LA RUELLE DU SENTIMENT
La ruelle du sentiment
Exhale de sa brique austère
Une haleine de vieille terre
Qui m’insinue infiniment.
Dessus les toits, une hirondelle
Sème son petit cri pointu,
Et toi mémoire : que dis-tu,
Ô persécutrice fidèle ?...
Tu me racontes ce taudis,
Ecrin douillet au ciel immense,
Qui abritait une romance
Qui me hante et que je maudis !
Mais je suis seul à la fenêtre,
Et mon âme a quitté Cahors ;
Puisque tout fuit, pourquoi dès lors
Espérer quelque jour renaître.
Le diable du Pont Valentré
Sait déjà que dans sa demeure
Pour longtemps j’irai tout à l’heure,
Je l’entends : il me dit d’entrer.
La nuit qui rôde et perd patience
A chassé les rayons sanglants,
Je connais que trop ses talents,
Alors qu’on en finisse : avance !
Mais avant de tout effacer,
Laisse encore un peu parler d’elle
L'insolente et libre hirondelle
Qui déjà finit de passer.
Et dans les Badernes* anciennes,
Vides d’amour, viendront flâner
Les voix d'un souvenir fané,
Comme des âmes bohémiennes.
*Les Badernes : vieux quartier de la ville
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