Chapitre 15 : Sauvés par Glacies

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Shoyo


Nous avions retrouvé mon père, qui était extrêmement soulagé de nous revoir. Nous étions retournés à l'hôtel rejoindre ma mère. Nous étions allés nous coucher après avoir réconforté les petits. J'étais allongé dans le canapé, repensant sans cesse à cette soirée tout au long de la nuit.

° Shoyo ?

– Toujours vivant, répondis-je.

– C'est ma réplique ça… Tu vas bien ? Que s'est-il passé ? Est-ce que…

– Je vais bien. J'ai cru que j'allais perdre Anton et Ico.

– Quoi ? C'est pour ça que tu voulais…

– Me jeter dans les flammes ? Oui, mais ils vont bien. Ils ont été sauvés. Tout va bien.

– Et le bâtiment ?

– Il ne reste plus que quelques miettes. Tout est parti en fumée.

– Ça devait arriver, vu comment ils stockent leurs documents…

– Ce n'était pas vraiment un accident.

– Explique.

– Les guerriers de l'ombre étaient là. Heetar a lancé une bombe sur l'un d'eux et ça a atterri dans le bâtiment.

– Pourquoi je ne suis même pas surpris ?

– C'est ton cousin.

– C'est surtout un idiot.

– D'ailleurs, ils sont tous comme ça dans son clan ?

– Hélas oui.

– Heureusement qu'ils ne t'ont pas élevé. Mais je me demande ce qu'ils voulaient.

– Et je me demande comment c'est possible qu'on puisse se parler comme ça. Encore une question à laquelle nous n'aurons pas de réponse tout de suite. Il va falloir s'y faire. °


Je prenais mon petit-déjeuner avec ma famille lorsque mon père rentra. Je ne l'avais pas entendu partir au matin. Il s'installa avec nous et prit un verre de jus de fruits.

« Alors ? Demanda ma mère.

– Ils ont dit que le feu s'est propagé à cause d'une bougie.

– Mais c'était à cause de Heetar ! Il a jeté une bombe !

– Et c'est un héritier de clan ! Dit mon père avec une fausse joie. Son père a déjà tout couvert !

– Et il y avait les guerriers, remarquai-je.

– Personne à part Heetar et vous ne les a vus. Ils ne veulent rien entendre à leur sujet, ils ne veulent pas non plus reconnaître leur existence.

– Et on ne saura pas pourquoi ils étaient là ?

– Non, comme tout est parti en fumée, on ne sait pas ce qu'il manque. »

On ne pourrait jamais savoir. Mais on pouvait savoir autre chose.

« Les garçons, comment vous êtes sortis du bâtiment ? Demandai-je.

– C'est le guerrier avec l'épée de glace qui nous a trouvés, dit Ico.

– Glacies ? »

C'était pour ça qu'il avait foncé dans le bâtiment ? Je devais savoir ce qu'il s'était passé.

« Raconte tout !

– Depuis quand ? Demanda Anton.

– Depuis que je vous ai laissés seuls.

– Lorsque tu es parti, raconta Ico, on s'est caché sous une table et on a attendu. Et il y a un gros boum et il y a eu beaucoup de fumée.

– Et quelqu'un nous a appelés, reprit Anton. On a cru que c'était toi alors on est sorti. C'était le guerrier à l'épée de glace. Est-ce que c'est toi qui lui a dit comment on s'appelle ?

– Non, je ne lui ai pas dit ton prénom. Comment est-ce que… »

Glacies connaissait le prénom de mon frère et de mon cousin. Comment il pouvait savoir ça ? Avait-il fait des recherches sur nous ? Sur eux ?

« Et vous l'avez suivi ? Questionna ma mère.

– Non, dit Anton, on n'a pas voulu. Mais il nous a parlé. Il nous a dit qu'il allait nous sortir de là mais on n'a pas voulu le suivre.

– Il vous a forcés ? Demanda mon père. Il vous a fait mal ?

– Non, rien de tout ça.

– Comment il a fait alors ? Demanda ma mère.

– Il a retiré son masque ! Dit Ico tout fier. »

Quoi ? Un guerrier de l'ombre sans son masque ? Et les garçons l'avaient vu. ils avaient vu son visage. Ils seraient peut-être en danger.

« Tu aurais dû voir son visage, maman ! Il est trop mignon !

– Mignon ? On parle d'un guerrier de l'ombre là ! Rappelai-je. Pas d'un chaton !

– Non mais il est encore plus mignon que Naje ! Insistait Ico.

– Parce que Naje est mignon maintenant ? Demanda ma mère.

– Je n'aime pas la tournure de cette conversation, dis-je. Peut-on reparler du guerrier ?

– Shoyo a raison, dit mon père. Raconte Ico. »

Merci papa… Je n'avais clairement envie de voir comment aurait pu se finir cette conversation.

« Pourquoi a-t-il retiré le masque ? Demandai-je.

– J'avais peur de lui, alors il l'a fait pour me montrer qu'il était comme moi.

– À quoi il ressemblait ? Demanda mon père.

– Il est blond. Il est assez pâle aussi.

– S'il reste toujours aussi couvert, c'est normal, dit ma mère.

– Et il a des traits bizarres sur ses joues.

– Comment ça ? Demanda mon père.

– Il a une cicatrice du coin de l’œil jusqu'au bas de sa joue, dit-il pointant sa joue droite du doigt, et il en avait une autre de l'autre côté.

