Etre un monstre
D'autres professeurs se prennent au jeu. Ceux de Teyssien ou de langue évoquent les mythes ou légendes les plus horribles de leur contrée. Les créatures démoniaques de la littérature sont étudiées dans les moindres détails. Des études de textes sur l'origine de chacune ainsi que sur les pouvoirs horribles et les moyens de les combattre sont scrupuleusement analysées.
Les enseignants de physique - chimie fabrique du faux sang ou des potions puantes et enfumées, transformant les salles en demeures de sorcière. Les odeurs et vapeurs toxiques envahissent les couloirs.
Le personnel de la cantine rajoute quelques éléments gluants dans les potages ou les gamelles des élèves les plus résistants. De fausses têtes de rats, oeil vitreux ou doigts en silicone tombent étrangement dans les sauces. Les adultes comme les adolescents s'amusent comme des gamins.
Elena, Maxime et Samuel font les blagues les plus douteuses à leurs camarades malgré les gronderies de Lisa. Entre du faux sang mis sur les jupes ou pantalons de couleur claire des filles et les bestioles diverses et variées cachées dans les sacs ou les trousses, le trio se divertit. La blonde se régale des récits de succube ou de femmes cannibales. Les garçons raffolent des faits divers de tueurs en série. Ils jouent à se faire peur.
La jolie jeune fille enchaîne les looks les plus affreux chaque soir. Entre les canines sanglantes d'un vampire, les griffes acérées d'une harpie ou les fouets d'une esclavagiste, Elena fait fantasmer et dérange en même temps. Ses tenues ne sont pas particulièrement sexy, toutefois, sa maîtrise du maquillage rend réaliste les griffures, chairs à vif et autres détails sordides.
Samuel participe au jeu des déguisements avec la belle blonde. Il s'enlaidit et grime des monstres repoussants et puants. Avec humour, il arbore une tenue de conquérant du Nord Teyssien avec tresses hirsutes, hache saignante, brûlures et tatouages hideux. Les fausses dents noires confèrent l'élément écœurant parfait pour incarner ce personnage historique violent d'assassin, violeur et adepte de la torture.
Maxime ne se déguise pas. Il préfère effrayer en se cachant derrière une porte et hurlant ou en plaçant un seau d'eau sale au-dessus de la porte des toilettes des mecs. Profitant de sa grande taille et musculature, cette andouille escalade même les balcons pour rentrer dans les chambres des gars et les secouer en pleine nuit. Rares sont ceux qui osent se venger de l'héritier Bord. Pourtant, il accepterait sans souci les taquineries.
Lisa se refuse à ces amusements idiots et prône la voie de la sagesse que personne n'écoute. Elle est heureuse des cours un peu particuliers qui ouvrent à de nouvelles connaissances. Personne ne lui fait de blagues ou ne s'amuse à lui faire peur. Trop de monde l'aime depuis qu'elle a permis la création et le sauvetage de tant de clubs. Il n'y a que deux personnes qui semblent la taquiner, cependant, elle sait remettre à sa place Maeve et Thibaut quand il le faut.
Le couple infernal semble très occupé à autre chose et suit de loin les événements. Tout juste l'Impératrice se fait livrer du jus d'orange sanguine et autres cocktails carmin, ou exige des steaks ultras saignants à la cantine. Ils sont en permanence sur le téléphone ou l'ordinateur de la demoiselle.
Malgré cela, ils effrayent leurs camarades. Les récits et légendes des professeurs de littérature apportent des détails comportementaux que les adolescents ont tôt faits de comparer à l'attitude étrange et désagréable de l'Impératrice. Les rumeurs concernant les réelles circonstances de la mort de ses parents circulent et des suppositions farfelues rajoutent à l'aura maléfique de la brune.
Les phrases ne niant rien ou pouvant être comprises de multiples manières rajoutent au mystère. Thibaut et Maeve se délectent des âneries de leurs camarades et utilisent à bon escient l'imagination débordante des adolescents pour inspirer crainte et doutes. Le nom de Teyssier continue d'effrayer, quelle que soit la génération.
Il est vrai que l'entourage de la jeune fille est décédé dans d'étranges circonstances. Le récit d'un cambriolage au sein d'une maison bourrée de caméras et de système de sécurité est très étrange. Le corps de Sania qui aurait été rouée de coups sans que Rudolf ne la défende est suspect. Rudolf était sanguin et très sportif. Il savait parfaitement se défendre. Tout ceux qui ont cherché à avoir des informations trouvent des données qui se contredisent. Une fois Rudolf est mort en premier, une seconde fois en second. Le nom du ou des cambrioleurs reste inconnu. Et le plus dérangeant dans l'histoire reste le fait qu'une enfant de quatorze ans à l'époque possède une arme à feu et sache parfaitement tirer.
