Nouveau statut 3/4
Comme toujours il s'enquit du déroulement de sa matinée, et elle répondait avec des onomatopées. Tous deux attendirent la fin de la journée avec impatience pour se tenir au courant des derniers évènements.
Le soir venu, Gérald conta à sa confidente comment Xavier comptait amener les deux étrangers à se déchirer. En les confrontant à leur écrit le lendemain soir, tandis que des gardes de confiance chercheraient les originaux. Dans leur bonté, la famille comtale leur offrirait de régler cette affaire devant les Ancêtres, au cours d'une ordalie. Bastian et Hubert, le soldat dragonien, seraient les champions de Xévastre. Connaissant le goût pour le duel du Duc Descombes, personne ne doutait qu'il se saisirait de l'occasion. Le Baron Wulik, de nature plus discrète restait plus difficile à cerner, néanmoins, l'honneur de son nom aurait bien des avantages à tirer en s'alignant sur le choix du Duc.
- Ne restera qu'à te rendre ta liberté ensuite, conclut Gérald dans un soupir fatigué.
- Qu'est-ce que cela changera ? murmura sobrement l'intéressée.
Cette saillie surprit son frère. Après un silence, il s'étonna :
- Pourquoi cette question ? Cela ne te convient pas ?
- Vos parents ont compris depuis quatre ans que me vendre ne suffirait pas à m'éloigner de vous et je doute qu'ils réitèrent le geste un jour, je n'ai jamais été contrainte à l'obéissance, mon salaire me nourrit et me vêt...
- Et le jour où tu souhaites partir, tu le pourras.
- En tant que mon unique propriétaire, je pourrais quitter le château à votre mort mon seigneur. Et je désire vous servir jusque votre fin. Cela ne m'autorisera ni le port d'arme, ni la mise à mort d'un humain qui me menacerait. Je ne gagnerais pas de droit qui me serve.
- La symbolique t'indiffère ? Que désirerais-tu, Ombre ?
Jusqu'à présent, elle lui tournait le dos. La dragonienne pivota juste assez pour accorder un regard en coin à son maître. Le coeur battant, il attendit. Ombre sourit avec douceur. Il craignait qu'elle ne souhaite une chambre à elle.
- Je possède déjà tout ce que je souhaite, mon seigneur. Être à votre service. Astuce. De quoi subvenir à mes besoins. Du temps libre.
- Te manque un contrat prouvant que tu n'appartiens en vérité qu'à toi-même. Pense à nos voyages, aux offres d'achat qui te concernent. Hors de nos terres, plus personne d'extérieur à notre cour ne pourra te donner d'ordre sans mon autorisation.
L'écailleuse se détourna, le temps de rouler des yeux. Ceux qui se risquaient à lui donner des ordres à la place de son seigneur devaient déjà parvenir à ce qu'elle comprenne ce qu'ils voulaient. Elle sentait toutefois l'importance que prenait son affranchissement pour Gérald. Alors elle se tourna de nouveau vers lui :
- Vous soulevez des points importants. Merci, mon seigneur.
Elle ouït avec bonheur le coeur de son maître s'emballer, puis s'accélérer encore quand elle lui adressa un sourire.
- Souhaitez-vous m'enlacer ?
Gérald en oublia de respirer. Son regard trahissait son incrédulité et son bonheur mêlés, son expression demandait "c'est vrai ?", question à laquelle elle répondit d'un hochement de tête. La réaction ne se fit pas attendre.
Les gestes accompagnés de frottements, Gérald enlaça son ombre, sa belle Ombre. Il avait pris l'habitude de se positionner de sorte à ne pas indisposer la personne qui le connaissait le mieux, en qui il avait le plus confiance. Elle lui en savait gré. Avec un léger sourire, elle acheva de se caler contre lui. Sa bienveillance méritait bien une récompense. Et ces permissions occasionnelles le rendaient si heureux. Le nez dans le cou de sa dragonienne, le benjamin lui demanda :
- Te lèveras-tu cette nuit ?
- Comme de coutume mon seigneur.
Il affermit sa prise.
- Tu reviendras entre mes bras ?
- Oui.
Soulagé, heureux, il grogna de contentement et savoura l'instant, tandis qu'Ombre s'abandonnait au passé de la femme de sieur Xavier, et des amies de celle-ci.
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