Chapitre 17 : Membre des FS
Shoyo
J'étais rentré après quelques jours à la capitale. J'avais passé une semaine d'entraînement à supporter Teny. La deuxième semaine du mois d'Enad avait débuté et Naje n'était toujours pas rentré. Il ne répondait que très brièvement lorsque j'essayais de le contacter.
Mes parents étaient partis pour quelques jours et avaient confié mon frère à mon oncle. J'étais donc tranquille, sur mon lit, lisant une BD-AD à minuit passée.
Cette pièce faite de lambris, plus longue que large, était mon havre de paix. J'avais vu sur mon meuble de rangement pour mes affaires d'école principalement, sur lequel se trouvaient plusieurs vêtements pliés qui attendaient d'être rangés dans mon armoire, qui n'était pourtant pas loin : juste à ma droite. Ce n'était pas urgent tant que ces derniers n'envahissaient pas ma chaise de bureau.
° Shoyo ? °
Je sursautai, lâchant ma BD. Sa voix semblait inquiète.
° Tout va bien ? Demandai-je.
– Oui, enfin je crois.
– Tu crois ? Qu'est-ce qu'il y a ?
– Est-ce que je peux passer ?
– Où es-tu ? °
J'entendis quelqu'un toquer faiblement à mon volet, celui près du bureau. Je compris rapidement que c'était mon coéquipier et je me précipitai pour lui ouvrir. Il se tenait en équilibre sur le rebord de la fenêtre. Je l'attrapai pour lui éviter une chute, l'aidai à entrer et refermai derrière lui. Naje s'effondra au sol, tenant fermement son avant-bras contre lui.
Je l'examinais durant un instant. Il était habillé différemment de d'habitude. Il portait un ensemble noir par dessous une fine armure et une grande écharpe. Son katana était attaché à sa ceinture et son sac à dos était abîmé. Il tremblait, certainement à cause du fait d'être trempé jusqu'aux os. Mais qu'avait-il fait pour se retrouver comme ça ? Quelque chose n'allait vraiment pas.
« Dis moi tout.
– J'ai été attaqué par… Je ne sais pas vraiment ce que c'était…
– Tu es blessé ?
– Au bras.
– Montre. »
Il me laissa voir son bras, remontant sa manche, et évitant de regarder. Il y avait une grosse morsure ressemblant à une faite par un chien ayant plusieurs rangées de dents. C'était profond et ça saignait. Je fis immédiatement pression dessus et le traînai jusqu'à la salle de bain. J'ouvris le robinet et plaçai son bras sous l'eau, nettoyant sa blessure.
« Ce qui t'a attaqué, ça ressemblait à quoi ?
– Une sorte de fauve de trois mètres vaporeux.
– Un démon ?
– Aucune idée…
– Il t'a suivi ?
– Non, je l'ai semé en plongeant dans un fleuve.
– Tu as d'autres blessures ?
– Non.
– Il faut aller à l'hôpital.
– Pas question.
– Naje.
– Shoyo, je refuse d'y aller. »
D'accord. Si je le forçais, il allait certainement s'enfuir. J'attrapai la trousse de soin et désinfectai son bras. Il regardait ailleurs sursauta à chaque fois que la compresse entrait en contact avec sa peau.
« Tes parents ne sont pas là ? Je ne les ressens pas.
– Non, ils sont en déplacement.
– Ils t'ont laissé tout seul ?
– C'est celui qui part en mission en solo qui dit ça ?
– Désolé. Je ne voulais pas te déranger…
– Naje, tu as bien fait. »
Je pris de quoi le recoudre. Je ne remercierais jamais assez mon oncle de son enseignement. Mais je m'arrêtai en reposant les yeux sur son bras. C'était bizarre. La blessure semblait s'être refermée. Sa peau était encore rouge et fragile, mais au moins, le saignement s'était stoppé. Cependant, Naje avait de plus en plus de mal à garder les yeux ouverts.
Cela avait-il un lien avec cette guérison ? Il ne semblait pas avoir remarqué quoi que ce soit. Je bandai la morsure et mis une serviette de bain sur lui.
« J'ai des tas de questions, mais tu vas d'abord te changer et dormir ici. On mettra tout ça au clair demain. »
Il hocha lentement de la têt, semblant près à tomber à chaque mouvement.
