4. L’Enlèvement - Partie 1
Dorian ne retrouva son père qu’au petit matin. Le vin n’avait pas réussi à lui faire oublier sa peine mais l’avait gratifié d’un violent mal de crâne, aussi quand il découvrit Valérian sur le pied de guerre, il redouta la suite :
- Nous partons, déclara le patriarche.
- Maintenant, s’étonna Dorian, mais pour aller où ?
- Sorgat, le roi a offert son hospitalité aux mages qui ont fui. Il est temps de leur faire part de notre façon de penser.
- Père, n’est-ce pas un peu…
- Dorian, le coupa l’enchanteur. J’ai appris qu’Elminster était encore en vie. Tant que sa trahison ne sera pas vengée, je n’aurai aucun repos. Tu devrais en faire de même.
Dorian acquiesça silencieusement, omettant sciemment de parler à son père de la visite qu’il avait reçue la veille. Valérian partit alors et son fils le suivit. Ils apparurent aux portes de la grande cité. Syphilis, qui n’aimait guère les sorties nocturnes de son jeune maitre, les rejoignit. Elle salua Dorian en frottant sa petite tête contre la joue du mage qui, souriant, la gratifia d’une rapide caresse. Dorian accompagna son père dans les méandres des ruelles, jusqu’au palais qui s’élevait en son centre. La ville était animée, presque joyeuse. Valérian arriva aux marches du bâtiment et fut arrêté par un garde :
- Qui êtes-vous et que voulez-vous ?
- Je suis Valérian, mage de la Tour Blanche et voici mon fils, Dorian.
Le garde baissa les yeux en signe de tristesse :
- Le roi va vous recevoir, déclara-t-il avant de les conduire à une grande salle.
Ils n’attendirent que quelques instants avant que le roi de Sorgat ne se montre. C’était un grand homme, bien bâti mais déjà déclinant. Ses cheveux blonds et sa longue barbe partaient dans tous les sens, ses yeux bleus étaient emplis de fatigue. À sa suite paraissait la plus charmante des créatures, une princesse ayant hérité de la chevelure et des prunelles de son père. Dorian défia silencieusement la jeune fille et esquissa un sourire amusé quand il la vit détourner le regard en rougissant.
- Messeigneurs, déclara le monarque, soyez les bienvenus à Sorgat. J’aurais aimé vous recevoir dans une situation plus heureuse, malheureusement… prenez vos aises, ma cité est la vôtre.
- C’est bien ce que je vous reproche, mon bon roi, répondit froidement Valérian. Je viens ici pour vous proposer mon aide, soit vous me livrez les mages dissidents, soit, je rase votre ville.
Le roi blêmit soudain :
- Je vous demande pardon ? Vous… La Tour Blanche n’a pas été détruite par une armée démoniaque ?
Valérian se retourna, amusé vers Dorian.
- Tu vois, Fils, déclara-t-il, tu es un démon à présent.
Le roi fit osciller son regard vers les deux enchanteurs puis soudain, fixa un point derrière les deux hommes. Dorian sentit venir l’attaque avant même que les portes de la grande salle ne s'ouvrent. Il se glissa auprès du monarque puis saisit violemment la jeune princesse. Le souverain paniqué, intima à ses gardes de s’arrêter. Le mage en profita pour humer la chevelure de la demoiselle à laquelle il murmura que tout se passerait bien.
- Amenez-nous ceux que vous protégez là où s’élevait autrefois la Tour Blanche, ordonna Dorian. Et tout se terminera… sans larme.
Avant que quiconque puisse bouger, Dorian disparut, emportant la princesse avec lui.
***
Ils se matérialisèrent à nouveau dans la forteresse de Valérian. Le Mage Noir apparut quelques instants plus tard, hors de lui.
- C’était, hurla Valérian…
On aurait dit qu’il hésitait entre féliciter Dorian et le réprimander.
- Tu aurais pu me prévenir, lui reprocha-t-il.
- Et comment ? se défendit Dorian.
- Par la pensée, idiot ! Tu es un mage ou quoi ?
Il est vrai qu’en d’autres circonstances, il aurait sans doute pensé à ce mode de communication mais dans l’état actuel de son crâne, l’idée ne l’avait même pas effleuré. Dorian lâcha un sourire penaud à son père qui renchérit :
- Et on en fait quoi ?
Dorian força la princesse à lui faire face. Il afficha un sourire affable puis lui dit d’une voix douce, à peine perceptible.
- Allez où vous le souhaitez, mais ne quittez pas ce château.
Il relâcha doucement son étreinte et la princesse en profita pour quitter la salle en courant.
- Parce que tu crois que ça va l’arrêter ? railla Valérian, tu as besoin de sommeil, Fils, tes pensées sont troublées.
- Si elle trouve la sortie, elle mérite de s’évader, déclara-t-il avec malice en quittant la salle à son tour.
Il arpenta le couloir tandis que Syphilis s'extirpait d’un pan de son manteau :
- Qu’as-tu fait, le gronda-t-elle ?
- Rien de bien grave, s’amusa Dorian. La porte de sortie la mènera directement à la chambre d’ami.
- Dorian, mais pourquoi as-tu fait ça ?
- Je n’ai pas de princesse à mon tableau de chasse, déclara-t-il avec malice.
- Si ton père avait toute sa tête, il ne le cautionnerait pas. Que penserait Elminster de tout ça ?
Dorian stoppa net quand le familier prononça ce nom, il était troublé, ainsi savait-elle qu’il l’avait vu ?
- Si tu ne veux pas finir comme son familier en repas du soir, je te conseille d’éviter de mentionner son nom ici.
Dorian sut qu’il avait marqué un point quand l’hermine plissa les yeux en signe de colère et disparut aussi vite qu’elle était apparue.
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