Pour rajouter au malaise, le soldat montre régulièrement à la brune les rudiments du combat au corps-à-corps et le maniement des armes à feu. Il n'est pas rare de la voir s'entraîner au combat avec son secrétaire et s'exercer au tir, que ce soit au pistolet, à l'arc ou bien de divers projectiles. La précision de la jeune fille avec les armes à feu est impressionnante. Les gardes du corps de Maxime et Samuel qui ont parfois assister à ces drôles d'entrainements ont confirmé le niveau redoutable du sécrétaire dans les différentes techniques de combats en boxe, taekendo et arts martiaux divers ainsi que celui de la jeune fille. Il est un excellent professeur avec la brune dont les compétences en selfdéfense sont pointues malgrè son manque total d'autre pratiques sportives.
Thibaut participe également à ces séances de combat et la jeune muette y a été conviée, toutefois, elle a décliné l'invitation. Elle accepte juste l'enseignement de quelques mouvements de self-défense et refuse toute forme de bagarre. Lisa a laissé échapper l'information que l'entraînement limite kamikaze en cas de kidnapping de Maeve lui a été enseignée par cet homme avant ses huit ans et qu'il avait été chassé par Rudolf car l'homme se montrait trop doux envers la jeune enfant.
Tous les gamins se rappelent les événements de la tentative de kidnapping durant laquelle la brune avait montré ses talents en terme de self-défense et aussi sa détermination à se défendre à la limite de la folie suicidaire. Il est évident que ses réactions ont été travaillées avec cet homme ou un du même accabit. La brune devient source de croyances et de peurs pour ses camarades.
C'est dans cette ambiance glauque qu'un concours, du déguisement le plus effrayant et le plus dégoutant, s'organise naturellement au sein des troupes masculines. Les filles préfèrent élire le look le plus travaillé et le meilleur make-up même si Elena est classée hors concours en raison du matériel professionnel dont elle dispose. Les enseignants décident de se joindre à ce petit jeu.
Chaque soir, à dix-neuf heures, un défilé des participants se produit dans le grand amphithéâtre dans un brouhaha assourdissant. L'ambiance bonne enfant et les rires devant certaines tenues permettent un moment de détente avant le repas du soir. Quelques monstres non démaquillés mangent à la cantine, faisant soupirer le cuistot et les serveurs devant tant de gamineries.
Le dernier soir, au moment de révéler les gagnants, un drame se produit. De nombreux adolescents et professeurs sont réunis dans la grande salle pour procéder au dépouillage des votes. Soudain, quatre individus masqués et armés rentrent en courant par le fond et se placent vers le milieu de l'amphithéatre. Deux à droite , deux à gauche. Quelqu'un crie " A TERRE". Les gamins se couchent sans réfléchir.
Les malfrats cherchent quelqu'un du regard nerveusement. Ils hurlent et menacent les enfants en brandissant leurs fusils d'assaut. Lisa est plaquée au sol par Thibaut sans avoir le temps de réagir. Alors que les quatres malfrats s'apprêtent à tirer et à faire un massacre à l'aveugle, le secrétaire de Maeve se matérialise soudainement à côté d'un des gars sur la droite. En quelques secondes, et sortant un revolver de nulle part, il abat froidement les deux intrus de droite d'une balle à bout portant dans la tête. Puis, se servant du corps du plus proche de lui comme rempart, il vise les deux derniers à gauche, les atteignant tous deux au bras tenant le fusil d'assaut. Il a visé là où les gilets pare balles ne protégent pas et les empêche de tirer.
Hurlant de douleur, et tentant de tenir leurs armes de leur mieux, les deux autres assaillants prennent alors pour cible le secrétaire. L'homme bouge rapidement en se protégeant avec le corps du malfrat. Il se dirige vers une zone vide tout en haut, détournant les tirs sur lui, là où il n'y a pas d'enfants.
Pendant ce temps là, et sans lui laisser le temps de comprendre ce qui se passe, le petit blond attrape Lisa et la tire vers la sortie du bas gauche de la pièce, en criant aux autres de le suivre et de sortir. Il s'assure que les autres élèves quittent l'amphithéatre avec lui, initiant un mouvement qui permet aux professeurs qui ne sont pas en état de choc et au garde du corps d'Elena d'assurer la fuite des des élèves par la sortie de secours.
