Exodes
Exodes.
Maman, j'ai peur.
On laisse mourrir doucement,
Au pied des zones commerciales,
Des hommes dont le seul tourment
Est de vouloir mettre les voiles.
Dans la forêt avoisinante,
Où l'on jouait le mercredi,
On distribue des pulls, des tentes,
Où se meurt notre hypocrisie.
Maman, j'ai peur.
Quand se lève l'obscurité,
On peut entendre les camions,
Le bruit glaçant et régulier
De la macabre répression.
On gaze tout chaque matin,
Abris, nourriture, vêtements,
Comme s'il fallait qu'on soit certains
Que c'est la mort qui les attend.
Maman, j'ai peur.
On voudrait les voir disparaître,
De la vue des honnêtes gens,
Que toi et moi, à la fenêtre,
N'observions plus ce dénuement.
Des ombres rendues au silence,
Dont on dénie l'identité,
L'humanité en déshérence,
Ladre des nationalités.
Maman, j'ai peur.
On me dit que c'est impossible,
Qu'on ne peut pas les secourir,
Que même si inadmissible,
Leur destin serait de mourir.
On me dit qu'il faut accepter,
Que c'est la mondialisation,
Qu'on ne peut rien lui opposer,
Qui nous rendrait notre raison.
Maman, j'ai peur.
On s'attend à ce que le temps,
Et nos enivrements festifs,
Enfouissent les maux évidents,
De nos élans compétitifs.
Jamais je n'y arriverai
Cesse de l'attendre de moi,
Nager pleinement satisfait,
Dans l'océan des désarrois.
Maman, j'ai peur.
À voir ce que la belle France
A fait de ses déclarations,
Peut-être saurais-je l'errance
De celui qui fuit sa nation ?
MH.
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