– Certainement une scarification culturelle, dit ma mère, une belle bande de barbare.

– C'était bizarre, mais pas autant que ses yeux ! Ils sont trop beaux !

– Comment ils étaient ? Questionnai-je.

– Ils sont jaunes avec un flocon violet !

– Comment ça ?

– Bah il y a un gros flocon violet à la place du rond noir dans l’œil, et le flocon prend plus de place que le rond noir. Ses yeux sont trop beaux !

– C'est impossible, dit ma mère, le manque d'oxygène a dû te faire voir n'importe quoi.

– Il dit la vérité ! Dit Anton.

– Bref, intervient mon père, ce Glacies est un garçon avec des cicatrices aux joues. »

Au moins, j'avais découvert quelque chose.

« J'en suis pas sûr, dit Anton. Ses cheveux étaient tressés et collés à sa tête. Peut-être qu'il est une fille. »

Ce serait trop simple sinon.

« Donc il a retiré le masque, et ensuite ? Questionna mon père.

– On a cherché une sortie, dit Ico, et le sol s'est brisé sous nos pieds.

– Il a réussi à me lancer pour pas que je tombe avec eux, dit Anton. Un autre guerrier m'a rattrapé et m'a fait sortir en sautant d'une fenêtre. Il avait tiré une sorte de corde pour se balancer, ça m'a donné envie de vomir !

– Pourquoi Glacies n'a pas fait pareil ? Demandai-je.

– Parce qu'on était trop lourd à deux.

– D'accord. Ensuite Ico ?

– Je suis tombé à l'étage d'en dessous mais Glacies m'a protégé. Il y avait trop de fumée, alors il m'a mis son casque pour mieux respirer. On a réussi à rejoindre une fenêtre, il m'a pris dans ses bras et il a sauté à travers. Je suis tombé sur lui et j'ai eu peur parce qu'il a mis du temps pour bouger ! Mais il s'est remis à respirer et il a repris son masque. Ensuite, on est allé sur le toit de la caserne. Anton était déjà là.

– L'autre guerrier m'avait déposé là.

– Et il a joué du violon pour nous calmer ! Dit Ico. »

Mes parents soupirèrent. Ils étaient à la fois soulagés et inquiets. Car même s'ils allaient bien, ils avaient vu Glacies. Cela ne pouvait être que dangereux.

« Si tu revois un guerrier de l'ombre, Ico, tu pars te cacher et tu ne vas pas avec l'un d'eux, sous aucun prétexte ! Exigea ma mère. Pareil pour toi Anton !

– Oui, maman. Mais Glacies a des yeux magnifiques ! »

Pourquoi il relançait cette conversation ?


Après tout ça, je sortis prendre l'air. Les guerriers étaient sûrement déjà loin, il n'y avait plus rien à craindre d'eux. Dans les rues, des gens nettoyaient les dégâts de l'incendie et d'autres continuaient leur vie. Je rencontrai à nouveau Astou qui examinait les cendres. Je le rejoignis et nous parlâmes des événements de la veille.

« On n'a pas de chance, me dit-il, on dirait que nous allons croiser les guerriers à chaque fois que nous nous croiserons.

– J'espère pas. C'était assez terrifiant.

– Deux d'entre eux ont vraiment sauvé ton cousin et ton frère ?

– Oui et le guerrier, que je surnomme Glacies, est parti pour rejoindre un chant lointain.

– Tu as entendu ce chant ? S'étonna-t-il.

– Oui.

– Impressionnant, dit-il admiratif.

– Quoi ? Pourquoi c'est impressionnant ?

– Parce que les gens ne peuvent pas l'entendre.

– Mais je l'ai entendu. Et Glacies aussi.

– Et moi également, je tiens ça de ma mère. Seuls quelques uns le peuvent, je ne sais pas s'il y a une raison à ça, ni comment ça se produit.

– Il y a déjà eu des chants comme celui-là ? Que savez-vous dessus ?

– Oui. Ce sont des chants mélodieux, parfois cristallins, qui semblent venir de loin sans perdre de puissance vocale. J'ai cherché d'où ils venaient, mais en vain. Ils ne durent pas assez longtemps pour ça et il y en a un peu partout, donc je suppose que chaque chant a lieu à un endroit différent du précédent. Mais il y en a davantage dans l'hémisphère nord qu'à celui du sud.

– Depuis quand ils sont là ?

– Je ne sais pas, il n'y a pas d'écrits sur eux. Ce n'est pas une chose dont on parle.

– Pourquoi ?

– Entendre des voix n'est jamais bon signe. Même si on est plusieurs. »

Dit comme ça, ça ne pouvait que sonner vrai.

« Vous connaissez d'autres personnes qui peuvent les entendre ?

– Avec Glacies et toi, on est quatre et je suppose cinq. Je ne suis pas certain parce que je n'ai pas pu lui en parler.

– Je suppose que vous avez compté votre mère.

– Ouais.

– Alors qui est le supposé cinquième ?

– Ton coéquipier aux cheveux noirs. C'était quoi son nom déjà ?

– Naje ?

– Oui ! Naje. Quand j'étais avec vous, il y a eu un chant et il s'est tourné vers celui-ci. »

Naje en avait entendu un ? Il m'avait caché ça ! Combien de secrets avait-il encore ?

« Est-ce que ça pourrait être lié aux guerriers de l'ombre ?

– Peut-être que oui, peut-être que non. »

Aurais-je un jour des vraies réponses à mes questions ?

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