Iliéna refait surface - Chapitre 25
Lhiréou n'a pas réellement dormi. Elle s'est installée dans une posture de repos proche de la méditation. Les sons de la mer des Caraïbes pénètrent dans la cabine de pilotage du vaisseau. Elle tient à s'imprégner des rythmes fondamentaux de la planète Terre et son cœur de Leaurélienne commence à battre au rythme de la houle. Peu à peu elle se sent devenir terrestre.
En phase intime avec l'élément liquide, source de toute vie, sur la Terre comme sur Leaurélia, elle entend venir au loin les chants des dauphins et reconnaît rapidement "Méa" et les siens.
— "Méa", Méa, fait-elle annoncer très fort par les sonars ultrasoniques du vaisseau
— Pourquoi cries-tu si fort, Lhiréou de Leaurélia ? Nous ne sommes pas sourds !
— Désolé, je pensais que vous étiez encore très loin. Méa, j'aurai besoin de ton aide.
— Te souviens-tu de l'humaine que tu as repêchée au fond de la mer ?
— Oui bien sûr. Elle est toujours en vie ? Demande Méa.
— En quelque sorte. Avec elle je vais essayer de prendre contact avec les "Hommes".
— Mais si les "Hommes" t’aperçoivent, ils vont te pêcher, comme ils le font le parfois avec nous. Tu ne te souviens pas de leur filet ?
— Je m'en souviens trop bien ! Avec Iliéna je serai invisible pour eux.
— Iliéna ? Interroge Méa.
— C'est le nom de la jeune femme que tu m'as apportée et que nous avons sauvée.
— Il est impératif qu'Iliéna rejoigne la ville de Cancún que tu m'as montrée.
— Je ne peux sortir du vaisseau, tu le sais. Je m'adresse à toi pour que tu trouves une embarcation pour transporter Iliéna vers Cancún. Insiste Lhiréou, elle ne sait pas si Méa comprend ce qu'elle souhaite.
— En ce moment, je ne sais pas pourquoi, il y a une multitude de petits bateaux qui sillonnent la mer, soit pour nous regarder faire des bonds dans l'eau, soit pour s'approcher des baleines, mais au moins ils ne nous pêchent pas. Par contre leurs bateaux font beaucoup de bruit. Ils sont des dizaines et ils sentent très mauvais, ce n'est pas bon pour la mangeaille, répond Méa.
— Si les "hommes" aperçoivent une de leurs congénères dans l'eau, j'espère qu'ils la prendront à leur bord.
— Wonderfull ! S'exclame Lhiréou. Je vais réveiller Iliéna et je te préviens
— Won... qu'est ce que tu veux dire ? S'inquiète Méa.
— Ne cherche pas à comprendre c'est du langage des "Hommes". Précise Lhiréou
— Tu parles comme les "Hommes" maintenant ?
— Moi non, je ne peux pas, mais Iliéna, oui.
— Je ne comprends rien de ce que tu me racontes.
— Ce n'est pas grave, attends-moi. Dans une heure, je te présenterai Iliéna.
— Lhiréa tu as suivi ? Nous avons peut-être une solution pour qu'Iliéna se rende à Cancún.
— Comment va Iliéna ? A-t-elle repris assez de forces pour cette grande journée qui se prépare ?
— Elle est en pleine forme ! Je l'ai dopée avec des sucres lents vitaminés, elle pourrait courir 8 heures sans s'arrêter. Mais, quand tu seras à Cancún, n’oublie pas de la faire manger et surtout boire. Rappelle Lhiréa.
— Pendant que tu te reposais, Réan m'a envoyée l'image d'une petite carte en plastique. J'ai pu en faire un double avec la mini-fabrique de polymère.
— Et cela se mange ? Demande Lhiréou, très étonnée.
— Non, mais Réan indique qu'il faut la présenter chaque fois que l'on a besoin de quelque chose. Comme manger, boire, trouver un vêtement ou un endroit pour dormir. Sans cette carte cela deviendrait apparemment très compliqué pour survivre.
— Je vais essayer de faire enfiler par Iliéna, ce vêtement pour nageuse que Réan m'a confectionnée.
