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L’explication fut orageuse, les deux larrons se foutant joyeusement de la tête de tous ces vieux qui essayaient de leur faire entendre raison. Un ado rebelle, bonjour les dégâts, mais deux petits merdeux qui s’acoquinaient joyeusement, cela devenait ingérable. Deux heures après, en ayant été tournés en bourriques, ils durent accepter la situation. Faute d’un résultat, les super-cerveaux abandonnèrent les deux amis pour aller faire un brainstorming rafraichissant.

Le petit Hector, avec sa bouille ronde et délurée, était extrêmement photogénique, plus que le produit phare, un peu typé et très quelconque avec son regard vide. Lui associer un compagnon, un faire-valoir était une bonne idée. Il allait falloir négocier dur avec les parents l’abandon de leur projet de carrière mirifique pour leur héritier et de leur héritier en prime. La gestionnaire tiqua sur la dépense, proposant d’offrir un chihuahua à Uriel comme compagnon de vie (très peu de frais de nourriture et de transport). Les regards des autres membres du staff lui firent comprendre son inanité.

Le second problème était la peinture des plumes, rendant impossible toute représentation dans l’immédiat et obligeant le versement d’importants dédits. Les experts avaient constaté un remplacement du plumage, mais ça allait durer six mois ou un an, et un manque à gagner inacceptable. La recherche « nettoyage de plume » ne donna rien, puisque jamais posée et donc jamais indexée. LIA levait ses yeux factices en l’air, simulant un sourire niais, vomissant des propositions qui relevaient visiblement du farfelu, comme « tailler les plumes », « tremper dans l’encre ». Il fallait consulter des spécialistes de plumage. Un spécialiste fut dégotté au Museum d’histoires et de curiosités naturelles de Bruxelles, dernier lieu où un soupçon de vie intelligente persistait. Il était spécialisé dans les batraciens, certes, mais il était surtout spécialiste. Il fut dépêché à Valdieu et arriva en sifflotant, curieux des mares alentour dans lesquelles il identifia immédiatement les deux espèces de Rana encore vivantes. Déplumé du chef, il plut immédiatement aux deux garçons en leur apportant un album de Quick et Flupke, sur papier ! N’y connaissant rien en plume, il proposa en termes savants de repeindre les parties déjà atteintes. Cette préconisation si audacieuse fut remerciée à sa juste valeur, tandis que les consultants se mettaient à la recherche d’une maquilleuse spécialisée dans les plumes. Celle du Crazy Horse fut recrutée à prix d’or, trop heureuse de travailler sur le phénomène. Sa proposition de continuer avec les couleurs de l’arc-en-ciel fut rejetée, l’Ange devant rester universel, y compris pour les cis, et non se porter en fanion d’une frange de la population. Ils optèrent pour le Blanc 000A, certifié bio, durable, éthique et tac.

Le dernier point, le plus difficile était la gestion du gamin, car il ne leur appartenait pas et se montrait encore insensible au fric et à la notoriété. Ce qui leur était incompréhensible.

Toutes ces têtes bien faites pour le business se trouvaient démunies, à leur grande frayeur, devant un enfant, d’autant plus que, si le business plan n’était pas respecté, une foule de candidats était prête à assumer ce fardeau à leur place, à des conditions autrement avantageuses.

Le lendemain, ils furent désarmés de trouver les deux lurons leur demandant : « On fait quoi, aujourd’hui ? ». Ils voulaient s’amuser.

Une fois relookés, ils purent reprendre leur activité, cette fois en duo. Hector se révéla très doué pour la chorégraphie et il adorait se mettre en valeur, avant de présenter son copain. Son seul défaut était de faire des plaisanteries de collégiens au plus mauvais moment. Toute admonestation se terminait par : « Bon, si c’est comme ça, j’me barre ! », suivi en écho par : « Moi aussi ! ». La lutte s’arrêta au vu des résultats, car ce supplément apportait une touche vivante fortement appréciée des masses. Les puissants, peu habitués aux blagues potaches, appréciaient moins, mais leur part de chiffre d'affaires ne dépassant pas 5 %, on passa outre.

Tout roulait pour le mieux, si bien que personne ne vit arriver la fin du contrat quinquennal. Sauf Matou !

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