Chapitre 4 ~ My brain in turnin’ and my head is hurtin’ everyday a little more

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Une semaine. Depuis une semaine, ce carnet est posé sur la table au milieu de mon salon. Depuis qu'il y est, je n'y ai pas touché. Je me contente de l'observer. Les seuls mots que j'ai lus sont ceux écrits sur sa couverture et au dos du journal.

"Cher journal..."

"Almia Fersetta"

Je n'ose pas l'effleurer, encore moins le lire. Et pourtant, ce n'est pas la curiosité qui manque. J'ai enfin la source d'informations dont j’ai besoin. Pourtant quelque chose me retient. Et ce cahier qui continue de me hanter... Chaque nuit je le vois, j'en fais des insomnies, mais je ne peux y toucher. C'est presque comme si, mentalement, j'avais besoin de sa permission. Quelle absurdité. Et pourtant, depuis une semaine, je me cache à l'arrière de la boulangerie à midi, que je prends systématiquement le bus qui précède le sien, et surtout qu'elle ne quitte plus mes pensées.

Il est approximativement cinq heures du matin. Il serait peut-être temps de me lever, vivre ce jour comme je l'aurais vécu il y a quelques mois, retourner dans cette boulangerie où on me reproche mon étourderie depuis une semaine. S'ils savaient… Non, Sam, ressaisis-toi ! Il faut au moins que j'essaie. Et puis, il faut dire que ça m'a manqué, ces trajets en bus avec, à quelques mètres devant moi, cette femme ne soupçonnant pas le moins du monde ma présence.
Je me prépare donc avec entrain à affronter cette nouvelle journée. À 8 heures pile, je trépigne d'impatience à l'arrêt de bus. Je tente de prendre une attitude normale à l'approche d'Almia.

Notre transport arrive. Elle se dirige, tel un automate, vers une place au fond du bus. Je m'assieds derrière elle. Pouvoir voir sans être vu. Une chose qui est devenue pour moi presque un réflexe. Je me plonge dans la contemplation de la jeune femme. Ses oreilles, dans lesquelles sont plongés des écouteurs, sont cachées par sa longue chevelure brune. De dos, on ne voit rien de plus, mais je la connais si bien que j'arrive à imaginer, comme si elle était en face de moi, les traits fins composant son visage, ses grands yeux verts, ses lèvres pulpeuses et ses pommettes assez hautes. Je pose ma tête contre la vitre et, ainsi incliné, je peux encore une fois découvrir la finesse de sa taille de guêpe. Les talons qu’elle porte allongent quant à eux encore ses jambes qui n’en finissent plus ; mais assise dans un coin, comme nous le sommes, sa beauté paraît presque inaperçue.

Lorsque nous nous arrêtons enfin à l'arrêt qui, pour elle et pour moi, est le dernier, elle tourne le regard vers moi une fraction de seconde en descendant du bus. À en croire ses yeux, elle semble ne voir en moi qu'un inconnu de plus. Néanmoins, quelque chose me trouble. Ses traits sont plus tirés que d'habitude. J'ai beau fouiller à l'intérieur de ma mémoire ce qui pourrait ainsi la tracasser, je ne trouve pas.

Le carnet que j'ai dans mon sac me démange. Je voudrais tant lui en parler, mais elle a déjà tourné les talons, se dirigeant vers son agence. Le cœur lourd, je retourne enfiler mon tablier de boulanger. Les pains sont au four, et pour éviter d'avoir à parler à quiconque hier j'ai déjà fait tout le ménage. Profitant de ce moment de calme, je prends une feuille et un crayon. Il faut que je me ressaisisse, et écrire a toujours été la solution pour m'apaiser. Enfin, pour ça faudrait-il encore avoir de l'inspiration. Je me sens creux.

Je passe la journée les yeux dans le flou, agissant machinalement, vide de tout mis à part elle et son journal.
Je vais lui rendre à la sortie du bus
Avant de l'oublier
Ou elle me rendra fou.

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