— Lhiréa ! Je compte sur toi pour me suivre partout avec l'interface bionique. Je n'aurai certainement pas toujours le recul nécessaire pour répondre à toutes les situations.
— Je suis venu pour toi, Lhiréou. Je n'ai qu'une sœur, je ne vais pas l'abandonner !
Iliéna vient de se réveiller avec Lhiréou aux commandes. Elle sent effectivement beaucoup d'énergie dans le corps d'Iliéna. Elle reprend confiance. Sans difficulté, elle enfile un vêtement, un maillot de bain, lui apprend Lhiréa. Elle met, dans un sac souple transparent en bandoulière, le pass d'entrée à la Conférence ainsi que la fameuse petite carte passe-partout. Les deux précieux sésames portent le nom d'Iliéna Kriskova, l'Ukrainienne, et doivent lui faciliter son voyage aux pays des "Hommes".
Encore faut-il attendre un moyen d'entrer en contact et surtout d'arriver à Cancún pour le début de la Conférence Mondiale sur le Climat de la Terre. Iliéna n'a même pas le temps de s’asseoir.
— Lhiréou de Leaurélia, Lhiréou de Leaurélia, entend Lhiréa. Iliéna ne peut entendre les cris de Méa.
— Oui, répond Lhiréa dans la langue de Méa, nous sommes là et Iliéna est réveillée.
— Il y a un petit canot avec deux hommes qui me suivent.
— OK, il faut y aller, répond Iliéna en Anglais. Heureusement, Lhiréa comprend parfaitement sa sœur, via leurs interfaces bioniques.
— Attention, précise Lhiréa, Iliéna ne peut retenir sa respiration plus de quelques minutes et tu ne dois pas ouvrir la bouche sinon elle va se noyer.
LhiréouB avec l'esprit de Lhiréa et Iliéna/Lhiréou, s'élancent du sas du vaisseau vers la surface, guidées par Méa.
— Hé ! Crie Méa ! Regardez, il y en a un qui plonge.
Un "Homme" descend de la surface, droit vers elles. Rapidement, Lhiréa, la sœur de Lhiréou, comprend qu'il ne nage pas, mais coule !
— Remonte vers la surface ! Ne t’arrête pas ! Sinon Iliéna va manquer d'air.
Lhiréa donne ses indications via l'interface bionique.
— Je me charge de remonter cet homme à la surface, s’il est encore vivant !
Arrivée à la surface, Iliéna, ne peut que voir s'éloigner un canot à moteur.
— Ouf ! Je l'ai remonté, souffle LhiréouB, en tenant l'homme à bout de bras la tête hors de l’eau. Que fait-on maintenant ? Interroge anxieuse, Lhiréou/Iliéna.
Méa leur apporte la réponse.
— Suivez-moi ! Siffle-t-elle ! Il y a une petite crique à cinq minutes.
— Iliéna, accroche-toi à l'aileron de Méa. Cinq minutes en "dauphin", c'est une heure de nage pour Iliéna. Conseille, Lhiréa sur leurs interfaces.
— Merci Méa. Iliéna pose le pied sur le sable, sans se rappeler qu’elle ne comprend rien au langage humain.
Lhiréa, aux commandes du double bionique LhiréouB, vient de hisser le plongeur, apparemment involontaire, il a les bras liés dans le dos.
— Je vais lui envoyer des petites décharges pour réveiller ses réflexes, cela devrait lui permettre d'évacuer l'eau qu'il a pu avaler et je retourne sous la surface, il ne faut pas qu'il rencontre LhiréouB, indique Lhiréa.
— Je ne sais pas si cet homme, dans l'état où il est, pourra me conduire à Cancún avant demain après-midi pour le début de la Conférence, répond Lhiréou/Iliéna par l'interface bionique dont est désormais dotée Iliéna.
—Les êtres humains semblent posséder d’importantes ressources d’intelligence pratique, essaie d'abord de lui rendre une respiration normale.
LhiréouB, l’androïde, se retournant vers cet étrange couple humain, un homme aux vêtements détrempés, une femme blonde équipée d'un maillot bicolore, ne peut croire que les espoirs de Lhiréou trouvent leurs concrétisations.
LhiréouB disparaît dans les vagues, Iliéna commence à prodiguer les gestes nécessaires pour redonner vie au noyé.
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