J'ouvris le tiroir de mon lit contenant un deuxième matelas et préparai le couchage pour Naje. Ça n'avait pas pris beaucoup de temps, j'avais l'habitude de le faire lorsque mon frère venait pour des soirées jeux.
Naje vint, enfin sec et habillé d'un t-shirt et d'un pantalon de sport que j'avais préparé pour lui. Il déposa quelques unes de ses affaires sur son sac, dans une lenteur non dissimulée et une légère maladresse. Il remarqua la couchette supplémentaire et dit :
« Shoyo, je ne veux pas…
– T'imposer, je sais, le coupai-je. Tu n'es pas en état de repartir. Allonge-toi. »
Il obéit sans plus de discussion. Je me couchai aussi, éteignant la lumière. Le sachant stressé à cause de ce qu'il l'avait attaqué, je créai un dôme autour de nous pour le rassurer. Avec ça, rien ne pouvait l'atteindre et il le savait.
« Merci… »
Il s'endormit en quelques secondes, me permettant de faire de même.
Le dôme était toujours là à mon réveil. Naje dormait toujours alors je l'avais laissé se reposer encore un peu et j'étais allé préparer le petit-déjeuner. Lorsque je ressentis un contact sur la paroi du dôme, je sus que mon invité était réveillé. Je le rejoignis et vis qu'il était debout.
« Tu vas mieux ? Demandai-je.
– Mieux qu'hier, encore désolé. Comment vas-tu ?
– Ça va. »
Je supprimai le dôme et allai examiner Naje. Il n'y avait pas vraiment de changement depuis la veille mais il allait mieux. Il avait repris des couleurs et sa température était acceptable. Je vérifiai son bras et même si sa blessure n'avait pas vraiment changé, je refis un autre bandage.
« Merci. Tu devrais envisager de devenir médecin-sodur plus tard.
– On verra. »
Après avoir pris le petit-déjeuner, nous étions retournés dans ma chambre. Une fois assis l'un en face de l'autre, je posai mes questions.
« Alors, commençai-je, tu as été attaqué par une sorte de fauve vaporeux ?
– C'est ça.
– Comment tu es tombé dessus ?
– Longue histoire…
– Ça tombe bien, le maître a dû s'absenter, nous n'avons pas d'entraînement aujourd'hui. Si tu commençais par pourquoi tu étais parti ?
– Je n'ai pas vraiment le droit d'en parler.
– Naje. Il y a quelque chose qui ne va pas et j'ai besoin de savoir ce que c'est.
– Je suis parti en mission chercher des preuves pour arrêter un sodur-chef, avoua-t-il.
– Pourquoi toi ? Ça a l'air d'une mission très importante.
– Parce que je suis un membre des FS… Murmura-t-il, les yeux fuyants. »
Les Forces Spéciales ? J'écarquillai les yeux. Les FS étaient ceux qui faisaient les missions les plus dangereuses. Personne ne pouvait en devenir un parce qu'il le voulait, il fallait être repéré et approuvé par les FS. Comment Naje avait été recruté ? Il était trop jeune.
« Depuis combien de temps ?
– Ça doit faire cinq ans.
– Quoi tu avais 7 ans au moment où tu as été recruté ? »
Non mais comment c'était possible ? Je savais que Naje était doué et ça depuis toujours mais de là à le recruter en FS à cet âge, il ne fallait pas exagérer. Quelque chose n'allait pas… Et je devais savoir ce que c'était. Immédiatement.
« Dis-moi tout.
– Comment ça tout ?
– Comment tu as été recruté. Je veux tout savoir.
– Je n'ai pas…
– Le droit ? Naje, tu peux me faire confiance. Et je dois savoir, tu m'inquiètes beaucoup. »
Il leva les yeux sur moi et inspira, longuement.
« Est-ce que tu te souviens de l'affaire des enfants disparus dans le pays de Téros ? »
J'en avais entendu parler. Des enfants entre 5 et 8 ans avaient disparu, les uns après les autres. Les recherches avançaient tellement lentement que les parents n'en pouvaient plus. Ils s'étaient réunis pour offrir une récompense à quiconque les retrouvant. L'affaire avait fait le tour de l'empire et avait pris tellement d'ampleur que tout le monde voulait la résoudre. Mes parents avaient eu tellement peur pour mon frère et moi, même si notre pays n'avait pas été touché. Il fallait dire que j'avais l'âge des victimes.
« Oui. Ils ont eu du mal à retrouver les enfants et les coupables.
