Chapitre 27

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Eylen regarda Marwen et les chevaliers partir en direction de Toren, le cœur serré par l’angoisse. Elle avait passé la soirée de la veille en compagnie de Yrua, la petite marchande de fleur, avant que celle-ci ne soit raccompagnée jusqu’aux portes de la ville. La fillette lui avait raconté les changements qu’avant subit la ville depuis l’arrivée de l’empereur et la jeune femme n'avait pu s’empêcher de s’inquiéter pour son maître et le prince.

De plus, elle ne pouvait oublier la peur qu’elle avait ressentie lors de son précédent rêve. Une peur qui lui donnait envie de pendre ses jambes à son cou pour fuir le plus loin possible de cette forêt.

N’ayant rien d’autre à faire en attendant les retours des chevaliers, elle décida de se promener aux alentours du campement, espérant ainsi avoir la chance trouver des fleurs de pureté et autres fleurs médicinales. Yrua lui avait expliqué, qu’étant proche de la frontière, ces bois regorgeaient de ces fameuses fleurs emplies d’Energie purificatrice. La fillette lui avait justement décrit une petite cascade aux bords de laquelle elle pourrait en cueillir et ainsi renflouer son stock qui s’amenuisait au fil des mois.

Suivant les indications de la petite marchande, Eylen atteignit rapidement la petite chute d’eau, pas plus haute que la jeune femme, qui se trouvait non loin de leur campement. Le lieu était magnifique, l’eau qui tombait dans un agréable clapotis contre les pierres, traçait une petite rivière s’éloignant dans les fourrées. La végétation qui l’entourait était abondante et verdoyante, laissant apercevoir entre les feuillets, des dizaines de sublimes fleurs d’un bleu azurin pur.

La jeune femme s’approcha du ruisseau et plongea ses doigts dans l’eau froide, appréciant ce contact vivifiant avec un léger sourire. Elle entreprit ensuite de cueillir les précieuses plantes et les rangea dans la besace qu’elle avait pendue à ses épaules.

N’étant pas pressée de retourner de suite au campement rempli de soldats, elle décida ensuite de s’installer confortablement, pour savourer ce moment de tranquillité, se laissant bercer par le doux son de l’eau qui ruisselait contre les pierres.

Un grondement sourd sortit Eylen de ses pensées qui ouvrit les yeux en sentant les gouttes de pluie commencer à tomber du ciel. Les nuages sombres avaient plongé les lieux dans le noir, le vent naissant arrachant les feuilles des arbres. Elle se releva et se couvrant de ses mains, se dépêcha de regagner le campement. Marwen et le prince Aodren risquaient de rentrer bientôt et elle voulait être présente pour les voir revenir.

Elle arriva rapidement au camp, sa robe trempée par l’orage qui s’était abattu sur les lieux où Les soldats étaient affairés à monter la garde à l’abri des arbres et à affûter leurs armes. Elle se précipita dans sa tente pour se protéger de la pluie. C’est alors qu’elle entendit une énorme explosion qui provenait du nord des bois, en direction de Toren. Elle se redressa, parcourut par un long frisson. Marwen ! Seul Marwen aurait pu déclencher un tel vacarme, l’orage n’étant pas encore assez puissant.

La jeune femme se rua hors de sa tente, regardant vers l’origine de l’explosion. Elle attendait qu’un autre son lui parvienne, mais le bruit de la pluie camouflait tout le reste dans un vacarme assourdissant et l’empêchait de voir au loin. Les soldats s’étaient tous redressés, armes en mains et s’étaient mis en position de défense tout autour des tentes, décrivant un grand cercle autour du camp.

Au bout de quelques minutes, qui lui parurent interminables, Eylen aperçut un cavalier qui fonçait droit sur le camp. Il était penché sur sa selle, tenant quelque chose contre lui. Ce n'est que lorsqu’il fut à quelques mètres, qu’Eylen reconnu Marwen, inconscient, à l’avant de la selle du prince Aodren. Le mage était livide, ses yeux fermés et sa tête se balançait mollement à chaque foulée de cheval.

— Assistante, hurla le prince en jetant des regards affolés autour de lui.

