chapitre 34 

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Le lendemain matin, Mariette la conduisit au premier étage devant la porte de la bibliothèque où elle la fit entrer avant de se retirer aussitôt. D’Eprémesnil était là, assis à sa table de travail. Il se leva à son entrée.

— Bonjour Lisette, dit-il, cette fois encore je vous dois des excuses. Les choses se sont passées de telle sorte que je n’ai pas pu vous accueillir comme je le souhaitais. Êtes-vous bien installée ? Je vois que vous êtes mieux vêtue. Marie-Aurore a-t-elle fait le nécessaire ?

— Oui, répondit Lisette.

 Elle chercha quelque chose à ajouter mais y renonça.

— Très bien, reprit le comte qui n’en attendait pas davantage. Eh bien, dès cet après-midi, je vais rendre visite à Simon Ducoursial. C’est le frère d’un ami de jeunesse, Aristide, qui nous a malheureusement quittés il y a quinze ans. Un homme exceptionnel, un érudit de premier ordre et qui nous manque encore car il avait sur l’art actuel une vision … très personnelle, conclut-il brièvement interrompant une tirade qui aurait parfaitement convenu la veille à un académicien mais qui était là totalement hors de propos : face à lui, il n’y avait que Lisette, les mains croisées derrière le dos comme on le lui avait appris à l’école.

 Elle s’efforçait de l’écouter sagement tout en regardant furtivement autour d’elle et reconnaissait avec bonheur les tableaux, les livres qu’elle avait lus et le bureau où elle avait corrigé les textes du comte. C’était pour cet endroit qu’elle voulait revenir à Paris. Et curieusement ce fut à ce moment qu’elle comprit soudain que les erreurs que le comte avait faites dans ses manuscrits étaient volontaires ! Il avait voulu la retenir ainsi. Cela la toucha : mais elle fut aussi un peu humiliée de ne pas s’en être aperçue et d’avoir été aussi naïve.

Il avait repris avec gentillesse :

— Simon Ducoursial est un peintre de renom et il a un atelier non loin d’ici. Il acceptera certainement de vous y prendre comme élève. Cela vous convient-il ?

— Oui, répondit à nouveau Lisette décidément peu inspirée, elle chercha éperdument quelque chose d’autre à dire en enfonçant ses ongles dans la paume de ses mains et articula d’une toute petite voix :

— Ce sera bien.

 Elle n’avait qu’une envie : en finir au plus vite avec cette conversation à sens unique, rejoindre sa mansarde, retrouver Miscetto et remettre sa vieille robe. Heureusement le comte conclut :

— Ursulette vous y conduira. Vous apporterez avec vous quelques-uns de vos modelages. Je dois vous prévenir dès maintenant que je ne serai pas très disponible dans les jours à venir. Mais Marie-Aurore saura s’occuper de vous. C’est une personne très compétente… Au revoir Lisette, dit-il enfin, abrégeant son supplice.

— Au revoir, dit-elle.

Dans le couloir, elle se reprocha sa timidité. Pourquoi ne lui avait-elle pas demandé la permission d’emprunter un livre ? Elle le ferait la prochaine fois. C’est sûr, la prochaine fois, elle serait moins timide !

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