– Tous leurs plans ont échoué. Et un jour, un groupe de sodur a eu une brillante idée… »
Il disait ça avec un certain dégoût.
« Quelle idée ?
– Utiliser un appât. Il fallait qu'un enfant qui corresponde aux critères relevés soit kidnappé à son tour pour remonter jusqu'aux criminels.
– Et cet enfant…
– C'était moi. »
Ils l'avaient utilisé ?
« Pourquoi toi ?
– Le grand-sodur-chef a entendu parler du plan et l'a approuvé. Cependant, il fallait trouver un enfant qui n'était pas très important.
– Qu'est-ce que tu veux dire par là ?
– Personne ne laisserait son enfant servir d'appât. Il en fallait un dont la perte causerait le moins de problèmes et de préférence, un qui soit dans la formation des sodurs. »
Et quoi de mieux qu'un bâtard pour ça ? Ça me dégoûtait déjà.
« Hagop ne s'est pas opposé ?
– Si, mais personne ne fait face au grand-sodur-chef… »
Grand-sodur-chef ou pas, je sais que mes parents n'auraient jamais accepter ça si cela avait été moi. Comment Hagop avait pu laisser cela se produire ?
« Donc tu as été envoyé là-bas.
– Oui. Je devais simplement faire des choses normales qu'un enfant de 7 ans faisait jusqu'à être attrapé. Un groupe de sodurs étaient supposés me garder à l’œil et s'occuper de moi durant le temps de la mission.
– Laisse-moi deviner : ils ne l'ont pas fait.
– J'ai dû me débrouiller seul pour les tâches quotidiennes. Mais j'espérais quand même qu'ils soient là si j'attirais l'attention du kidnappeur.
– Et ils n'ont pas été là.
– Je n'étais qu'un bâtard pour eux. Me perdre n'était pas grave. »
C'était très grave. Je les haïssais déjà.
« J'ai été enlevé deux semaines après le début de la mission. Quelqu'un m'a attrapé par derrière et assommé. J'ai eu un bleu au visage durant plusieurs jours.
– Ils t'ont retrouvé rapidement ?
– Non. Je doute qu'ils aient réellement remarqué ma disparition.
– Que s'est-il passé ?
– Je me suis réveillé, enfermé dans une petite pièce, dans la cave de la maison du kidnappeur. Les autres victimes étaient dans des pièces différentes. J'y suis resté coincé pendant quelques jours. »
Pas étonnant qu'il ne faisait confiance qu'à peu de monde. Cela avait dû être traumatisant. J'espérais qu'il n'y avait rien eu de grave. Je me sentais mal rien qu'à l'idée de tout ce qui pouvait se passer dans une telle situation.
« Est-ce que ton kidnappeur t'a fait du mal ?
– Non, il ne m'a rien fait. »
Je soupirai de soulagement.
« Comment tu as fait pour sortir de là ? »
– Mon kidnappeur venait une fois par jour donner à manger. J'ai fini par réussi à bloquer la porte en plaçant une équerre que j'avais taillée pour l'occasion. C'est une chance qu'il m'ait laissé mon sac d'école. Il n'a rien remarqué. J'ai attendu qu'il parte et je me suis faufilé. »
À 7 ans, je n'arrivais même pas à me servir correctement de mes couverts et lui, il avait tout simplement réussi à s'enfuir grâce à une équerre. C'était impressionnant, mais il n'aurait jamais dû avoir à faire ça.
« J'ai essayé d'ouvrir les autres portes, mais c'était impossible. Donc je suis monté. Il m'a vu lorsque j'essayais de sortir par la porte d'entrée. Il m'a poursuivi alors j'ai dû m'enfuir par l'étage. Et pour lui échapper, j'ai cassé la première fenêtre que j'ai vue et j'ai sauté.
– Tu t'es blessé ?
– Oui, mais j'ai pu courir pour m'enfuir. Il faisait déjà nuit alors j'ai cru que je n'allais trouver personne et qu'il allait me rattraper. Jusqu'à ce que je percute quelqu'un. C'était un FS. Il m'a protégé du kidnappeur et l'a arrêté. Je l'ai conduit aux autres victimes et grâce à ça, ils ont retrouvé tout le monde, les enfants et les coupables. »
Personne n'avait révélé pourquoi les enfants avaient été enlevés, ni comment ils les avaient retrouvés. Ils n'avaient pas voulu dévoiler cette pratique. Mais ils avaient tous été retrouvés sains et saufs. Et tous les coupables avaient été condamnés. Alors personne n'avait cherché à savoir. Et si les gens avaient su qu'ils avaient utilisé Naje, auraient-ils vraiment réagi ?