Eylen réagit instantanément, se précipitant vers le cheval. Des soldats s’étaient également rapprochés, réceptionnant avec précaution le mage inconscient. La jeune femme les suivit jusque dans la tente de soin, sans prêter attention au prince qui était également descendu de sa monture.

Les hommes allongèrent Marwen sur l’un des lits et s’écartèrent pour laisser passer Eylen.

La robe du mage était maculée de sang et la poignée d’une arme dépassait de son abdomen. Eylen se figea, ayant pendant un bref instant, l’impression de revoir son père, transpercé au ventre par la pointe d’une épée.

Une main lui bouscula l’épaule, la ramenant à la réalité.

— Qu’est-ce que vous faites ! Dépêchez-vous, lui cria Aodren, le visage déformé par l'inquiétude.

Autour d’elle, la plupart des soldats l’observaient tandis que certains tentaient de dévêtir le mage. Un des hommes posa la main sur la poignée de l’arme pour la retirer. Eylen réagit aussitôt, bloquant le geste de soldat.

— Non ! Surtout pas ! Prenez une paire de ciseau et découpez sa tunique ! Ordonna-t-elle sans prendre la peine de les regarder.

Elle s’approcha du visage de Marwen pour sentir son souffle et fut rassurée de sentir un très léger courant d’air traverser les lèvres de l’homme. Elle s’écarta pour laisser les soldats découper les vêtements du mage et découvrit avec horreur la plaie qui se cachait dessous. La lame avait été enfoncée et certainement relevée vers le haut, lui déchirant l’abdomen. Aucun remède ne peut soigner ça, songea Eylen abattue.

Les hommes autour d’elles restèrent immobiles et silencieux, chacun en étant venu à la même conclusion que la jeune femme. Aodren livide, fixait son ami, les yeux exorbités.

Eylen sentit la colère, puis la rage s’emparer d’elle. Non ! Il est hors de question que je laisse mourir ici ! Elle prit une grande inspiration et repoussa les hommes.

— Dehors ! Sortez tous ! Et qu’on ne me dérange pas !

Aodren la regarda ahuri, mais la fixant un instant, dut voir dans l’expression déterminée de la jeune femme qu’elle pouvait faire quelque chose pour son ami et fit signe à ses hommes de sortir. Eylen continua de le fixer silencieusement jusqu’à ce qu’il se décide également à sortir.

Elle posa alors ses mains une sur sa blessure, l’autre sur la poignée de l’arme et ferma les yeux. Tant qu’il respire encore, je peux le faire ! Elle se concentra de toutes ses forces, essaeyant de localiser toute la douleur et la souffrance du mage. Quand elle fut prête, elle commença à attirer vers elle la douleur tout en retirant délicatement la lame. Les battements de cœurs de Marwen s’arrêtèrent un instant tandis qu’elle sentait la plaie se réduire et les tissus déchirés se ressouder. Le sang s’était arrêté de couler et la chair rouge et sanglante s’était rapprochée, formant une longue entaille rouge sur son ventre. Elle retira alors sa main, laissant tel quelle la plaie encore ouverte qui ne ressemblait plus qu’à une légère entaille superficielle. Elle attrapa le baume qui se trouvait sur l’étagère et se dépêcha de l’étaler sur la blessure avant d’y poser un bandage.

Alors qu’elle finissait de nouer le tissu, elle ressentit une vive douleur qui lui poignarda le ventre. Elle étouffa un hoquet de douleur et serra les dents en se redressant. Vite !

Elle sortit rapidement de la tente, se retrouvant nez à nez avec Aodren qui était immobile devant l’entrée.

— Comment va-t-il ? Se précipita-t-il de demander.

— Il va vivre... répondit Eylen en déglutissant difficilement. J'ai besoin de repos maintenant...

— Bien, répondit Aodren en la laissant passer pour aller au chevet du mage.

Eylen accéléra le pas, sentant le sol osciller sous ses pieds et la sueur couler le long de sa nuque. Elle retint sa respiration et plongea la main dans la besace qu’elle avait gardée à l’épaule, attrapant une poignée de fleurs de pureté. Faites que ça marche ... 

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