Une Myriade de Reflets
Brett ouvre les yeux. Il sent le contact froid d’un carrelage glacé. La lumière l’éblouit. Après quelques instants, sa vision s’est adapté pour voir où il se trouvait. Il s’agissait d’une pièce étincelante, où son reflet se multipliait à l’infini. Tous les murs, le plafond ainsi que le sol, étaient recouverts de miroirs fait avec une minutie si attentive qu’ils en étaient presque invisibles.
Soudain, une voix grondante et caverneuse retenti dans l’atmosphère paisible de la chambre :
« M’entendez-vous ?
Le jeune homme fut un instant déboussolé. Il se sentait totalement instable, comme s’il n’avait pas la force de tenir debout. La sensation passe au bout de quelques instants. La voix se fait plus insistante:
— M’entendez-vous !?
— Ouais ouais pas la peine de hurler non plus.
— Bien. Vous voilà maintenant plongé dans un rêve. Nous allons pouvoir arracher les racines de votre phobie. Vous vous trouvez dans une salle remplie de miroirs n’est-ce pas ?
— Oui.
— Est-ce que vous pouvez vous retournez et décrire ce que vous voyez au centre de la pièce.
— Seulement si vous me faites sortir de ce merdier après.
— C’est pour votre propre bien que je fais tout cela.
— Ils disent tous cela.
— Peu importe, qu’est-ce qu’il y a au centre de la pièce ?
— Je regar… »
Brett ne parvint pas à terminer sa phrase. Il est comme tétanisé. Un immense brasier allant presque jusqu’en haut de la salle brûle sans le moindre crépitement, comme un prédateur silencieux s’apprêtant à se jeter sur sa proie. Les flammes ondulent et lèchent les parois les plus proches du foyer. Elles recouvrent une myriade de Brett qui risque à tout instant d’être engloutie.
« Il y a des flammes n’est-ce pas ?
— Ou-oui.
— Entrez dedans.
— Quoi !
— Vous êtes dans un rêve, rien de fâcheux ne vous arrivera.
— Je-je ne peux pas.
— Il le faut.
— Pourquoi ?
— Vous n’avez pas peur des flammes véritablement. Vous craignez ce qu’elles pourraient libérer en vous. Voilà pourquoi vous évitez les miroirs. Vous avez peur qu’en le regardant il révèle ce qu’il y a en vous, au sein même de votre chair. C’est en entrant dans les flammes que vous allez pouvoir voir ce qui vous fait si peur.
— Vous êtes totalement taré.
— Oui, exactement. Maintenant, entrez dans les flammes.
— Je n’y arrive pas.
— Vous avez promis d’obéir à toutes mes consignes, même celles qui exigent un grand sacrifice. Alors, sur votre promesse, j’exige que vous rentriez dans ces flammes.
— Je peux même pas m’approcher !
— JE L’EXIGE ! Hurle la voix. »
Un des murs se fissure sous la terrible intonation de la voix. L’Épouvantail esquisse un mouvement de recul. Craignant la colère d’Equinoir, il se décide à affronter sa peur. Il déglutit, puis avance peu à peu près du brasier. Sa main se tend doucement vers les flammes voulant l’engloutir. Presque en sanglotant, il s’élance dans l’incendie. Il ne ressentit qu’un immense froid sur toute sa peau.
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