« Est-ce que tu sais pourquoi ils faisaient ça ?
– Ils voulaient avoir des esclaves et les enfants sont plus faciles à attraper et à modeler.
– Et après ?
– Ce FS m'a pris sous son aile, m'a recruté et formé.
– Comment ce type a pu faire ça ? Tu étais trop jeune.
– En réalité, c'était une femme et elle était assez convaincante. »
Naje avait un regard triste. Ce FS semblait être cher à son cœur alors qu'il l'avait impliqué dans quelque chose de très dangereux. Je ne pouvais pas accepter ça. Je bouillonnai de rage.
« Donc parce qu'elle était assez convaincante, tu as été envoyé faire des missions dangereuses ?
– En quelque sorte. Mais elle s'est assurée de ma protection. Je l'ai accompagnée à la plupart de ses missions, elle a surveillé et suivi les miennes.
– Je vais la tuer, crachai-je.
– Ce n'est pas nécessaire. Elle est décédée il y a deux ans. »
Je comprenais un peu mieux la tristesse, mais je ne pouvais toujours pas accepter ça. Cependant, je devais faire preuve d'un peu de compassion. Elle semblait très importante
« Comment elle s'appelait ? Demandai-je.
– Je ne sais pas. Elle n'a jamais dévoilé son nom, ni son visage.
– Comment tu faisais alors ?
– J'utilisais son nom de code, c'était Baleset. Et je la reconnaissais grâce à son émofa. »
Il parlait avec un certain attachement envers elle. C'était un peu normal. Cette Baleset l'avait sauvé et avait été son premier maître. Mais cela semblait plus profond que ça ne devrait l'être.
« Tu l'aimes, compris-je.
– Est-ce que c'est vraiment surprenant ? Demanda Naje.
– Oui ! Tu ne devrais pas à aimer quelqu'un qui t'a mis en danger ! »
Naje laissa apparaître un sourire.
« Shoyo… Maître Baleset m'a appris tout ce que je sais. Elle m'a protégé. Elle ne m'a pas laissé tomber comme tous les autres. Et elle s'est occupée de moi bien mieux et bien plus que ne l'a fait Hagop. Elle était ce que j'avais de plus proche d'une mère. »
J'hallucinai. Pour lui, c'était un maître FS qui ne lui avait jamais donné son nom, ni montré son visage, qui détenait cette place ? À quel point Hagop l'avait-il négligé pour qu'il voit une figure parentale en elle ? À quel point s'était-il senti seul pour ça ?
« Naje… Une maman ne…
– Je t'arrête tout de suite, me stoppa-t-il. Elle a pris soin de moi et s'est assurée que j'allais bien, mais elle m'a aussi traumatisé et balancé dans l'eau glacée. Elle n'était pas ma mère, certainement pas. Mais je l'aime quand même.
– Et pourquoi elle a fait tout ça ? Elle n'a pas pu faire tout ça juste parce que tu étais doué !
– Elle avait ses avantages, je ne te le cache pas. Et elle m'aurait tué elle-même si j'avais fait n'importe quoi.
– Alors pourquoi ?
– Parce qu'elle, elle était là. »
Je me levai et marchai en rond, essayant de me calmer. Naje resta assis et me suivait du regard.
« Shoyo ?
– Ils n'auraient jamais dû te faire ça !
– M'envoyer à cette mission ou faire de moi un FS ?
– Les deux ! Criai-je. Tu n'avais que 7 ans !
– Je sais.
– Et Hagop n'aurait jamais dû te laisser faire ça !
– Il n'est pas au courant.
– Quoi ? M'étonnai-je. Il ne sait pas ?!
– L'identité d'un FS est secret, même pour la famille.
– Et tu dis ça comme si tout était normal ! Hagop aurait dû être là pour toi ! Il aurait dû te protéger ! Tu n'aurais jamais dû faire tout ça !
– Je sais, mais Shoyo, je vais bien. Et j'ai eu une jolie pièce en récompense. »
Sa pièce de mérite ? Il l'avait eue comme ça. Évidemment… Je m'énervai encore plus. Naje vint vers moi, attrapa mon bras et me força à le regarder.