Les gardes du corps de Samuel et Maxime réagissent aussitôt. Ils profitent que l'attention soit sur Jacob pour se lever et se précipiter sur deux malfrats pour les neutraliser. Chacun d'eux agrippe l'arme d'un agresseur et l'empêche de retourner l'arme vers les enfants, leur permettant de fuir. Ils les frappent dans les jambes et essayent de les maitriser. Rapidement, ils les désarment et les plaquent au sol.
Une fois dans la cour extérieure, quand la brune s'assure que Lisa vas bien, la jeune métisse voit que son amie porte elle aussi un revolver sous sa chemise. Durant la confusion, Maeve est très calme et en attitude de combat, prête à sortir son arme en cas de souci. Elle cherche du regard d'autres malfaiteurs et reste sur le qui vive. Elle ne détend que quand son secrétaire lui signifie que la menace est neutralisée. Malgrè qu'il vient de tuer deux personnes, lui aussi est très calme et vérifie que les enfants et professeurs sont en sécurité, abandonnant les deux gardes du corps sans se préoccuper d'eux.
Il appele le garde du corps d'Elena et lui donne une arme et des directives pour assurer la sécurité des enfants en attendant les forces de police. D'un regard, Maeve lui confirme que toutes les personnes présentes sont bien du lycée. Au fur et à mesure que les personnes paniquées arrivent et se rassemblent dehors, leur identité est validée par la brune ou Thibaut.
Les professeurs ont fort à faire pour apaiser leurs élèves paniqués. Quelques adolescents plus calmes que les autres les aident de leur mieux. Maxime et Samuel utilisent leur grande taille et leur prestance pour inciter au calme. Heureusement, la police arrive très rapidement et sécurise la zone.
Les enquêteurs tentent de comprendre ce qui s'est passé. Ils isolent les porteurs d'armes et les gardes du corps. Ils interrogent les moins choqués un par un en commençant par les gardes du corps puis les professeurs et élèves en état de parler. Maeve protège farouchement son secrétaire et s'oppose à ce qu'il soit amené au poste pour interrogatoire. Une salle de classe fait office de lieu de déposition. Lorsque la police interrogea le soldat, le récit parfaitement détaillé, presque minuté à la seconde, montre tout le don d'observation de l'ex militaire. Il décrit le visage de chacun des attaquants avec une précision impressionnante, permettant de faire un portrait robot proche d'une photo.
Les caméras de surveillance de l'amphithéatre confirment sa version de faits. On le voit au fond de la pièce au début, observant ce qui se passe calmement. Lorsque les malfrats rentrent, ils ne le voient pas. C'est Maeve qui a détecté le danger et hurlé l'ordre "A TERRE" alertant aussitôt son homme de confiance qui sorti son arme. On le voit se mouvoir auprès des deux malfrats rapidement tel une panthère et tirer sans expression. Ensuite, pointer son arme vers les deux autres sans tirer jusqu'à ce que les gardes du corps de Maxime et Samuel les neutralisent. Aussitôt la menace sous contrôle, il a rejoint les enfants et vérifier les alentours en attendant les forces de police.
Pendant la fuite, on aperçoit Maeve qui reste accroupie près de la sortie et surveille le visage des fuyards avant de les suivre, une main sur sa taille, là où elle porte son arme. Elle ne part que quand il ne reste que les gardes du corps et les malfrats. Les caméras des couloirs et de l'extérieur montrent aux policiers que la brune, Thibaut puis son secrétaire ont checké chacune des personnes présentes et sont restés en état d'alerte jusque l'arrivée de la police.
Mis à part Maeve, Thibaut et étrangement Lisa, tout le monde a peur du secrétaire. Il vient de révéler qu'il est un soldat surentraîné, capable de tuer deux mercenaires de sang-froid sans en éprouver le moindre remords. Il a agi en quelques secondes, avant même que les protecteurs des trois autres héritiers n'aient le temps de bouger. Personne ne l'a vu traverser l'amphithéâtre, ni sortir son arme et fort heureusement, beaucoup d'adolescents ne regardaient pas dans cette direction à ce moment-là puisqu'ils étaient en train de courir vers les sorties de secours ou allongés à terre.
Une cellule de crise est mise en place très rapidement. Les parents arrivent en moins de quelques heures. Comme beaucoup de parents, Claudia Toen est en pleurs et refuse de lâcher sa fille tant elle a eu peur quand le lycée a appelé. Maeve reste près de son employé, un peu loin des effusions. Elle ne peut empêcher les Plenzo et les Tiago de venir remercier son secrétaire quand ils apprenent le rôle qu'il a joué. Puis, tous les autres parents font de même. L'homme reste poli et modeste, assurant n'avoir fait que son travail.
