurla Pedro Alvarez, c’est de l’escroquerie et j’exige mon argent immédiatement !

L’autre haussa les épaules.

— C’est impossible…

— Voleur !

Et bondissant sur Schmidt, pris à l’improviste, il l’empoigna à la gorge avec une telle vigueur que la face du banquier vira au violet.

— Au sec…, voulut crier ce dernier qui étouffait.

Soudain, une détonation retentit.

Les mains nerveuses d’Alvarez lâchèrent prise et il tomba inanimé sur le parquet.

— Il était temps, fit une voix.

Schmidt, affalé dans son fauteuil, incapable de prononcer une parole, cherchait à reprendre sa respiration.

L’homme qui venait de le sauver déposa son revolver encore fumant sur le coin de son bureau, prit dans un placard une bouteille de Porto et remplit un verre qu’il approcha des lèvres du banquier qui réussit à en avaler quelques gouttes avec difficulté.

— Comment ! Vous Johnson ! balbutia-t-il d’une voix éraillée.

— Oui, c’est bien moi… je suis venu à la place du courrier. Mais voyons d’abord si cet énergumène est encore vivant.

— Je n’ai pas la force de me lever, murmura Schmidt.

Johnson s’accroupit à côté du corps qui gisait à moitié sous le bureau. Il constata que la balle était entrée par l’oreille.

Il souleva le bras de la victime qui retomba inerte, avec un bruit sourd, sur le plancher où une tache sombre auréolait sa tête, accentuant par contraste la lividité du visage.

— Il est mort, admit Johnson d’un ton sec.

— Cela vaut mieux, parvint à articuler Schmidt… Il a fini de réclamer.

Johnson appuya sur le bouton de la sonnette.

— Envoyez-moi Ratko, dit-il au garçon.

Au bout de quelques instants, un colosse au crâne rasé, avec une barbe bien taillée, entra dans le bureau.

— Ratko, porte le cadavre de cet abruti dans le cabinet de toilette. Après minuit, tu le déposeras devant une maison de jeu suffisamment loin de la banque.

— Le Continental ?

— Non, pas celle-là, une autre encore plus éloignée, répliqua Schmidt qui avait recouvré la parole.

Lorsque Ratko eut disparu avec le corps, Schmidt se tourna vers son associé.

Y aurait-il eu du nouveau ? demanda-t-il.

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