Si elle avait osé, et si elle avait su,

Elle ne se trouverait pas tout à fait perdue,

Au milieu des bois sombres, humides et brumeux,

Où circulent les ombres des obscurs désaveux.

Optimiste et naïve, sur les chemins fleuris,

Cherchant l'aura festive des jardins de bandits,

Elle avait jusqu'ici, marché distraitement,

Sans un dessein précis, sans calcul et sans plan,

Flottant parmi les foules, libellule éveillée,

Virevoltant quand croulent les difficultés,

Cajolée dès l'aurore dans son cocon de soie,

L'ambition et l'effort ne la concernaient pas.

Si elle avait rêvé, si elle y avait cru,

Elle ne se sentirait pas tout à fait vaincue,

Dans cette forêt glauque où règne le sordide,

L'esclavage d'époque, les billets au coeur vide,

Elle voulait découvrir, jouir de tout son temps,

Jouer, se divertir, apprendre des passants,

Danser, s'énamourer, au rythme des tambours,

Sans carrière à tracer au pays des vautours.

A chaque croisement, levant les yeux au ciel,

S'éloignant de l'enfant censé guider ses ailes,

Elle suivait les essaims ou partait au hasard,

Portée par le marin, l'auster ou le blizzard.

Si elle avait compris, et si elle avait pu,

Elle n'aurait pas fait fi de ses désirs confus,

Enchaînée au pilot de l'uniformité,

Dans la jungle des faux, et des conformités.

Envolée, travestie, s'égarant à mesure

Qu'elle taisait par dépit sa complexe nature,

Elle avait espéré qu'à ses pas incertains,

Le temps reconnaîtrait des allures de destin.

Au bord du marécage de ses désespérances,

Elle rassemble les pages et maux de ses errances,

Elle fixe l'horizon, y dessine ses folies,

Sans autre déraison qu'une intime amnistie.

Elle trouvera l'issue au-delà de ses peurs,

Cultivant ses vertus, affrontant ses douleurs,

Embrassant l'imparfait, affranchie des regards,

Un sourire esquissé au front de son miroir.

MH.