Mon vieux
Une minute de lecture
Aussi loin que je me souvienne, je vois mon père les doigts jaunis par la nicotine. Il lui fallait cramer ses trois paquets de cigarettes par jour. La clope la moins chère coincée entre ses lèvres dès son réveil, substance indispensable pour affronter son misérable quotidien. Sa Gauloise comme un tuteur rivé à une branche fébrile toujours prompte à piquer du nez.
Pour tout héritage, mon vieux m’a légué l’odeur âcre du tabac, mais aussi celle du pinard bon marché. C’est d’ailleurs bourré comme un coing qu’il m’a donné la vie, et c’est dans le même état qu’il a perdu la sienne moins de trente années plus tard. Deux actes gratuits. Mais rien de plus naturel de la part d’un type aussi radin que lui.
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