Accompagnée par LhiréouB, Iliéna, toujours tétanisée par ce qu'elle découvre, s'assoit du bout des fesses dans le fauteuil qui monte du sol en s'ouvrant comme une fleur.

— Laisse-toi aller, installe-toi complètement. Le dossier et les accoudoirs vont s'adapter parfaitement à ton corps. Tu pourras ainsi te détendre. Iliéna entend toujours cette voix dans sa tête.

— Qui êtes-vous ? Balbutie Iliéna, assurez-moi que je ne rêve pas, que je suis bien vivante.

L'être fantastique, assis à côté d'elle, lui répond, tout simplement :

— Lhiréou de Leaurélia ! Je suis la Gardienne de la Vie sur ma planète. Et la voix chante encore dans sa tête.

— Ce n'est pas possible, ce n'est pas possible ! Sainte Mère de Dieu ! Ce salaud de Dragomir m'a envoyée en enfer en me fracassant la tête. Pense Iliéna, en se tenant la tête entre ses mains.

— Je ne connais pas l'enfer, ni ce Dragomir, Iliéna, mais si nous n'avions pas été là quand tu as coulé au fond de l'océan, tu serais complètement morte, alors que tu es bien vivante.

Interloquée, la voix vient à nouveau de chanter dans sa tête, Iliéna redresse la tête et ouvre les yeux.

Elle perçoit ce qui pourrait être un sourire sur l'étrange visage triangulaire gris bleuté qui la regarde. Elle prend, soudain, la mesure de cet être étrange auprès de qui elle se trouve. Son corps luisant, long, étroit, ne paraît pas être vêtu, ou alors peut-être par une combinaison ultra-moulante, car de la tête aux épaules, en passant par le torse et les jambes, le tout n'est que gris bleuté, uniforme.

Iliéna reprend sa respiration, un air frais et pur envahit ses poumons, elle frissonne un peu. Pas de doute je suis vivante, constate-t-elle.

Lhiréou, via LhiréouB, scrute la moindre de ses réactions pour ne pas la brusquer ou l'effaroucher.

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— Mais, si je suis vivante alors que j'ai coulé au fond de l'eau, où suis-je ? Sur ta planète ? Demande-t-elle, en s'adressant cette entité assise près d'elle.

— Rassure-toi, Iliéna, tu es bien sûr ta planète, Terre, sous l'océan exactement. Sur la mienne tu ne pourrais pas y respirer comme sur terre. Et la voix chantait toujours dans sa tête.

— Comment fais-tu pour me parler ? J'ai l'impression d'avoir un petit haut-parleur dans mon crâne.

Chaque fois que la voix lui parle, Iliéna perçoit comme des impulsions lumineuses parcourant les petites tentacules, en forme de couronne, sur la tête qui s'adresse à elle.

Surpris par l'analogie avec le son, LhiréouB répond :

— C'est un peu ça et je suis heureuse que tu m'entendes et me comprennes.

— Heureuse ? S'interroge Iliéna pour elle-même, mais alors c'est une femme, femelle. Je ne sais pas comment est fait cet être extraterrestre.

— Tu as raison Iliéna, je suis du sexe féminin, je suis celle qui donne la vie, comme toi sur la Terre.

Iliéna regarde LhiréouB les yeux exorbités, bouche ouverte.

— Mais je n'ai pas parlé, et vous m'avez entendue ?

LhiréouB comprend, alors l'angoisse qui saisit la terrienne. Celle-ci vient de prendre conscience qu'aucune de ses pensées n'est plus secrète. Pour Lhiréou il est impératif qu'Iliéna soit rassurée, sinon elle va se braquer et de ne pas coopérer.

— Tu as parlé, très bas, pour toi-même et je t'ai entendue, mais si tu ne prononces rien, je ne t'entendrai pas, répond LhiréouB, en travestissant un peu la réalité.

— Alors vous êtes bien une femme, demande Iliéna et comment dois-je vous appeler, je n'ai pas bien compris.

LhiréouB est satisfaite de voir qu'Iliéna prenne de l'assurance et cherche à comprendre la situation.

— Je m'appelle Lhiréou de Leaurélia et je suis Gardienne de la Vie pour ma Planète et les Peuples qui l'habitent. Répète Lhiréou, via son double bionique, LhiréouB.

— Vous m'avez dit que nous sommes au fond de l'océan, là où vous m'avez repêchée !

— Oui, regarde par toi-même.

À cet instant, Lhiréou vient de commander les écrans géants du vaisseau, donnant aux parois du vaisseau l'illusion parfaite de la transparence.