Marc Bord essaye de profiter de l'occasion pour discuter avec le soldat sous prétexte de le remercier. Le regard froid et presque robotique met mal à l'aise l'homme d'affaires. Cependant, il a confirmation qu'il le connait bien puisque le secrétaire se permet une remarque cynique sur les relations entre Marc et Rudolf du temps de leur amitié, prouvant combien il était proche de René depuis des années. Une remarque cynique mais véridique. C'est lui, le secrétaire bizarre, qui a enseigné à Marc et Rudolf les rudiments de l'utilisation des armes à feu quand ils étaient encore enfants sur ordre de René et Marcel. Enseignement que les deux hommes ont fait suivre à leurs héritiers respectifs.
Sa ressemblance avec l'homme de confiance du financier mystérieux fait aussitôt alerte dans le cerveau de l'homme d'affaires. Marc n'avait pas fait de lien avant mais cette fois, sans les habituelles lunettes de soleil, l'homme d'affaires réagit enfin. Si les deux hommes sont différents, ils sont surement de la même famille voir frères. Marc commence à avoir des doutes sur l'identité du nouveau fantôme qui s'attaque aux marchés boursiers et commerciaux partout dans le monde. Il n'a pas le temps de s'atterder sur ses réflexions.
Les journalistes tentent de rentrer dans l'enceinte de l'école pour glaner des informations. Très rapidement, afin d'aider la directrice elle-même en état de choc et les forces de police débordés du flot de presse, Marc Bord et Dimitri Bjork décident de faire une conférence ensemble au portail. Ils sont des puissants dont la parole sera écoutée et les seuls capables de rester calmes malgré la colère. Ils expliquent aux journalistes ce qui vient de se passer. Ils assurent qu'ils n'y a eu que les intrus comme victimes, mais que les enfants sont choqués et ont besoin qu'on les laisse rentrer chez eux sans poser de questions. D'un commun accord, les businessman proposent une récompense pour toute information et surtout menacent le commanditaire de très sérieuses représailles.
Leurs services de sécurité des familles Bord, Plenzo, Bjork et Tiago s'associent pour que chaque gamin et sa famille puisse rentrer chez lui sans être dérangés. Ils mettent à disposition des forces de police toutes leurs ressources humaines ou véhicules. Dimitri et Sarah passent quelques appels. Ils ont de nombreux contacts dans des milieux peu recommandables et espèrent obtenir des informations. Jacob fait de même discrêtement à la demande de Maeve.
Durant les jours qui suivent, les enfants se ressourcent et profitent des congés avec quelques jours d'avance. Les entreprises Plenzo font un don au lycée pour payer les meilleurs psychiatres aux enfants et leurs familles ainsi qu'aux professeurs dont les consultations seront payées par le lycée. Marc Bord, Claudia Toen et Dimitri font de même. Le nettoyage et la réparation de l'amphithéatre est assuré de manière à ce qu'il ne reste plus aucune trace quand les vacances seront finies.
Les malfrats ont su agir en se masquant des caméras de surveillance des couloirs. Ils étaient entraînés. Ils sont connus des services des forces de l'ordre comme étant des mercenaires qui travaillaient pour la mafia. Jamais un tel acte n'avait été commis. Il faut être fou pour s'attaquer de cette manière à des enfants aussi bien nés. Ces hommes ne se louent que pour l'argent. Beaucoup d'argent. L'enquête cherche à comprendre d'où venait le financement et surtout pourquoi.
Les familles des enfants et les professeurs sont éliminés des suspects très vite. Personne ne payerait pour assassiner son gamin et ses potes. Le secrétaire de Maeve justifie son port d'armes par des menaces de mort et plusieurs tentatives de kidnapping de la jeune fille depuis le décès de son grand-père. La famille Teyssier s'est faite beaucoup d'ennemis durant le règne de Rudolf. Toutefois, elle n'était pas la cible de cette attaque si on en croit les caméras de sécurité. En plus, l'homme a agi comme un professionel de la sécurité, ne blessant que les agresseurs et protégeant tous les enfants et professeurs au péril de sa vie en attirant les tirs.
Les malfrats regardaient dans une autre direction que Maeve. Ils cherchaient quelqu'un d'autre. Les services de sécurité personnels des quatre puissants assistent la police et mènent leurs propres investigations de leur côté. Les deux malfrats survivants refusent de parler. La police n'avance pas.
Dès le lendemain de l'attaque, le secrétaire oblige Maeve à reprendre les entrainements au combats. Il a fait imprimer les visages des malfrats et les placent sur les cibles ou les sacs de frappe. Maeve se déchaîne contre eux à la plus grande joie de son protecteur. Le titre de la personne la plus flippante est décerné de manière non-officielle à l'homme de main de l'Impératrice.
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