L'ascension au trône 3/6
Alors qu’elle s’engageait dans le long couloir qui remontait jusqu’à la salle du trône, Ser Percival était sur ses talons. À exactement deux pas de distance derrière Lorenna comme il le faisait toujours. Il avait l’œil absolument partout, scannant chaque centimètre de la zone qu’il traversait. La journée d’aujourd’hui était trop exceptionnelle pour qu’il n’y ait le moindre faux pas.
Sur leurs passages, pages et servantes s’inclinaient face à Lorenna qui ne leur accordait pas même un regard. Perdue dans ses pensées, elle regardait droit devant elle. À leur approche, un garde se frappa le poing droit sur le cœur en inclinant la tête puis leur ouvrit la porte donnant accès à la salle du trône.
La pièce était pratiquement déserte. Seuls Lord Chamberlan et le prêtre Obson se trouvaient là. Ils semblaient avoir une conversation animée entre deux énormes piliers non loin du sinistre trône, taillé directement dans la roche la plus sombre du royaume. Heureusement, tapis et tentures aux couleurs vives venaient égayer un peu l’immense salle.
Lorsqu’ils virent arriver Lorenna, ils s’interrompirent et le prêtre Obson lança un regard réprobateur à l’adresse de Ser Percival. Il resta alors à distance.
— Le peuple vous attend ma Dame, fit remarquer prêtre Obson tandis que Lorenna arrivait à son niveau.
— Nous ne sommes pas à quelques minutes prêtes, il me semble, railla Lorenna. Ce n’est pas comme si mon père allait quelque part.
Petit homme chauve au visage déplaisant, il portait son habituelle toge à capuche, couleur beige. Son vêtement était si usé qu’il était facile de le méprendre avec un mendiant. Siégeant au conseil royal, il avait pour rôle de conseiller le roi en parlant au nom de la Déesse et avait à cœur de faire respecter les lois divines.
Le poids des années ne l’avait pas épargné. Lorenna avait la nette impression qu’il ne savait pas ce qu’il racontait la plupart du temps. Elle n’était pas tellement portée sur la religion. L’idée qu’une puissance supérieure décidait du destin de chacun lui hérissait les poils.
Elle se tourna vers Lord Chamberlan, l’homme qui avait remplacé Tywin Percival, précédent premier conseiller royal, à sa mort.
— Harold, tout est en place pour la cérémonie ?
— Absolument, assura celui-ci. Tout a été fait selon votre demande. En espérant, toutefois, que nous n’aurons pas à l’utiliser.
— Ma dame, il est de coutume de porter du noir lors d’une cérémonie funéraire, intervint prêtre Obson avec un mécontentement non dissimulé.
— Pensez-vous que je l’ignore ? railla Lorenna sans aucune douceur.
— Oh si bien sûr, répondit vivement Obson en inclinant la tête. Je ne voulais pas…
— La crémation de mon père n’est pas la seule célébration de la journée, comme vous le savez, le coupa-t-elle. Il me fallait une tenue appropriée.
— Célébration ? répéta Obson, interloqué.
Ignorant le vieux prêtre, elle se retourna vers Ser Percival et lui fit signe d’approcher.
— Allons-y, ne faisons pas attendre la foule plus longtemps, annonça-t-elle.
Ils quittèrent alors la salle du trône et se dirigèrent en direction d’un couloir opposé à celui d’où ils venaient pour rejoindre la cour intérieure du château. Le murmure des discussions arrivait à leurs oreilles à mesure qu’ils s’approchaient de l’extérieur. Lorsqu’ils virent apparaitre Lorenna dans la cour, le silence se fit aussitôt.
Au centre de celle-ci se dressait un immense bûcher funéraire sur lequel reposait le défunt roi. Corps minuscule au milieu de cet imposant assemblage de bois, enveloppé dans un linceul blanc avec de fines broderies en or. Au niveau de sa tête reposait une couronne de lys blanc et son épée avait été déposée sur son thorax.
La populace s’était répartie en arc de cercle autour de la dépouille royale afin que tous puissent voir les derniers instants de l’homme qui avait pris soin du royaume durant trois décennies. Servantes, pages et soldats s’étaient également rassemblés afin de lui porter un dernier hommage.
Une estrade avait également été placée face à la foule de manière que tous puissent voir et entendre la famille royale ainsi que les paroles du prêtre Obson. Un peu à l’écart sur la droite de la cour avait été installée une autre estrade avec plusieurs potences, mais la population ne semblait pas l’avoir remarqué.
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