Iliéna a un réflexe de recul, comme si l'océan pénétrait dans le vaisseau.

— Whao, mais nous sommes dans un aquarium avec ses poissons multicolores et aussi des dauphins, c'est extraordinaire ! S'exclame Iliéna, émerveillée par la beauté du fond marin, mais comment faites-vous ça ?

— Les parois ne sont pas transparentes, de plus le vaisseau est sous le sable pour des raisons de sécurité. Il s'agit simplement d'écrans un peu comme vos écrans TV, mais en plus grand.

Iliéna commence à s'habituer à la voix qui résonne dans sa tête

— Hé regardez le dauphin, on dirait qu'il frappe sur les parois, enfin les écrans comme vous dites.

— Oui ! C’est "Méa," tu lui dois la vie. C'est elle qui t'a portée au vaisseau, tu étais presque morte à ce moment là.

— Je suis au paradis, alors ! Vous m'avez ressuscitée ?

Paradis, Ressuscitée, Lhiréou n'est pas bien certaine de comprendre de quoi parle Iliéna.

Ce dont elle est maintenant sûre, c'est qu'Iliéna est en confiance. Cela devrait être plus facile de lui expliquer la situation.

— Vous parlez avec les dauphins ? S’étonne Iliéna

— Ce sont les premiers êtres intelligents que nous avons découverts dans l'Océan. Ils vivent, comme nous, dans l'eau et nous comprenons leur chant . Il s’apparente à nos mélodies Leauréliennes.

— C'est un animal, il n'est pas intelligent comme nous, il est chassé dans mon pays.

— Oui, je le sais ! Ce sont les dauphins qui me l'ont appris, leur intelligence n'est pas identique à celle des hommes mais elle est certainement plus bénéfique pour la planète.

Iliéna comprend immédiatement l'intérêt préférentiel pour la vie marine, portée par celle qui lui parle dans la tête.

— Il y a longtemps que je suis là, dans votre vaisseau, sous l'océan ? Commence à s'inquiéter Lhiréou, qui ne s'étonne même plus que LhiréouB la comprenne aussi facilement.

— Cela fait déjà quelques jours, tu es même sortie et retournée à Cancùn, s'entendit-elle dire ?

— Quoi ? Je ne me souviens que du coup que j'ai reçu sur la tête, et je me souviens aussi de ce mec, sur la plage, qui essayait de me violer, comment ai-je pu retourner à la ville ?

— Au début, comment t'expliquer Iliéna, tu n'étais pas vraiment vivante ?

— Comment ça pas "vraiment vivante", j'étais morte alors ! C'est bien que je dis, je suis ressuscitée !

— Ton corps était vivant, Iliéna, mais ton esprit n'était plus la, enfin nous le pensions ! Mais nous avons sous estimé les ressources vitales des organismes de l'espèce humaine.

— C'est quoi ce vous me racontez ! Je n'étais quand même pas un zombie, vous ne m'avez pas transformée en zombie, j'espère, s'emporte Iliéna qui se lève de son fauteuil.

LhiréouB l'accompagne dans son geste et dit doucement, en posant la main sur son épaule.

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— Iliéna, je suis Gardienne de la Vie et je respecte ce que tu peux penser de moi. Mais tu ne peux pas juger car tu ne connais pas tout de ton histoire et de la mienne, elles sont désormais entremêlées à jamais.

— Et comment pourrais-je savoir si vous ne me dites rien ?

— Je peux tout t'expliquer, Iliéna, mais cela prendra des jours et des jours. Je peux aussi te proposer autre chose pour que tu saches tout de toi, de moi, de nous deux.

— C'est bien mystérieux tout ça !

— Il n'y a aucun mystère Iliéna, je te demande de me faire confiance, comme mon Peuple sur Leaurélia me fait confiance. Pour que tu comprennes tout, il faut que tu le vives. Iliéna, donne-moi tes mains et regarde-moi, tu sais que j'entends les mots qui sortent de ta bouche, mais en fait je les entends dans ta tête. Je t'ai doté du même pouvoir que moi, tu peux, toi aussi entendre, ce qu'il y a dans ma tête.

— Mais je ne vais rien comprendre, s'affole Iliéna.

— Au contraire tu comprendras tout car tu vivras, tu verras les images, entendras les sons, vivras les émotions, tu seras moi, comme je serai toi. Viens asseyons-nous, les fauteuils vont nous accueillir en position de relaxation.

— Que va-t-il m'arriver ? C'est trop pour moi, pense-t-elle, quand la main douce et chaude de LhiréouB se referme sur la sienne.

— Ferme les yeux, écoute ma voix, nous allons faire un long voyage ensemble !

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