Pas si seule 2/
La dragonienne lui répondit d'un regard sceptique. Il dansa sur ses pieds, mal à l'aise et tenta de la convaincre à voix basse :
- Tu sais que la résurrection du Royaume du Nord nécessitera beaucoup de moyens. Si nous ne mettons pas la main sur la richesse de Vorn, il nous faudra encore des siècles d'attente. D'autant plus que nous paraissons faibles, nul ne veut croire à la composition de notre armée... Si nous voulons notre indépendance dans les décennies qui viennent, ceci est une nécessité. De plus, nous pouvons tenir tête au Roi, mais pas à Vorn. Avec nos épousailles, elle serait contrainte par le culte des Ancêtres à nous porter assistance. Ou à minima de ne pas nous affronter.
- L'idée ne vous est pas venue, que vous pourriez être un otage sacrifiable ?
Cela jeta un froid. Finalement, Gérald passa outre dans un soupir.
- Je ne suis pas venu parler de tout cela Ombre, je suis venu voir comment tu vas.
- Et à quoi vous attendiez-vous mon seigneur ? Deux hommes tentent d'abuser de moi, je ne suis pas leur première victime, je sais comment cela s'est terminé pour celles qui m'ont précédées... et aucune ne pouvait se reposer sur un père présent. Ces deux hommes sont morts. J'en ai tué un par réflexe. Le second... j'aurais pu partager son sort.
Gérald se racla la gorge, elle s'interrompit.
- À ce propos... qu'est-il arrivé à ce deuxième homme ? Les informations qui me parviennent sont tronquées.
- Il a été dévoré vivant par les dragoniens de Vorn.
Gérald trouva le moyen de bêmir plus encore, et vint la prendre dans ses bras. Ombre se demanda si sa propre indifférence au geste était normale, ou due à sa nuit précédente. Il lui fallut se remémorer les conventions pour enlacer son Seigneur à son tour.
À sa stupéfaction, cette marque d'affection ramena diverses émotions à la surface de son esprit. Le sentiment de salissure, d'abandon, mais aussi celui merveilleux de se sentir soutenue. La présence de son père humain ne la protégeait pas de tout. Mais lui la connaissait depuis toujours, telle qu'elle était et l'aimait ainsi. Elle resserra son étreinte sur lui. L'envie de montrer sa faiblesse se disputa au besoin de la dissimuler.
Le temps de son hésitation, Gérald la berça en douceur. Il se sentait aussi impuissant qu'inutile. La maison de Vorn savait abriter des violeurs et les gardait à son service, voilà autre chose. Et il devrait épouser une complice de la tentative de... En plein conflit de loyauté, il serra plus encore Ombre dans ses bras. Bien sûr qu'elle avait raison.
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