Où 2/10
Du village résonna une succession infinie de claquements. « kala-kala-kala-kala-kala-kalak ». Ombre ne parvenait pas à détacher son regard de celui de la dragonienne aux yeux verts. Lorsque cette dernière se trouva à quelques pas à peine, l’affranchie trouva que la température se rafraîchissait.
Kala-kala-kala-kalak
D’instinct, la petite rousse retint son souffle, tandis que la noble la détaillait en silence. Plus personne n’osait parler, tandis que Gérald demeurait inconscient.
- Nek’vomer okiêst ?
Incertaine, Ombre n’osa piper mot, ni esquisser le moindre geste. La voix de l’inconnue trahissait une puissance dont elle ignorait la nature, mais dévastatrice.
Kala-kala-kala-kala-kala-kalak
Seul ce son brisait le silence. L’attention générale se portait sur les deux survivants. La belle aux yeux verts comprit qu’elle n’obtiendrait aucune réponse, et toisa Gérald. Sa vue semblait l’amener à remuer des souvenirs douloureux. Elle se tourna vers son groupe, parla d’un ton sans appel, et plusieurs s’efforcèrent de mimer à Ombre de les accompagner, tandis que leur cheffe retournait au village, constitué d’une seule tente immense.
Kala-kala-kala-kala-kala-kalak
L’un d’entre eux changea d’idée, et attira l’attention d’Ombre sur lui. Il lança un regard insistant à Gérald, puis, avec un air goguenard se lécha le dessus du poignet. À son expression, il s’agissait d’un geste grivois, qui en fit ricaner plus d’un.
Kala-kala-kala-kalak
N’obtenant aucune réponse, ils se lassèrent très vite, et de nouveau ils incitèrent Ombre à les suivre au village.
Kala-kala-kala-kala-kala-kalak
Un grognement endolori se fit entendre. L’oreille aux aguets pour s’assurer qu’aucun dragonien n’approche sans qu’elle ne s’en rende compte, elle baissa les yeux sur son seigneur. Ce dernier pinçait les lèvres, et se protégeait faiblement du soleil. Puis soudain, il sursauta, et s’assit en un éclair, haletant, perdu, certainement aux prises avec la sensation de se noyer, à sa manière de happer de larges goulées d’air.
Kala-kala-kala-kala-kala-kalak
Haletant, il regarda autour de lui, d’abord aveuglé par le soleil. Ombre lui laissa le temps. Il se décomposa en comprenant leur situation, aux mains d’un groupe de dragoniens trop intéressés par sa peur.
Kala-kala-kala-kalak
Il apperçut enfin sa plus fidèle compagne, et s’accrocha aussitôt à elle, soulagé qu’elle vive. Il remercia les Vents et les Ancêtres du fond du cœur. Ombre vivait. De plus, ces dragoniens semblaient sauvages, libres. Depuis le temps qu’il souhaitait une véritable liberté pour celle qu’il aimait. Il s’agissait d’une opportunité qu’elle devait saisir. Vivre libre parmi les siens, loin des intrigues de la noblesse humaine. Après cette ivresse d’espoir, de courte durée, il déchanta. Quel sort l’attendait, lui ?
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