« Shoyo. Je suis là et je vais bien.
– C'est pour ça que tu disparaissais tout le temps. Tu partais en mission en tant que FS ! Pourquoi être devenu FS ? Tu aurais pu refuser. Tu aurais dû refuser ! Après avoir vécu ça, tu n'aurais jamais dû vouloir devenir sodur ! Ils t'ont utilisé sans se préoccuper de ta vie !
– Je sais. Mais qu'est-ce que j'aurais pu faire ? Au cas où tu l'aurais oublié : je suis un bâtard. On m'aurait empêché de réussir tout ce que je voulais faire. Maître Baleset m'a donné une opportunité. Grâce à elle, j'ai un métier qui me permet de vivre. Elle m'a donné un avenir. Et je fais des choses importantes. J'ai aidé à sauver ces enfants. Et à ma dernière mission, j'ai aidé à sauver une petite fille. Et grâce à ça, j'ai eu des informations sur ton grand-père. »
Quoi ? Je me calmai en une seconde. Il avait trouvé quelque chose ?
« Je n'ai pas pu te ramener un dossier, mais j'ai une bonne mémoire. Si tu veux bien écouter. »
Je repris ma place et lui aussi.
« Tu sais que ton grand-père n'avait pas d'émofa ?
– Oui, on ne sait pas pourquoi cependant. Les médecins disaient que c'était comme une malformation formée dans l'utérus.
– Oui, j'ai vu ça dans le dossier. Mais c'est parce qu'il n'en avait pas que le test de détection de techniques est revenu négatif. Il n'y a pas de truquage.
– Alors mes techniques ne viennent pas de lui.
– Peut-être que si. Peut-être qu'il les avait en lui mais qu'elles étaient indétectables à cause de l'absence d'émofa. »
Naje fit une pause.
« Dans tous les cas, ce n'est pas ça le plus inquiétant. Ton grand-père a été abandonné par des personnes qui l'aimaient et qui ne l'ont pas laissé seul.
– Ils l'ont abandonné, ils l'ont laissé seul.
– En fait non. Quelqu'un veillait sur lui.
– Comment tu peux savoir ça ?
– Il était très malade et avait besoin de soin médicaux très onéreux pour vivre un peu plus longtemps et dans de meilleures conditions. Et chacun d'eux a été entièrement payé par des dons anonymes. Tout comme ses études et celles de ses enfants.
– Mais mon père disait qu'il avait travaillé pour ça…
– Avec ses problèmes de santé, il ne pouvait pas faire grand chose, sans vouloir être méchant. Pourtant, il a pu vivre confortablement et ton oncle a fait des études de médecine sans avoir besoin d'un prêt. Réfléchis, est-ce que l'argent a été un problème dans ta famille ?
– Non… »
On aurait dû en avoir. Mon grand-père n'aurait jamais pu payer une maison et les études de mon oncle et de mon père. Sans oublier qu'il était mort alors que ses enfants étaient très jeunes.
« Mais on n'a jamais été très riche non plus, ajoutai-je.
– C'est vrai. Vous avez eu assez pour vous en sortir et pas assez pour attirer l'attention. Ça sonne trop parfait pour être un hasard. »
Naje était sérieux. Et il avait toujours eu une bonne intuition jusque là alors je savais qu'il avait mis le doigt sur quelque chose.
« Tu penses que ma famille est en danger ?
– Je n'en sais rien. Je n'ai pas encore assez d'informations pour ça. Mais je sais qu'il y a une lettre que ton grand-père avait avec lui lorsqu'il a été trouvé, mais que personne n'a su la traduire. Il y a peut-être des réponses dedans. »
Ça semblait impossible. J'étais inquiet, pour ma famille mais aussi pour lui. Peut-être qu'il s'était mis en danger en fouinant.
« Est-ce que la créature t'a attaqué à cause de ça ?
– Non, je suis tombé dessus par hasard en revenant. »
Alors ce n'était qu'un coup de la malchance ?
« Par contre, ajouta-t-il en hésitant, j'ai quelque chose dont je dois te parler. »
J'avais peur de ce qu'il allait dire. Plusieurs mauvais scénarios me traversèrent l'esprit.
« Qu'est-ce que c'est ? Demandai-je.
– J'ai passé un marché avec les guerriers de l'ombre et je vais avoir besoin de ton aide. »
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